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Dakar 2017 : Philippe Croizon n'est "pas un super-héros, seulement quelqu'un qui travaille"

Amputé des quatre membres, Philippe Croizon fait partie des engagés sur le Dakar 2017. franceinfo a interrogé l'athlète avant le grand départ à Asunción (Paraguay) lundi.

Article rédigé par franceinfo - Bruno Blanzat
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Philippe Croizon, le 30 décembre 2016 au Paraguay, avant le départ du Dakar 2017. (FRANCK FIFE / AFP)

Il s'en est fallu de peu. Philippe Croizon, le célèbre nageur amputé des quatres membres après un accident, a dû attendre les dernières semaines de l'année 2016 pour pouvoir confirmer sa participation au Dakar 2017, dont le départ est donné au Paraguay lundi 2 janvier. L'athlète a réussi à boucler son budget pour l'épreuve reine du rallye-raid grâce à sa persévérance et à un brin de chance.

"Je suis là pour dire que tout est possible"

Déjà présent sur le rallye du Maroc en octobre, Philippe Croizon surprend en terminant la course avec le quinzième temps. Nasser Al-Attiyah, double vainqueur du Dakar dans la catégorie auto, est impressionné par la performance du nageur devenu pilote. Le champion du Qatar décide alors de donner 100 000 euros au Français, afin que celui-ci puisse se rendre au Paraguay. L'intéressé n'en revient toujours pas : "Ce qui s'est passé avec Nasser me fait croire encore aux contes de fées." 


Philippe Croizon, avant son départ pour le... par franceinfo

Après "cette galère sans nom" nécessaire pour financer son équipe, Philippe Croizon est désormais sur la ligne de départ à Asunción, prêt à franchir les 9 000 km que lui réserve la course en compagnie de Cédric Duplé, son co-pilote, également nouveau venu sur l'épreuve. Le nageur a pris le temps de raconter à franceinfo, partenaire de son aventure, les circonstances de cet éprouvant périple qui le mènera à travers l'Amérique Latine.

franceinfo : Cela ne vous fait pas peur de participer à une épreuve aussi difficile que le Dakar ?

Philippe Croizon : Je ne sais pas si je serai dans le même état après la fin du Dakar, mais j'aime bien me faire plaisir. Donc il n'y a pas de raison d'avoir peur. Je suis là pour dire que tout est possible.

C'est même votre slogan, vous l'avez écrit sur votre voiture à côté de votre nom...

Parce que c'est le message que j'ai toujours en tête. L'impossible c'est juste une seule personne, nous-mêmes. Dans ma vie, je ne pense pas avoir de limite. J'ai un rêve, c'était de traverser la Manche. Je l'ai fait. J'ai aussi des envies, comme faire le Dakar. Alors j'ai décidé de me lancer.

Quelques jours avant le départ du Dakar 2017, Philippe Croizon vérifie les derniers détails sur son véhicule. (FRANCK FIFE / AFP)

Comment cette décision est-elle devenue une réalité ?

J'ai appelé Anne Bayard, mon agent, pour lui dire que je voulais faire le Dakar, elle m'a répondu : "Fais autre chose, c'est trop compliqué." C'était il y a dix-sept mois... Et aujourd'hui j'y suis. Il fallait aussi l'accord d'Étienne Lavigne, le directeur de la course. Nous l'avons appelé, mais il m'a dit non. C'est un réflexe humain de dire non. Je ne suis pas pilote. Il sait que je peux me dépasser pour nager, mais il ne me connaît pas. 

J'ai souhaité que l'on se rencontre. J'ai préparé un dossier avec Yves Tartarin, mon team manager, en détaillant toutes les mesures de sécurité que nous allons mettre en place. Après une demi-heure de discussion, il a voulu savoir de quoi j'avais besoin. Je lui ai notamment demandé une lettre de soutien pour convaincre les sponsors, ce qu'il a accepté de faire. Il m'a cependant dit que pour le reste, j'étais un pilote comme un autre et que je devrais me débrouiller.

Être traité comme les autres, c'est aussi ce que vous vouliez ?

Complètement. Il n'y pas de différence à part celle que l'on veut voir. On est là, tout le monde travaille et on est contents. Les mécanos bossent d'arrache-pied.

Philippe Croizon lors des préparatifs précédant le Dakar 2017. (FRANCK FIFE / AFP)

Quel est votre objectif sur la course ?

C'est voir Buenos Aires, où se trouve l'arrivée de la dernière étape. Lorsque j'étais sur le rallye du Maroc, j'ai essayé de voir mes limites et celles de la voiture. On a réussi à faire un temps extraordinaire, malgré les pénalités, et on termine. Sauf qu'au Dakar, il va falloir que j'aille moins vite car ça va être plus difficile. Les passages en altitude sont une grosse inconnue pour moi. Donc, on verra au jour le jour.

À force de relever des défis les plus fous, est-ce qu'il n'y a pas un peu de pression en s'imaginant être attendu au tournant ?

La pression est là, mais il n'y a pas de super-héros. Il y a juste quelqu'un qui travaille. C'est comme les autres pilotes. Il y a un boulot monstrueux avant. Je me prépare mentalement et physiquement depuis huit mois. C'est comme le coureur du 100 m ; il travaille quatre ans pour une course de quelques secondes.

Conduire cette voiture, "c'est comme un jeu vidéo" : Philippe Croizon participe au Dakar 2017

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