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Grand entretien Thiago Scuro : "L'objectif principal de l'AS Monaco, c'est Top 3 de la Ligue 1"

A deux journées de la fin de la première partie de saison, l'AS Monaco est solidement ancrée sur le podium de la Ligue 1. L’occasion, avant la réception de l’Olympique Lyonnais vendredi soir, de dresser un bilan avec le nouveau directeur général Thiago Scuro.
Article rédigé par Julien Froment
Radio France
Publié
Temps de lecture : 13min
Thiago Scuro, le 18 août 2023 (DYLAN MEIFFRET / MAXPPP)

C’est le nouvel homme fort de l’AS Monaco. Thiago Scuro, 42 ans, a été nommé officiellement cet été directeur du football avant d'être promu directeur général en octobre. Il a à sa charge à la fois direction sportive et administrative. C’est son prédécesseur Paul Mitchell qui l’a choisi et proposé au président du club princier, Dmitri Rybolovlev. "Je suis très, très heureux d’être ici. C’est une réussite pour moi personnellement, ainsi que pour ma famille, glisse à franceinfo le Brésilien, large sourire, lors de l’entretien accordé par visioconférence. L'état d'esprit du président est un élément qui a été très important pour moi – la façon dont il soutient le club et dont il l’accompagne. Nous avons souvent des conversations. Il soutient ce club depuis de nombreuses années, avec sa vision et aussi financièrement. C'est donc aussi quelque chose qui rend heureux et qui motive."

Formé à l’école Red Bull, Thiago Scuro est passé par la galaxie autrichienne via le club brésilien de Bragantino, dont il a largement contribué aux bonnes performances avec une montée en Première division auriverde et une finale de la Copa Sudamericana (l'équivalent en Amérique du Sud de la Ligue Europa) en 2021. Il apprivoise depuis quelques mois le football européen. Ce passionné, qui n’arrive pas en terre inconnue puisqu’il connaissait déjà très bien la Ligue 1 et la Ligue 2 avant son arrivée, est très ambitieux pour l’AS Monaco. Entretien.

Franceinfo : Monaco est dans le top 3, c'est là où vous vouliez être, êtes-vous satisfait de cette première partie de saison ?

Thiago Scuro : C'est effectivement la place que nous voulons occuper à la fin, c’est-à-dire être dans le top 3. Il est clair que notre objectif principal pour la saison est de retrouver la phase de groupes de la Ligue des champions, et ce, dès l’année prochaine. C'est le message que nous faisons passer en interne et en externe depuis le début. Si l'on regarde le chemin parcouru, il est bon mais je crois que nous aurions pu prendre un peu plus de points dans certains matchs. Notre défi pour la seconde moitié de la saison sera d’éviter de perdre ces points, comme nous l'avons fait lors de cette première moitié de Championnat.

Vous parlez de points perdus : parmi vos trois défaites cette saison, il y a Nice (0-1) ou le PSG (5-2). Que manque-t-il à Monaco pour être au niveau de ces équipes ? Est-ce juste une question de détails ?

Nous n’avons pas un niveau différent d’eux, et plus particulièrement de Nice. Oui, le PSG est un club très fort, en Ligue 1 et en Europe. Quand vous regardez le niveau d'investissement qu'ils sont capables de faire, cela leur donne beaucoup plus de marge d’erreur que n'importe qui d'autre en Championnat. Et même si nous sommes compétitifs, c'est la réalité.

"A mon avis, lors du match contre Paris, la performance a été assez équilibrée entre les clubs. Je pense que quelques erreurs individuelles, plus la qualité d'un ou deux joueurs du PSG, ont fait la différence et reflètent le score. Maintenant, nous aurons une nouvelle chance d'affronter ces clubs lors de la phase retour, nous devons travailler et continuer à progresser."

Thiago Scuro, directeur général à l'AS Monaco

à franceinfo

Encore une fois, je pense que sur les deux saisons à venir, nous avons la possibilité d'équilibrer encore mieux notre organisation pour être plus compétitifs.

Qu'est-ce qui est le plus satisfaisant pour vous dans cette première partie de saison ?

Le niveau d'engagement des joueurs envers le club et envers les principes de jeu est quelque chose dont je suis globalement très heureux. Nous pouvons bien voir qu'ils donnent le meilleur, qu'ils approuvent et qu'ils croient en la façon dont nous voulons jouer. Ils essaient de s’améliorer de façon individuelle et collective. Cela ne fait que cinq mois, ce que met en place Adi Hütter [entraîneur de Monaco] est encore nouveau. Il est donc important que les gens s'engagent dans ce processus.

