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Irrésistibles Français : "On a commencé en 2010 après Knysna, on partait de très bas"

Longtemps critiquée, l'ambiance des matches de l'équipe de France a changé de ton depuis plusieurs années, grâce à l'arrivée d'un groupe de supporters actifs : les Irrésistibles Français. A l'occasion de leur neuvième anniversaire, Fabien Bonnel, l'un des fondateurs, revient sur l'histoire de cette association pas comme les autres, et bouffe les bougies. Entretien bleu-blanc-rouge, avec ceux qui font vibrer le cœur - ou chœur - du Stade de France.
Article rédigé par Adrien Hémard Dohain
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 8min
  (MUSTAFA YALCIN / ANADOLU AGENCY)

Les Irrésistibles français viennent de fêter leur 9 ans, mais qui êtes-vous ?
Fabien Bonnel : "Nous sommes environ 1400 Irrésistibles français, venus de toute la France et aussi d’une dizaine de pays. La moitié d’entre nous vit à Paris, parce que le cœur de l’équipe de France bat souvent au Stade de France, mais on accueille des gens de partout. Pour adhérer, ça se passe en ligne et ça coûte dix-sept euros. Parmi les douze associations de supporters des Bleus, nous sommes la seule à vocation nationale."

Comment sont nés les Irrésistibles Français?
FB : "J’ai fait des matches au Stade de France jeune, en 2001. C’était une période faste sportivement, mais il n’y avait aucune ambiance. Ça me surprenait. Au bout de 2-3 matches, j’ai contacté le club des supporters de l’époque qui était un truc commercial, géré par Carrefour et Havas. Je l’ai intégré, et j’ai vu qu’en tribunes tout le monde était assis : c’était un public mort. Comme Deschamps l’avait dit en 1998, c’était des costards cravates et pas des supporters. Toutes les personnes qui voulaient mettre de l’ambiance étaient déroutées et ne venaient plus. Là, j’ai commencé à gueuler tout seul dans un mégaphone. Petit à petit des personnes m’ont rejoint : on était 5, 10, 15, 20. On a grandi comme ça jusque 2006, regroupé dans une section Île-de-France du club des supporters. Et avant le Mondial en Allemagne en 2006, on a atteint les 300 adhérents. Un des obstacles, c’est qu’il n’y avait pas de politique de la FFF pour nous aider. Pour l’Euro 2008, ils ne nous ont donné que 10 billets par exemple. Là, on s’est dit qu’il fallait qu’on se structure pour se crédibiliser et se faire respecter. Après deux ans de travail, les Irrésistibles français sont nés au pire moment, juste après le Mondial 2010 et la tempête Knysna qui balayait l’équipe de France. On est parti de très, très bas."

D’où vient le nom ?
FB :
"Ah, ça c’est de ma faute (rires) ! J’avais un drapeau avec un lapin Playboy bleu-blanc-rouge. C’était un délire avec un pote, on le prenait à chaque match. Quand on cherchait un nom, on tournait autour des « Irréductibles gaulois », et en voyant le lapin Playboy c’est devenu « irrésistibles », tout simplement."

Est-ce que les Irrésistibles Français s’apparentent au mouvement ultra ?
FB :
"Je ne nous considère pas comme un groupe ultra parce que la définition de ce mot est large.  Si on considère qu’être ultra, c’est supporter activement son équipe, debout, en chantant et en agitant les drapeaux, et se déplacer à l’étranger pour l’encourager : alors oui. Mais c’est tout. Je préfère dire qu’on est des supporters actifs."

Comment fonctionne le groupe ?
FB :
"C’est une association classique, mais fragmentée dans toute la France. Notre président vit par exemple à Dijon. On n’est pas du tout dans la structure française où tout est dirigé depuis Paris, au contraire on tient à cette diversité, à ce régionalisme de nos adhérents. Chacun peut mettre en avant sa région en détournant des symboles locaux en bleu-blanc-rouge. En revanche, on n’a pas de sections régionales."

