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Affaires des quotas: pas de poursuite

La commission d'enquête ministérielle a estimé qu'il n'y avait "aucun élément ni faisceau d'indice" d'atteinte à la loi sur la discrimination, et donc rien pour renvoyer en justice, dans l'affaire des quotas au sein de la FFF. Le rapport de la FFF relève des "propos inadmissibles, pas à connotation raciste mais discriminatoire", pointe du doigt le détenteur de l'enregistrement qui ne l'a pas transmis à sa hiérarchie
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5 min
 

Tout ça pour ça. Pour paraphraser un film de Claude Lelouch, voilà en résumé l'impression que laisse ce scandale de quinze jours, à l'écoute des conclusions des deux commissions d'enquête. Le ministère des Sports d'un côté, la Fédération française de l'autre, tous sont d'accord pour dire que "aucun élément matériel ne peut démontrer une politique de quota". Et si les plus virulents, les plus passionnés, les plus soupçonneux, pourront peut-être continuer le combat, jugeant que les propos valent les actes, il semble que juridiquement, rien ne vienne étayer les accusations notamment portées par Médiapart. 

Pas d'atteinte à la loi de 2001 selon le ministère de la Justice

"Il y a sans doute lieu de prendre des décisions lourdes au sein de la Fédération française de football". Chantal Jouanno, ministre des Sports, n'a pas caché les problèmes qu'a soulevé l'affaire des quotas au sein de la FFF, au moment de rendre publique les conclusions de l'enquête de son ministère. Mais les conclusions sont claires: "Il n'y a aucun élément ni faisceau d'indice" d'atteinte à la loi sur la discrimination de 2001. "Il n'y a pas de projet." Et d'ajouter que selon le ministère de la Justice, qui a reçu tous les éléments du dossier, "les propos tenus lors de cette réunion sont trop confus" pour renvoyer l'affaire en justice. Le scandale semble bien se diriger vers un énorme "pschit", même si la passion entretenue autour de ce débat laissera certainement les uns et les autres sur leurs convictions et que ceux qui étaient favorables à des poursuites pourront toujours brandir la pancarte du "parti-pris" ou de l'auto-amnistie. "Le monde du football et du sport est gravement déstabilisé par les révélations de Mediapart", a estimé Chantal Jouanno, en jugeant que "les commentaires ont fait autant de mal au moins que les faits eux-mêmes." Et sur l'affaire en elle-même, elle a tenté d'apporter de "l'objectivité et de la sérénité au débat".

"Il apparaît que la mise en place de quotas a été effectivement débattue", relève Chantal Jouanno. "Le sujet a été abordé de manière aussi maladroite que déplacée, à la limite de la dérive raciste. Le sujet a été abordé en raison du problème que rencontre le sélectionneur de l’équipe espoirs 24 joueurs sur 60 ont choisi de jouer pour une autre équipe. Et certains refusent leur sélection, ce qui est inacceptable. C'est un réel problème, accentué par les nouvelles règles de la FIFA. Désormais, un joueurs qui a des parents ou des grands-parents, peuvent choisir leur nationalité. Mais la réponse est illégale, totalement inconcevable, en contradiction avec les valeurs du sport." Et la ministre de conclure: "Pour nous, seul un rappel à la règle, est nécessaire, selon laquelle il est interdit d’enregistrer une conversation. De même, il aurait dû en tenir informer son supérieur hiérarchique. Le rôle du DTN a été analysé. Les paroles du DTN sont regrettables. Il appartient au Conseil Fédéral de le maintenir à son poste. Sa situation est très spécifique. Il n’est pas rémunéré par le Ministère des Sports, à l’inverse des autres DTN. J’ai proposé un audit interne, et un accompagnement managérial." Et de laver Laurent Blanc de tout soupçons, lui qui "assistait pour la toute première fois à ce type de réunion. Les auditions montrent qu'il découvrait ce débat. Il n'avait aucun avis arrêté" et que rien ne permet de dire qu'il "cautionne des orientations discriminatoires. Il s'efforce de remettre les valeurs au coeur du jeu". Quant au débat, "à l'évidence, ce qui s'est dit, n'est pas à la hauteur de la DTN. Ce débat n'était pas à la hauteur de l'exemplarité d'une DTN."

Et Jean-Pierre Bouchout, l'un des inspecteurs du ministère, venait préciser certaines des conclusions de cette enquête: "Les consignes de la DTN pour les centres de pré-formation (13 à 15 ans), n’ont pas changé, et la DTN n’a pas demander de changer les règles. Nulle part nous n’avons trouvé de témoignages allant dans ce sens. (…) La DTN se penche sur le projet d’un "jeu à la française". Selon elle, il est nécessaire de revoir le système de jeu, … Le sujet du fond de jeu est en question. Le constat concerne le problème des Français susceptible de jouer pour d’autres sélections. Il n’y a pas de projet pour traiter de ce sujet, mais il y a un projet pour un système de jeu." Et de préciser: "Laurent Blanc est à la fois surpris par l’ampleur du phénomène, mais contre l’idée de mettre en place des quotas discriminatoires." L'intégralité des conclusions de la commission d'enquête sera rendue publique d'ici 5-6 semaines.

Pas de sanction de la part de la FFF ?

Deux heures après le rapport des inspecteurs du ministère des Sports, les conclusions de l'enquête diligentée par la Fédération étaient dévoilées aux médias. Comme en fin de matinée, par la bouche de Patrick Braouzec, membre de cette commission interne, "aucun élément matériel ne peut démontrer une politique de quota". Mais il relève la "faute" d'André Prévosto, directeur général adjoint de la FFF, qui n'a pas transmis l'enregistrement de cette fameuse réunion du 8 novembre que le lui avait remis Mohamed Belkacemi.

"Des propos inadmissibles, pas à connotation raciste mais discriminatoire puisqu'ils se rapportent à la mise en place de quotas en fonction de l'origine des joueurs". Telle serait la conclusion majeure du rapport de la commission d'enquête diligentée par la Fédération française de football au sujet de l'affaire des quotas, selon Lemonde.fr. Bien loin des accusations que laissait envisager Médiapart, à l'origine des révélations, d'autant que Laurent davenas et patrick Braouzec, les deux membres de cette commission d'enquête, estiment que "aucune preuve que la mise en place d'un tel système ait dépassé le stade de la simple réflexion." Pas de poursuite pénale, pas de sanction à l'encontre de Laurent Blanc ni peut-être de François Blaquart, le DTN, mais la Direction technique nationale est encore une fois épinglée par les enquêteurs. Comme à la suite du fiasco de Knysna, les enquêteurs regrettent son "fonctionnement en totale autarcie", et plaident pour la mise "en place des passerelles entre la DTN et les dirigeants de la FFF, et que ces derniers assurent et exercent une autorité sur les services administratifs".

Un Conseil fédéral extraordinaire se tiendra jeudi pour se prononcer sur les suites à donner à cette affaire. C'est à ce moment-là que la FFF décidera du sort notamment de François Blaquart, le Directeur technique national.

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