Est-ce une nécessité pour Monaco d'être chaque année en Ligue des champions, tant sur le plan économique que sportif ?

C'est clair. Monaco est un club qui a l'ambition d'être le plus régulièrement possible en phase de groupe de la Ligue des champions. Ce n'est pas un défi facile à relever. Cela fait cinq ans que Monaco n’a pas disputé la phase de groupes de la Ligue des champions. Mais notre ambition est de préparer l'organisation à être plus régulière d'année en année pour pouvoir atteindre cet objectif, non seulement pour l'aspect sportif, mais aussi pour la santé financière du club. Il est très important de participer à la Ligue des champions et d'avoir accès à ce niveau de revenus et d'exposition.

Zakaria ? "Un joueur clé". Balogun ? "Dans les temps de passage de Reims"

L'entraîneur Adi Hütter réalise un excellent travail, avec un groupe composé de jeunes joueurs et d'éléments plus expérimentés...

Il a réussi à partager clairement le projet de jeu du club, qui correspond à sa vision, et à embarquer les joueurs dans cette aventure. Pas à pas, pendant la semaine, pendant les séances d'entraînement, match par match, il travaille à améliorer ce qui nous manque encore. C'est une ligue très exigeante, nous avons beaucoup de clubs de bonne qualité et bien organisés. Comme nous pouvons le voir, de plus en plus de nouveaux entraîneurs et de jeunes entraîneurs se développent dans différents clubs. C'est un défi, mais c'est aussi une bonne chose, car cela fait progresser la qualité du Championnat et nous en sommes heureux, non seulement pour nous, mais aussi pour le niveau la Ligue 1.

Vous avez réalisé votre premier marché des transferts cet été. Cinq joueurs sont arrivés avec des satisfactions comme Denis Zakaria...

Denis joue son rôle en étant l'un des joueurs clé de l'équipe et en apportant son leadership au vestiaire. C'est un gars qui a une bonne expérience, de la maturité, un joueur qui a de l'ambition et qui peut parler plusieurs langues, ce qui aide beaucoup à l'intégration dans le vestiaire.

L’adaptation semble plus compliquée pour votre attaquant Folarin Balogun (4 buts et 3 passes décisives cette saison…

Je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne pense pas qu'il soit en difficulté, au contraire, je pense qu'il fait son travail, qu'il s'adapte et qu'il progresse. La différence avec les autres, c'est que Balogun n'a pas eu l'occasion de faire une présaison complète. Il a été la dernière recrue lors de la dernière semaine de mercato. Et la saison avait déjà commencé. Il doit également, pour la première fois, évoluer avec un calendrier très chargé. Il a été systématiquement appelé avec sa sélection des Etats-Unis, où il a passé plus de 30 jours depuis son arrivée fin août à Monaco. Pour être clair, il ne s'agit pas de ses compétences, ni de son état d'esprit. Il s'agit plutôt d'un processus d'adaptation au calendrier. Avec le temps, il aura plus de confiance pour répondre aux attentes. Nous sommes satisfaits de sa progression. Si l'on fait le rapport entre le nombre de minutes et le nombre de buts marqués, il n'est pas très loin de ce qu'il a fait la saison dernière. Je pense que tout le monde a en tête sa saison de l’année dernière, où il a eu un fort impact, surtout en deuxième partie de saison en terminant dans les meilleurs buteurs du championnat. Je suis convaincu qu’il peut avoir de meilleures stats ici, à Monaco.

Vous avez six joueurs qui s'apprêtent à disputer la CAN ou la Coupe d’Asie. Pensez-vous devoir les remplacer durant le mercato d’hiver ?

C'est un défi pour l'ensemble du Championnat, parce que je pense que Paris est le seul club qui n'aura pas un impact énorme [Achraf Hakimi et Lee Kang-in sont en effet concernés] et plusieurs clubs, comme le nôtre, devraient être impactés. Nous le savions, donc cela ne change pas grand-chose à notre plan. Durant cette période, il y a quatre journées de Championnat et trois tours de Coupe, au plus. Je pense que nous avons un groupe capable de relever ce défi, avec des opportunités pour les joueurs du groupe élite de rejoindre l’équipe première afin de prendre du temps de jeu. Nous n’allons pas recruter des joueurs pour un besoin à très court terme, cela n’a pas de sens.

