Marcel Cerdan ou Jean-Claude Bouttier sont passés par là avant Tony Yoka : Roland-Garros et la boxe, une vieille histoire
Près de 50 ans après, le "noble art" retrouve le court central de la porte d'Auteuil vendredi soir à l'occasion du onzième combat professionnel du boxeur français.
Comme Marcel Cerdan ou Jean-Claude Bouttier avant lui, Tony Yoka aura les honneurs du court central de Roland-Garros pour son onzième combat chez les professionnels, vendredi 10 septembre. L'enceinte, habituellement réservée au tennis, renoue avec l'accueil de combats de boxe, à trois ans des Jeux olympiques de Paris 2024, durant lesquels les boxeurs s'affronteront sur le court Suzanne-Lenglen.
Construit en 1928, Roland-Garros accueille des combats de boxe dès les années 1930 et des champions du monde comme Young Perez, Marcel Thil et Émile Pladner s'y succèdent. "À l'époque, l'un des plus grands promoteurs s'appelle Jeff Dickson. C'est un Américain qui vit en France et qui organise les combats les plus prestigieux. Il négocie avec le club du Stade français et la Fédération française de tennis pour pouvoir utiliser Roland-Garros", raconte Sylvain Ville, historien de la boxe et maître de conférences à l'université de Picardie Jules Verne.
"Les organisateurs cherchent des arènes larges, avec de la visibilité, où le ring peut être placé au centre du public", détaille-t-il. Depuis 1920, la boxe en plein air se développe en France lors de la saison d'été. "Normalement, les combats en plein air attirent un public un peu moins chic qu'en salle. Mais en organisant des galas à Roland-Garros, les promoteurs conservent un aspect mondain", explique l'historien.
Cerdan et Bouttier en têtes d'affiche
Parmi les combats qui se sont déroulés à Roland-Garros, celui entre Marcel Cerdan et Holman Williams le 7 juillet 1946 reste mythique. "Sur les gradins obscurs brillent les feux de milliers de cigarettes et luisent curieusement les binoculaires des jumelles qui reflètent les lumières du ring. Salués par des acclamations et des cris, Cerdan et Williams font leur apparition entre les tendeurs", raconte le journal Le Monde à l'époque [article payant].
Finalement, le "bombardier marocain" s'impose face à l'Américain en dix reprises, malgré une fracture de la main. C'est aussi là que Cerdan rencontre Edith Piaf.
Des années plus tard, le Français Jean-Claude Bouttier combat lui aussi dans l'enceinte de la porte d'Auteuil. Le 9 juin 1971, il devient champion d'Europe des poids moyens en s'imposant aux points, après 15 rounds, face à l'Italo-Argentin Carlo Duran. Ce soir-là, pas loin de 15 000 spectateurs assistent au combat "dans le vénérable stade Roland-Garros, qui était passé du silence recueilli des échanges de tennis aux vociférations pugilistiques", rapporte à nouveau le quotidien du soir [article payant].
Un avant-goût de Paris 2024
En 1973, Bouttier est de retour sur le court central, face cette fois-ci à Carlos Monzon. Le boxeur français s'incline aux points, dans un combat organisé par Alain Delon : "Au XXe siècle, beaucoup de promoteurs sont à mi-chemin entre le monde sportif et le monde du spectacle. Le directeur des Folies Bergères a par exemple organisé des combats. Il y en a aussi eu à l'Olympia et au Moulin Rouge", explique Sylvain Ville.
Vendredi soir, la boxe fait donc son retour à Roland-Garros, près de 50 ans après le dernier combat. Tony Yoka affrontera le Croate Petar Milas en dix rounds. Deux autres Français médaillés olympiques à Rio en 2016 seront également au programme : Mathieu Bauderlique sera opposé au Russe Igor Mikhalkin pour le titre européen des mi-lourds et Souleymane Cissokho défendra sa ceinture internationale (WBA-Intercontinental) des super-welters face au Russe Ismail Iliev.
Si le beau temps est de la partie, le toit du court Philippe-Chatrier pourrait être ouvert. Ce gala fera aussi office de répétition alors que les épreuves de boxe des JO de Paris se tiendront sur le court Suzanne-Lenglen, qui sera lui aussi doté d'un toit d'ici 2024.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.