Wiggins: "Il n'y a pas plus grand que le Tour de France"
Q: Certains ont évoqué ces derniers jours votre future victoire comme le plus grand exploit du sport britannique. Que cela vous inspire-t-il ?
R: "J'ai vu à la télévision que Chris Hoy dit ça. C'est spectaculaire. Le Tour de France est une énorme épreuve sportive, j'ai toujours été un grand fan de cyclisme, c'est dur de réaliser ce qui m'arrive. Je suis très honoré. En tant que sportif, c'est le plus grand compliment qu'on puisse recevoir: le respect d'un pair. Je suis moi-même quelqu'un qui reconnaît les exploits des autres, c'est surprenant d'être dans la situation inverse."
Q: Beaucoup de champions ont connu des difficultés avant de gagner. Vous-mêmes en avez connues. Pensez-vous que ce passage à vide vous ait relancé ?
R: "Tout le monde est différent. L'année dernière, il y a eu ma chute, mon abandon, la déception après un bon Tour 2009... On a besoin de ces déceptions pour être plus fort. Dans l'équipe, on a fait le point, on a revu l'entraînement, le style de vie, on a fait de bons choix, et c'est ce qui a permis d'arriver là. L'an dernier, j'ai passé la dernière semaine du Tour à regarder ce qu'a fait Cadel (Evans), son bonheur de gagner. Ca m'a donné l'envie de ressentir ce qu'il ressentait l'année dernière."
Q: Vous avez beaucoup gagné mais c'est la première fois que vous êtes aussi ému...
R: "Les dix derniers kilomètres ont été 10 kilomètres exceptionnels. J'ai repensé à tout ce qui m'est arrivé: la perte de mon père, mon modèle qui est parti quand j'étais enfant et qui est mort pendant le Tour l'an dernier, la vie avec ma mère dans un petit appartement, ma femme, mes enfants, notre vie ces quatre dernières années, les critiques qui disaient que je ne gagnerais jamais le Tour avec Sky... J'ai repensé à mon enfance. Je regarde le Tour depuis que j'ai 11 ou 12 ans en rêvant un jour de le gagner mais quand on habite à Londres, ce n'est qu'un rêve. Ca a été un chemin difficile. J'ai été champion du monde junior en 1998, puis dans les équipes britanniques nationales avec Dave (Brailsford) et Shane (Sutton)... Passer ces étapes, se marier, avoir des enfants, gagner l'or olympique et des Championnats du monde... Tout ça fait grandir."
Q: Vous resterez le premier vainqueur britannique du Tour. Avez-vous conscience d'entrer dans l'histoire ?
R: "Il n'y a pas plus grand que le Tour de France. Il n'y a pas beaucoup de vainqueurs. C'est une liste fermée à laquelle j'appartiens. Mais être le premier Britannique à le gagner, aller au-delà de ce qu'ont fait Robert Millar, Tom Simpson... Ce sont des héros qui ont toujours été au sommet pour moi. Je suis Bradley Wiggins, ces gens sont tout en haut et je ne m'imaginais jamais comme leur égal. J'espère que ça ne me changera pas, je ne veux pas que ça me change. C'est bien d'être reconnu pour avoir fait quelque chose d'exceptionnel, ça inspire. Mais à la fin, je rentre chez moi, je lave le sol parce que j'ai promené les chiens ou que j'ai fait du cheval. Je suis comme tout le monde."
Q: Certains disent que votre victoire a été fade. Que leur répondez-vous ?
R: "Beaucoup de gens disent +Moi, j'aurais attaqué là+, +J'aurais fait une journée à la Pantani+... Le cyclisme a changé. Quand on parle de cyclisme moderne, on court à des rythmes élevés. Pour pouvoir accélérer, c'est difficile. Le Tour est différent et est beaucoup plus humain. Dès lors que Sky a été créée, on a toujours travaillé sur des détails. On a travaillé sur beaucoup de choses que les autres ne faisaient pas: l'hydratation après la course, aller au lit tôt, avoir un chef qui fait attention à l'équilibre nutritionnel... Ce sont ces pourcentages qui font la différence. Et puis les personnes qui disent que c'est fade sont les mêmes qui disent que les cyclistes sont tous dopés."
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