Coupe du monde : quand Marc Wilmots, le sélectionneur belge, était sénateur
Imaginez Didier Deschamps siéger au Palais du Luxembourg une fois sa retraite sportive annoncée. Marc Wilmots, lui, l'a fait. Et cela n'a pas été de tout repos.
"Il y a des politiciens qui veulent diviser le pays. Nous, grâce au sport, on essaie de le rassembler. C'est notre message, et j'en ai parlé avec les joueurs : il faut tenir ce pays uni. Quand on est tous ensemble, ce sont des choses extraordinaires." Non, ce n'est pas le premier ministre belge, Elio di Rupo, qui prononce ces phrases un rien gaulliennes, mais le sélectionneur des Diables rouges, Marc Wilmots, qui sera sur le banc pour le huitième de finale de son équipe face aux Etats-Unis, mardi 1er juillet, en Coupe du monde. Wilmots qui, il y a onze ans, s'était fait élire sénateur. Retour sur cette drôle d'expérience.
"Je voulais faire bouger les choses"
En 2003, Marc Wilmots est entraîneur-joueur à Schalke 04, dans le championnat allemand. Le club lui propose une prolongation de contrat pour s'installer durablement sur le banc du club. Il décline. "J'avais donné ma parole" à Louis Michel, raconte-t-il après coup à la RTBF. Le politicien le veut comme tête d'affiche de son parti de centre droit Mouvement réformateur (MR). Son élection est triomphale : il obtient un siège au Sénat, et aussi le record de "voix de préférence" (109 000) pour ce scrutin (les électeurs peuvent cocher sur les listes les candidats qu'ils préfèrent).
"J'ai cru dans un projet, je voulais faire bouger les choses", se souvient Marc Wilmots. Celui qu'on surnomme "le taureau de Dongelberg" déchante rapidement. Il veut s'investir sur les thèmes de la jeunesse et du sport, qui lui sont chers ? Le Sénat n'a pas ces prérogatives. Il veut aller vite et bousculer le système ? Pas le genre de la maison. "Comment marquer vu qu'il n'y a pas de but ?", lâche-t-il un jour à son collègue Alain Courtois, rapporte La Libre Belgique. "On m'a utilisé", fustige-t-il.
Wilmots "offre des arguments à l'extrême droite"
Sans pouvoir, sans motivation, Marc Wilmots veut démissionner quelques mois après son élection. Refus de son parti : le système politique belge prévoit un quota de suppléants, déjà épuisé. Dans l'impossibilité de quitter ses fonctions, il demande au moins à ne pas être payé. L'affaire a un retentissement considérable chez les constitutionnalistes et autres juristes, qui s'écharpent sur la question. Un journal comme La Libre Belgique accuse Wilmots de faire le jeu des populistes : "On offre ainsi des arguments à une extrême droite qui a beau jeu, ensuite, d'exploiter le manque de professionnalisme du personnel politique."
Ecœuré, Wilmots finit par reverser ses indemnités (5 000 euros mensuels) à des associations caritatives œuvrant dans le domaine de la jeunesse et du sport, "mon combat", explique-t-il à la Dernière Heure en 2005. Entre-temps, encore officiellement sénateur, il a déjà repris un club, la modeste équipe de Saint-Trond, en première division belge.
"J'ai appris beaucoup de choses, et je ne regrette pas mon passage au Sénat", analyse-t-il pour la RTBF. Il est quand même probable qu'il s'épanouisse plus à la tête de la sélection belge, fonction qu'il occupe depuis 2012.
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