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Echanges musclés, parties de pêche et double nationalité : qui est Olivier Dame-Malka, le "bad boy" de l'équipe de France de hockey ?

La France affronte le Canada, jeudi soir, lors du championnat du monde de hockey sur glace. L'occasion de faire la connaissance du Franco-Canadien des Bleus.

Article rédigé par franceinfo - Geoffrey Lopes
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Olivier Dame-Malka, défenseur de l'équipe de France de hockey sur glace, le 9 mai 2017.  (DENIS TRASFI / MAXPPP)

"C'est une pile qui monte en énergie et qui explose en entrant sur la glace avant de jouer." Romain Farruggia, assistant manager du club de hockey de Rouen, ne tarit pas d’éloges sur Olivier Dame-Malka. Le défenseur sera sans doute l'homme à suivre lors du match du championnat du monde de hockey que les Bleus disputent, jeudi 11 mai, à l’AccorHotels Arena de Bercy contre l’ogre canadien, champion du monde et olympique en titre. Une rencontre particulière pour le Québécois qui a fait toutes ses classes à Montréal. Franceinfo dresse son portrait. 

De Montréal à Dijon

Prometteuse, la carrière du Montréalais met du temps à décoller. Le défenseur, que ses coéquipiers surnomment ODM, peine à s’imposer et stagne dans les divisions inférieures américaines. En 2014, alors qu’il a 24 ans, les équipes de la NHL (Ligue nord-américaine de hockey) le boudent toujours. Mais Olivier Dame-Malka ne désespère pas et décide de s’exiler : "C’est difficile de se faire une place dans une équipe et de trouver une stabilité en NHL, reconnaît-il auprès de franceinfo. J’avais besoin de changement et d’un nouveau challenge pour booster ma carrière."

Bénéficiant de la nationalité française de son père, ODM décide d'obtenir son passeport et de traverser l'Atlantique. Avec une idée en tête : "Au bout de deux ans dans le championnat de France, tu peux jouer pour les Bleus." Un objectif devenu ambition pour le Franco-Canadien, récompensé en décembre dernier par une première sélection. Le gaucher fait le pari de signer pour les Ducs de Dijon, une équipe de milieu de tableau. "Les grosses équipes ne m’avaient jamais vu jouer et ne voulaient pas prendre le risque de me prendre", justifie le hockeyeur.

Un "pugilat" le met en lumière

Progressivement, le rugueux défenseur s’adapte et se fait un nom. En Bourgogne, lors de sa première saison en Ligue Magnus (la première division française de hockey sur glace), son puissant slapshot (lancer frappé) fait des ravages. Il joue surtout de son physique pour renverser et mettre en échec les attaquants adverses. "Mes entraîneurs m’ont toujours dit d’être agressif. Pas pour faire mal, car je n’ai jamais souhaité blesser qui que ce soit, mais pour que l’adversaire y pense à deux fois avant de venir dans ma zone. C’est aussi ça le hockey", explique Olivier Dame-Malka.

Mais c'est en mars 2015 que le hockeyeur se fait particulièrement connaître. Lors d'une rencontre contre les Brûleurs de loups de Grenoble. En quart de finale des séries, il frappe violemment un adversaire allongé au sol. Un "pugilat", relaté par Le Bien Public, qui lui vaudra quatre matchs de suspension.

Sur cet épisode, il raconte : "Le coach de Grenoble a envoyé un de ses joueurs pour attaquer délibérément notre gardien. Il n’a pas fait gaffe que je me trouvais sur la glace. Alors je me suis jeté sur lui pour l'en empêcher. C’est inacceptable de mettre des coups en pleine tête du gardien de l’équipe adverse." Deux ans après les faits, ODM ne regrette rien : "Je me fous de ce qu’on peut en penser. Personne ne touche à mon équipe. Je fais payer à ceux qui ne respectent pas les règles et c’est tout."