"A l’AS Monaco, nous sommes au début d’un processus"

Comment constituez-vous votre équipe ? Comment s'y prend-on pour créer une équipe cohérente ? Je suppose que vous travaillez avec chaque entraîneur. Comment cela fonctionne-t-il ?

Le point de départ, c’est l'idée de jeu. Qu'attendons-nous de notre équipe dans les différentes phases de jeu ? Nous avons donc une idée de jeu claire au club, qui a été discutée en détail avec Adi Hütter, avec les analystes, avec tout le monde. Le comportement de l'équipe détermine les besoins individuels pour chaque poste, avec des caractéristiques bien identifiées. C’est la partie sur laquelle travaillent les recruteurs. Je suis convaincu qu’en travaillant ainsi, nous parviendrons, saison après saison, à devenir plus fort et plus réguliers. Nous sommes au début de ce processus. Bien entendu, la mentalité et l’état d’esprit du joueur pour évoluer à Monaco sont des éléments que nous examinons très attentivement. L’ambition, le courage et la considération pour le club sont des choses importantes à nos yeux.

Quel rôle joue l’Academy de l’AS Monaco, qui fait partie intégrante de l’ADN du club ?

La Diagonale [le centre de vie de l’Academy] est un endroit spécial. Non seulement pour ce qu'elle est, mais aussi pour les joueurs qui ont contribué à sa renommée. Certains d'entre eux étant devenus des légendes internationales du jeu (Mbappé, Henry, Trezeguet, Thuram, Petit…). C'est donc une grande source d'inspiration et de motivation pour les jeunes garçons lorsqu'ils pénètrent dans ce bâtiment. Au fond, vous avez la même chance que les joueurs de légende passés par là, alors, faites-en bon usage ! Je pense que c'est un premier point.

"Nous avons une stratégie claire pour offrir des opportunités aux joueurs de l'Academy en équipe première. Il s'agit de la stratégie du club. Parce qu'ils doivent avoir leur chance. Bien sûr, ils doivent avoir du talent, ils doivent travailler et mériter. Mais ils doivent pouvoir avoir leur chance. Il arrive que les clubs ne le permettent pas. Or c’est un pilier important de notre projet ici."

Thiago Scuro

à franceinfo

Donc encore une fois, c’est capital d’investir dans leur développement, mais aussi dans leur transition et leur intégration en équipe première, je crois beaucoup à ces étapes.

 

Une réunion va se tenir avec le président de la Fédération française de football Philippe Diallo concernant le tournoi olympique et la mise à disposition des joueurs par les clubs. Quelle est la position de Monaco?

Cet automne, Monaco est le club qui a fourni le plus de joueurs aux équipes nationales de jeunes en France (des U16 aux Espoirs). Nous avons eu deux joueurs de moins de 17 ans finalistes à la Coupe du monde (Saïmon Bouabré et Joan Tincres). Akliouche, Matsima et Magassa ont été appelés avec les Espoirs cet automne. Ben Seghir, qui est un joueur très talentueux, sera peut-être concerné. Et bien sûr, Monaco soutient le football français, nous soutenons la Fédération dans tous ses besoins. Nous sommes donc tout à fait disposés à discuter de la meilleure façon de coopérer et de répondre à leurs besoins pour les Jeux olympiques. Je sais qu'en général, l'Europe n'accorde pas beaucoup d'importance aux Jeux olympiques. Je viens du Brésil. C'est un objectif très, très important dans notre pays. Et j'ai eu une expérience similaire avec les joueurs. En 2020, nous avions à Bragantino le meilleur joueur du championnat brésilien, Claudinho, et nous l'avons laissé partir aux Jeux olympiques. Il a eu la chance d'être le numéro 10 de la sélection brésilienne et de remporter une médaille d'or. Je sais à quel point c'est important pour les joueurs et pour le pays. Nous soutenons donc pleinement le football français au sein de la Fédération pour atteindre cet objectif. C'est pourquoi nous soutenons pleinement l'initiative de la Fédération, d'inviter les clubs à discuter, car ce sera aussi l'occasion pour la Fédération d'écouter les clubs. Et grâce à ce dialogue, je pense que tout le monde pourra trouver la meilleure solution.

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