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Dans la peau d’un caravanier

Avant le passage du peloton, la caravane du Tour est l’autre star de la Grande Boucle. Pour vérifier que l’engouement provoqué est bien à la hauteur de sa réputation, FranceTVSport.fr est allé se placer à l’avant de la 2CV limousine d'une célèbre marque de saucisson, sur l’une des étapes-reines du Tour, vendredi entre Saint-Etienne et Chamrousse. On n’a pas été déçu.
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié
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La caravane, institution du Tour de France depuis 1930

C’est sans conteste l’une des marques les plus attendues au bord des routes du Tour de France. Un peu trop, même. Le temps d'une étape d'un peu moins de six heures à 'deudeuche', on assiste à de sacrées foires d’empoignes, mines déconfites et autres regards assassins pour quelques morceaux de saucissons et autres chapeaux bariolés. 

"Une petite famille"

"C’est la caravane préférée des Français, assure Damien, 39 ans, chauffeur de la célèbre limousine Cochonou depuis neuf ans. Visuellement, la deuche, tout le monde la reconnaît. La musique est entrée dans le patrimoine des Français". Et dans nos têtes. Sur un Tour entier, on pourrait d’ailleurs supposer que le bruit assourdissant du public, mêlé à celui du jingle inlassablement diffusé par la 2CV pick-up en tête de cortège, épuise les nerfs des chauffeurs et de leurs hôtesses. Mais Elodie évoque "des conditions privilégiées". A 27 ans, elle entame déjà son huitième Tour de France et se plaît à revenir chaque année au sein de cette "petite famille", pour distribuer 430 000 sachets de mini-saucissons et 115 000 bobs le long des routes hexagonales. 

La limousine 2CV Cochonou

La caravane, qui s’est élancée de Saint-Etienne vers 10 heures vendredi, après un court briefing, roule à allure à peu près constante au milieu d’une foule déjà surexcitée. "C’est le seul sport au monde qui permet de voir les coureurs de près après avoir assisté à une heure de spectacle où l’on reçoit des cadeaux", s’enthousiasme Damien au volant de sa limousine, qui avale les deux cols du jour (Palaquit et Chamrousse) en première, en montée comme en descente. Employé au conseil général de la Dordogne, il prend tous les ans ses congés en juillet, pour le Tour. Et redoute déjà le jour où il va devoir arrêter : "Ça va être vraiment dur".

500 candidatures, 4 sélectionnés

Heureusement, les habitués de la caravane sont prioritaires pour revenir chaque année. Florent, 23 ans, est l’un des rares nouveaux de l’institution. Il fait partie des quatre heureux élus, retenus par l’agence Live Meetings au milieu de quelques 500 candidatures (!) pour rejoindre la porter les couleurs rouges et blanches cet été. "On sait que c’est un privilège et on nous le rappelle souvent, explique-t-il. On se doit de répondre présent, d’avoir la banane et d’être irréprochable". Au volant d’une des trois 2CV Berline, il passe "trois semaines de pure éclate" et se prend au jeu de la marque. "On la porte sur nous toute la journée. Pour les millions de gens qui nous voient, on est Cochonou. Cela devient un peu comme une double peau"

Facilement identifiable, la marque a aussi ses fidèles. Dans les magnifiques paysages de la vallée du Rhône, on croise des pancartes, des affiches, des déguisements aux couleurs de l'enseigne. Dans la descente du col de Palaquit, un groupe de Belges arrête les sept véhicules rouge et blanc pour un échange devenu quotidien : une pause fraîcheur contre quelques sachets de saucissons. "Ils sont là tous les jours, sourit Damien. On se donne rendez-vous à un kilométrage précis et ils sont là, avec les boissons. C’est ça, la caravane". 

C’est aussi ses anecdotes, comme la fois où une hôtesse, lancée dans sa distribution de saucissons, a machinalement envoyé son téléphone dans la foule. Ou encore : "Cet été, une marque de la caravane a oublié une hôtesse au bord de la route, après une pause technique, s’amuse Damien. Le chauffeur ne s’en est jamais rendu compte. Heureusement, un autre véhicule l’a repéré en fin de cortège pour l’emmener à l’arrivée".

La caravane à l'arrivée à Chamrousse

Être dans la caravane, c’est aussi rater la dimension sportive du Tour. "On a du mal à suivre la course, regrette Florent, féru de vélo. On passe la ligne 1h30 avant les coureurs, on fait le plein d’essence et on fait notre transfert. J’essaye de lire les nouvelles le matin mais je me contente souvent d’une alerte sur mon mobile ou d’une image à la télé". Heureusement, quand on voit l’hystérie qui s’empare du public dans la montée vers Chamrousse, on se dit que le sacrifice vaut largement le coup.

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