Souleymane Cissokho : "Il faut créer un fonds de solidarité pour soutenir ces boxeurs qui galèrent"
Les sports de combat sont de nouveau autorisés, comment avez-vous accueilli cette reprise ?
Souleymane Cissokho : "J’ai été très content d’apprendre cette nouvelle. Nos collègues américains avaient déjà repris et j’avais peur que le fossé qui existe entre eux et nous ne creuse encore plus donc c’est vraiment une bonne chose. Ça m’a permis de continuer de bosser et de pouvoir être avec le coach, de suivre ses conseils… On a beau s’entraîner à la maison, on a toujours besoin de ce côté accompagnement qui nous procure les sensations que l’on retrouve sur le ring."
Le Monde d’après est-un gala organisé pour venir en aide aux boxeurs qui vivent souvent dans la précarité, que pensez-vous de cette initiative ?
S. C. : "C’est vraiment une très belle initiative ! Ces jeunes boxeurs sont très talentueux, ils sont le futur et même le présent de la boxe en France puisqu’ils sont parmi les meilleurs, et ont le niveau pour atteindre le top niveau européen voire mondial. En général, ce sont des boxeurs qui galèrent et qui n’ont pas forcément de revenus importants. C’est super de les voir reprendre en premiers."
"Il ne faut pas oublier de regarder derrière nous et d’aider les autres"
La FFB n’a jamais statué sur le sort des boxeurs pros qui ne gagnent de l’argent que lorsqu’ils font des combats… Que faut-il faire pour changer les choses ?
S. C. : "Il faut bosser sur le statut des boxeurs professionnels et ce, de façon générale… Aujourd’hui, un boxeur peut être champion du monde ou autre, mais n’est pas considéré comme un sportif de haut niveau ! C’est déjà un gros problème… Ensuite je pense qu’il faut aussi créer un fond de solidarité pour venir en aide à ces boxeurs qui, j’insiste dessus, galèrent énormément ! Ce ne sont pas que des mots, c’est une réalité : se dire professionnel en France est un bien grand mot parce que les boxeurs amateurs et olympiques, qui sont en équipe de France, sont mieux lotis que la plupart des professionnels. Cela fait longtemps qu’on parle de ce statut mais rien n’a été fait… Je sais que c’est compliqué à réaliser mais pourquoi ne pas monter un fond financé par tous, le privé, le public. Même les boxeurs français qui gagnent le plus pourraient donner un petite contribution. On pourrait également prendre 1€ ou 2€ sur chaque licence et reverser cet argent dans ce fond de solidarité ? Ça permettrait d’aider ceux qui sont tout en bas et d’atténuer leur détresse."
Vous sentez-vous concerné lorsqu’il s’agit de venir en aides à vos collègues boxeurs ?
S. C. : "Bien sûr que je me sens concerné, on se doit d’être solidaires. J’ai la chance d’avoir 'un certain statut' et parmi ceux qui s’en sortent le mieux, mais il ne faut pas oublier de regarder derrière nous et d’aider les autres. On est des ambassadeurs du sport et c’est un rôle qu’on doit avoir sur le ring et en dehors. On doit toujours être à 100% et quand certains collègues ont du mal, même si tu ne peux pas contribuer financièrement, il faut en parler ! Il y a des médias qui s’intéressent plus à certains boxeurs que d’autres donc je pense qu’en parler serait déjà une bonne chose pour faire prendre conscience de la situation."
Pensez-vous qu’il faille réitérer ce genre d’événement ?
S. C. : "Il faut absolument réitérer ce genre d’événement de façon beaucoup plus régulière pour créer une dynamique autour de ça. Je pense que ça aiderait à la relance de la boxe en France. Après les Jeux Olympiques de Rio, il y a eu un réel engouement autour de la boxe et avec ce genre de galas, les gens vont de plus en plus s’y intéresser. Il y a beaucoup d’idées reçues sur la boxe mais c’est un sport 'agréable', les mecs travaillent comme des malades et n’ont malheureusement pas ce qu’ils mériteraient…"
"Toutes ces mesures ont été décidées pour protéger tout le monde"
Un protocole sanitaire de grande ampleur a été mis en place pour permettre au gala d’avoir lieu, que pensez-vous de toutes ces mesures de sécurité ?
S. C. : "C’est une très bonne chose et c’est pour notre bien ! C’est primordial de ne pas l’oublier… Toutes ces mesures ont été décidées pour protéger tout le monde et à partir du moment où tous les protocoles sont respectés, ça permettra de montrer aux autorités que nous, la boxe, avons bien respecté les consignes. Montrer un bon visage permettra également de renouveler ce genre d’initiative."
Depuis quelques temps, on voit un désintérêt du grand public pour le noble art, sans doute lié à des combats dont on connait l’issue d’avance, que pensez-vous de cette situation ?
S. C. : "C’est une situation délicate… Je pense que c’était plus le cas avant mais aujourd’hui, les promoteurs essayent de proposer des combats qui sont assez équilibrés. On a souvent tendance à oublier la spécificité de la boxe professionnelle, qui fait qu’on ne peut pas brûler les étapes. Il faut y aller crescendo et c’est ce que le grand public a malheureusement du mal à comprendre. Une carrière ça se construit, il faut apprendre son métier… Dans le monde pro, ce n’est pas le même format, on est sur 12 fois 3 minutes contrairement à 3 fois 3 minutes aux JO et on ne peut pas comparer les performances dans les deux disciplines."
Que faut-il faire pour que les gens reviennent à la boxe ?
S. C. : "Il faut d’une part proposer des combats plus équilibrés pour que le public apprécie le spectacle. L’engouement est toujours là puisque le nombre de licence à explosé et je vois énormément de monde se mettre à la boxe. Je pense que c’est la répétition d’événement à l’image du 'Monde d’Après' qui va faire en sorte que le public s’intéresse de plus en plus à notre sport. Il faut aussi compter sur le soutien des médias pour espérer que la boxe se relance."
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