Allemagne - Turquie, une demi-finale et des symboles
Il n'est jamais très opportun de vouloir mélanger sport, débats de société et politique. Les clichés sont légion, les tentatives maladroites, et en conséquence les résultats souvent décevants. Cependant, dans le cas de ce match Allemagne-Turquie, un certain nombre de réalités se retrouvent sous les projecteurs.
On estime en effet le nombre de Turcs vivant en Allemagne à plus d'1,7 million, composant ainsi la plus grande communauté immigrée du pays. La rencontre de ce soir a permis à de nombreux commentateurs de rappeler les rapports souvent délicats qu'entretiennent les deux nations. Méfiance commune, relents d'islamophobie, ou simple méconnaissance sont certains facteurs ayant conduit à cette situation.
_ En 1987 déjà, le livre-enquête "Tête de Turc" de Günter Wallraff avait mis en avant les discriminations et brimades que subissaient les ouvriers turcs outre-Rhin.
Depuis, les choses ont heureusement évolué mais les clichés sont tenaces, et beaucoup d'experts ont profité du match pour rappeler que l'intégration peinait à trouver sa plénitude. Dans le football aussi, d'ailleurs. On a pu (re)découvrir par exemple que nombre de joueurs d'origine turque nés en Allemagne avaient choisi leur "premier" pays, au détriment de leur patrie d'accueil.
Nouvelle surprise ?
L'heure serait même grave si l'on en croit l'empressement de la Fédération allemande de football qui a lancé, dimanche, une nouvelle campagne pour renforcer la fameuse "intégration par le football". Au haut niveau international, seul le joueur du Bayern Mehmet Scholl avait porté à 36 reprises le maillot de l'équipe d'Allemagne entre 1995 et 2002.
Pour revenir à des réalités plus "terre-à-terre", la forte présence turque en Allemagne devrait se traduire par un grand nombre de supporters vêtus de rouge ce soir dans les rues du pays, et notamment de Berlin, la capitale, où plus de 500.000 personnes sont attendues au pied de la Porte de Brandebourg. Sous une étroite surveillance policière.
Sur le plan sportif, la facilité conduirait à donner les Allemands favoris. Les joueurs de la Mannschaft jouent bien, jouent ensemble et s'appuient sur un jeu très physique. Les Turcs pratiquent un football plus latin et débridé, et ils seront privés de leurs attaquants Nihat, Kahveci et Turan. Mais ils ont prouvé qu'ils pouvaient surprendre, et emballer les fins de rencontres (Croatie, Suisse et République Tchèque). Une équipe virtuellement éliminée au premier tour peut parfois aller loin. Très loin, même.
Matteu Maestracci
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