Depuis cette bagarre, l'image de "bad boy" lui colle à la peau. La presse titre que "la peste arrive" quand son équipe se déplace. Il se fait siffler sur plusieurs patinoires. Le public ne lui pardonne pas ce coup de sang. Mais cela ne le touche pas : "Malheureusement, en France, on n'a pas le droit de se battre [contrairement au Canada]. Maintenant, passer trois minutes sur la glace et retourner aux vestiaires, ça ne me plaît pas. J’ai envie de jouer, pas de passer ma vie en prison. J’ai adapté mon jeu à l’arbitrage européen. Je me contrôle. Je suis plus concentré", explique-t-il. 

Le feu sur la glace

Ses coéquipiers apprécient son implication physique parfois à la limite. Ses adversaires redoutent ses provocations capables de les faire dégoupiller. Son fort caractère a convaincu les Dragons de Rouen de le recruter en 2015. Romain Farruggia ne cache pas son enthousiasme : "On aime son jeu physique, mais on a travaillé avec lui pour qu’il fasse péter les plombs des adversaires sans dépasser la limite. Il s’est canalisé sans perdre son côté agitateur qui nous apporte beaucoup", relate le coach à franceinfo. En 2016, ODM devient champion de France avec Rouen.

Olivier Dame-Malka (au centre) lors du match France-Suisse, lors des championnats du monde de hockey, le 9 mai 2017.  (DENIS TRASFI / MAXPPP)

Si la crosse le transfigure et l’enflamme, l'impulsif Québécois demeure placide dès qu'il quitte la patinoire. Le défenseur reconnaît cultiver une double personnalité : "Sur la glace, je deviens agressif, je veux gagner à tout prix." Dans le vestiaire, ODM n’hésite pas à haranguer le groupe. "Il pousse parfois des cris de guerrier pour motiver ses troupes", confie Romain Farruggia.

Mais le jeune homme déteste se mettre en avant. "Face aux supporters, c’est quelqu’un de très réservé. Lorsqu’il est arrivé en 2015, il était un peu réticent à partager des moments avec nous", se remémore pour franceinfo Brigitte Schmit, responsable du Septième dragon, groupe de fans des hockeyeurs de Rouen. Dans les tribunes les supporters n’en font pas un totem, mais Brigitte Schmit note que c’est son maillot qui a rapporté le plus d’argent lors des enchères annuelles organisées par le club au printemps.

"La canne à pêche pour la finesse, la crosse pour la force"

Et lorsque la pression se fait trop forte, Olivier Dame-Malka préfère s’écarter pour aller pêcher. Un autre geste que le jeu de crosse : "J'utilise la canne à pêche pour la finesse, la crosse pour la force. La pêche me permet de me relaxer et de penser à autre chose. C’est important de couper de temps en temps en attrapant une truite avec des amis", philosophe le sportif. Une passion qui impressionne le manager général de son club Guy Fournier : "Dès qu’il a un jour de repos, je le vois partir du parking du club avec ses cannes à pêche. Cela fait vingt ans que je m’occupe des Dragons de Rouen et je n’ai jamais vu un joueur aussi épanoui par autre chose que le hockey." 

Le soir, lorsqu'il faut repartir sur la glace pour un match, après avoir fait une sieste, Olivier Dame-Malka a un petit rituel pour se reconcentrer. Il enfile toujours son patin gauche en premier avant de se lancer. Il redevient le combattant rugueux retenu en équipe de France pour le championnat du monde. Le Rouennais se laisse alors porter par le chaud public français : "Ici, dans les patinoires, on se croirait dans des stades de foot. Il y a du bruit sans arrêt. Les fans sont fous. Ils dédient des chansons aux joueurs et crient pour nous pousser. En Amérique du Nord, les gens sont plus calmes et se contentent de boire leur bière." Des ambiances qui le galvanisent autant qu’elles font resurgir le côté obscur de sa force.

Le Québécois espère que cette ambiance survoltée aidera les Bleus à renverser le Canada, favori de la compétitionm, et pourquoi pas arracher un quart de finale.

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