Dimitri Jozwicki, sprinteur handisport et ergothérapeute, rêve des Jeux paralympiques de Tokyo
Il est l’étoile montante de l’athlétisme handisport français. A 24 ans, Dimitri Jozwicki veut croire en son rêve de participer pour la première fois à des Jeux paralympiques. Ce spécialiste du 100 mètres est atteint d’une infirmité motrice cérébrale (IMC), qui se traduit par une paralysie partielle des quatre membres. Cela entraîne un déficit d’amplitude articulaire, des problèmes de coordination et de crispation musculaire. Un handicap qu’il porte depuis sa naissance, mais qui n’a été découvert qu’en classe de CP à la suite de problèmes de motricité.
Pourtant, celui qui pratique l’athlétisme depuis onze ans, ne pensait pas avoir sa place dans le handisport. “J’ai un handicap léger et qui ne se voit pas au premier abord”, confie Dimitri Jozwicki. Le Nancéien a déjà glané six titres de champion de France et atteint deux fois la finale du 100m au championnat du monde (en catégorie T38). Actuellement 9e mondial, le sprinteur doit se hisser en 6e position afin de valider son ticket pour Tokyo. “L’écart est très serré, mais je ne suis pas loin du tout”, estime-t-il. Son temps de référence est de 11’45 sur le 100m, à huit centièmes du 6e. Il a jusqu’en juin pour décrocher son billet pour les Jeux.
Christophe Lemaître, l’inspiration
Ses résultats sont prometteurs mais rien ne le prédestinait à devenir athlète de haut niveau. Après avoir testé le foot et le rugby, Dimitri qui n’a alors que 13 ans se tourne vers l’athlétisme, sport qu’il ne quittera plus. “J'ai appris à ce moment-là qu’il ne fallait pas que je reçoive de coups violents derrière la tête", indique-t-il. Après une année sans pratique sportive, le déclic se produit en 2010. A l’époque, un certain Christophe Lemaître signe un triplé inédit sur 100 m, 200 m et 4 × 100 mètres lors des mêmes championnats d'Europe. “Avec mon frère jumeau Rémi, avec qui nous avons toujours pratiqué les mêmes sports, ça nous a donné envie de faire de l’athlétisme”, se remémore-t-il.
En 2010, Dimitri Jozwicki se lance alors dans le sprint avec les valides. Ce n’est que six ans plus tard, et sur les conseils de son coach, qu’il rejoint le handisport. Et le succès est immédiat. Lors de sa première compétition en 2016, Dimitri devient champion de France junior du 60 m. “Je ne connaissais pas la fédération de handisport. J'y suis allé pour découvrir. Après ce titre, je me suis alors dit que je pouvais peut-être y faire quelque chose”, se souvient celui qui s’entraîne toujours avec des valides aujourd'hui. Le staff de l'équipe de France le repère. Mais Dimitri ne veut pas se lancer tout de suite dans le haut niveau.
L'ergothérapie avant tout
A l’époque, l’étudiant de 18 ans est en première année de médecine et souhaite assurer ses études. Car le jeune homme a déjà son plan de carrière en tête : devenir ergothérapeute (qui adapte les conditions de vie d’une personne en situation de handicap). “J'ai toujours voulu faire ce métier car j’en ai eu besoin pendant dix ans. Sans l’ergothérapie, je n'aurais pas pu suivre une scolarité normale, et je n’aurais pas pu être la personne que je suis devenue aujourd’hui. J’avais aussi envie de rendre ce que l’on m'a donné à l’époque”, confie-t-il.
L’athlétisme passe alors au second plan, et le sprinteur tire un trait sur les Jeux de Rio de 2016. Un choix dur qu’il ne regrette pas. “Mon objectif à ce moment-là n'était pas de devenir sportif de haut niveau. Je voulais me mettre à l'abri au niveau des études. Le reste m’est un peu tombé dessus.” Une fois sa première année de médecine en poche, il aménage son emploi du temps entre ses cours de l’école d’ergothérapie et ses entraînements. Dimitri axe ensuite la saison 2019-2020 sur sa préparation aux Jeux, qui seront finalement repoussés d’un an. Un mal pour un bien, pour celui qui a pu terminer ses études et bénéficier d’un an supplémentaire pour l'objectif paralympique. “Je suis à 200% fier de lui, confie son ami Younes Idlasmad. A l’école d’ergothérapie, alors qu’on avait 40 heures de cours par semaine, il allait s’entraîner les soirs quand nous avions terminé notre journée. C’était très intense, mais il n’a rien lâché”, salue son ex-camarde de promotion.
“Il a toujours franchi les obstacles sur sa route”
Malgré la déception de ce report, sa détermination n’a pas été ébranlée. Pour son frère jumeau Rémi, celle-ci l’a d’ailleurs toujours guidé que ce soit lors de ses études ou dans sa carrière sportive. “Dimitri a toujours été exigeant avec lui-même et dans les objectifs qu’il se fixe. Au lycée, alors qu’il faisait tout pour devenir ergothérapeute, des professeurs ont essayé de le décourager. Parfois avec des remarques du style : ‘Ce n’est pas un handicapé qui soignera d’autres handicapés’. Sa force est qu’il a toujours franchi les obstacles qui lui barraient la route”, livre son frère. Ce dernier, qui ne souffre pas de handicap, mais qui a toujours eu une relation fusionnelle avec Dimitri, est devenu enseignant en activité physique adaptée et guide d’athlète déficient visuel.
Aujourd’hui, en parallèle de son activité de sportif, Dimitri Jozwicki travaille pour le service Santé et conditions de travail au sein de Pôle emploi, avec qui il a une convention d'insertion professionnelle. Ce contrat spécifique pour les sportifs de haut niveau lui accorde une stabilité financière, car il ne vit pas encore de son sport. Au-delà de l’aspect économique, l’athlète assure aussi son après-carrière. “Pour moi, c'est important de préparer l'après haut niveau, surtout quand on connait la précarité de nombreux sportifs en France. Et le contexte actuel prouve que je ne me suis pas trompé dans mon choix”, détaille-t-il. Aujourd’hui, à 24 ans, son nouvel objectif est de participer aux Jeux de Tokyo et de ramener une médaille paralympique. Et cette fois, il est prêt à viser les sommets.
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