La FFF vous soutient-elle ?
FB :
"Ils nous aident en nous laissant libres, et c’est la plus grande aide dont on puisse rêver. Le tournant c’est en 2012, lorsque la FFF a compris qu’elle avait intérêt à développer les supporters. Avant cela, on nous demandait encore de nous asseoir au stade de France. Après, les gens qui voulaient s’asseoir étaient invités à se placer ailleurs. Ensuite, la. FFF nous a aidés sur du matériel etc."

Est-ce que des membres sont engagés dans des groupes de supporters de clubs ?
FB :
"Oui, dans quasiment tous les clubs professionnels français d’ailleurs. Ce n’est pas tabou, on se connait on sait d’où on vient et cela se passe très bien, mais on préfère que ça ne soit pas mis en avant dans les tribunes. C’est la règle de base : ne pas venir avec un signe distinctif, qu’il soit religieux ou d’un club. On veut une communauté soudée autour de l’équipe de France, c’est tout. C’est aussi pour ça qu’on reprend des chants de tous les clubs, des chants les plus démocratisés possibles."

Quelles sont les différences entre supporter un club et supporter une équipe nationale ?
FB :
"Il n’y a pas forcément de différence, hormis le soucis de localisation. Concrètement, on n’a pas de local pour se rassembler, même sur la région parisienne. On est tous loin les uns des autres, c’est  compliqué de se voir. Finalement, on se retrouve plus facilement à l’étranger comme là en Islande. C’est aussi plus difficile pour organiser des tifos, même si on commence à bien maîtriser notre tribune."

Est-ce que, comme Didier Deschamps, vous pensez que l’équipe de France doit jouer au Stade de France ?
FB :
"Je trouverais normal que l’équipe de France joue partout dans le pays. Après, en tant que responsable de l’association, je sais que les stades de province, contrairement à ce qu’on pense, ne sont pas les meilleures ambiances. Souvent, parce que c’est l’équipe nationale, les ultras du club local ne sont pas forcément investis, ce ne sont pas les plus attachés aux Bleus. Et quand on entre en contact, on sent bien qu’on arrive dans leur stade. Et honnêtement, même nos membres provinciaux préfèrent venir au Stade de France plutôt qu’avoir un match chez eux. L’autre avantage, c’est que cela évite des antagonismes pour les joueurs, comme Mbappé ou Kimpembe à Marseille, ou Lacazette à Saint-Etienne. Le stade de France, de ce point de vue là, c’est neutre, car c’est l’équipe de France."

Quelle a été la meilleure ambiance ?
FB :
"Le barrage France - Ukraine de 2013, c’était hors du commun. Je ne sais pas si on revivra cela un jour. Dès l’échauffement régnait une ambiance particulière. Ce match, c’était un OVNI. On n'a servi à rien ce soir-là en tant qu’association de supporters, tout le stade était une association de supporters, tout le monde était debout, chantait. C’était magique. Sinon j’aime bien me rappeler du France-Belgique de 2015 : on était menés 4-1 et il y avait super ambiance. Là, on se dit qu’on avait gagné notre défi."

La pire ?
FB :
"C’est compliqué, mais globalement toutes les ambiances avant 2012. Maintenant, c’est rarissime qu’on soit déçu de l’ambiance."

Les meilleurs déplacements ?
FB :
"Un des très bons déplacements, c’était au Portugal en septembre 2015. Parce que le Portugal, en septembre, je ne vous fais pas un dessin avec la plage etc. Sinon, l’un des plus forts c’était à Madrid en 2013, quand Giroud égalise à la dernière minute contre la grande Espagne. Plus récemment, les voyages en Allemagne et à Amsterdam étaient superbes aussi."

Les pires ?
FB :
"La Bulgarie en 2017, c’était terrible. Tout était pourri, même la météo."

Pour finir, pour vos 9 ans : que peut-on vous offrir ?
FB :
"Trois points ce soir déjà, ça fera plaisir de quasiment se qualifier. Sinon de continuer à nous développer de la même façon, de brasser encore plus de personnes. Les gens nous remercient pour le travail accompli, nous demandent comment on peut nous rejoindre etc : c’est encourageant."

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