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L'Aigle les contemple

Ce Tour de France montagneux s'apprête à traverser le village de Vizille, dans l'Isère. Un nom qui a fait la réputation d'un grimpeur émérite des années 80-90, Thierry Claveyrolat.
Article rédigé par Xavier Richard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
 

Surnommé "l'Aigle de Vizille", le natif de La Tronche a marqué toute une génération de passionnés de la Petite Reine à la grande époque Fignon/LeMond avant de se donner brutalement la mort le 7 septembre 1999. Escaladeur hors pair, doté d'un démarrage foudroyant et d'un gabarit taillé pour gravir les cols, Thierry Claveyrolat a effectué une carrière professionnelle de plus de 10 ans au sein d'équipes françaises réputées (Système U, La Redoute, RMO, Z ou encore Gan). Brillant dès que la pente s'élevait, attaquant dans l'âme, "La Clavette" s'est souvent distingué en juin-juillet sur les pentes du Dauphiné libéré ou de la Grande Boucle. « Quand il avait la jambe et qu’il avait décidé de faire la course, c’était quelque chose, raconte son ancien équipier Pascal Lino. Il mettait 44 comme petit plateau toute l’année, aujourd’hui, les gars sont tous en 39. Thierry mettait du braquet. »

Sur son terrain de prédilection que constituaient les contreforts isérois, il réussit le tour de force d'enlever cinq étapes auxquelles il convient d'ajouter cinq classements de la montagne et trois classements par points. Il terminera même 2e du classement général en 1990, l'année où il flambera également sur le Tour en remportant le maillot à pois et l'étape entre Genève et Saint-Gervais-Mont-Blanc. « Thierry était très bon copain et un super grimpeur comme j’en ai jamais vu avec des braquets pas possibles, se souvient son ancien leader Charly Mottet. Très souvent, il était irrésistible dans des arrivées au sommet. Quand il annonçait la couleur, il avait cette force là. Il disait ‘’bon les gars, vous pouvez compter sur moi’’ et très généralement il allait au bout de ses ambitions. Il avait été impérial ce jour-là à St-Gervais. » Claveyrolat doublera la mise la saison suivante en s'adjugeant la 18e étape entre Le Bourg-d'Oisans et Morzine lors du premier Tour de France gagné par Miguel Indurain. Ce sont ses deux plus belles performances sur la plus grande épreuve du monde même s'il avait obtenu son meilleur classement final dans ses jeunes années (17e en 1986 à 27 ans). En 1993, il glanera encore le Trophée des Grimpeurs ou le Grand Prix de Plouay mais ce seront ses derniers coups d'éclat.

Dans toutes les équipes où il est passé, "La Clavette" était le bout en train. « Thierry, c’était la joie de vivre, confirme Pascal Lino. Toujours. Un mec qui aimait bien déconner et faire des farces aux copains. C’était aussi un gros chambreur. Il avait toujours un petit mot pour mettre de l’ambiance. Mais avant tout, c’était un gars très professionnel qui préparait ses courses de manière très pointue. Après une étape du Tour de France, quand il arrivait à l’hôtel, c’était une bonne bière, un sandwich et il était heureux. » Après avoir rangé le vélo fin 1994, Thierry Claveyrolat se suicide en 1999 à son domicile, affecté par un accident de la route dont il était responsable quelques semaines plus tôt et qui avait fait quatre blessés. Une bien triste fin pour ce coureur talentueux et généreux dans l'effort. Un pur grimpeur qui aurait pu devenir champion du monde sur route en 1989 à Chambéry avec un brin de réussite et une tactique plus aboutie de la part de l'équipe de France. Longuement échappé avec le Russe Dimitri Konyshev –moins bon que lui en montagne, il avait amèrement regretté que son compatriote Laurent Fignon eut participé à la poursuite menée à bien à un tour de l'arrivée. Repris à quelques kilomètres de la ligne, les deux fuyards avaient vu Greg LeMond s'imposer au sprint. Et si Konyshev avait pu sauver la médaille d'argent devant Sean Kelly, Claveyrolat termina 5e devant le leader blond des Bleus qui aura donc indirectement précipité sa perte. Deux ans après, "l'Aigle de Vizille" ratera le titre de champion de France sur route, prenant une place de dauphin au goût amer derrière Armand de Las Cuevas… Cruelles désillusions pour cet homme au destin décidément vertigineux.

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