MotoGP : un Grand Prix de France devenu une manche historique du calendrier, contrairement à son équivalent en Formule 1
Si le Mans s’est fait connaître des fans de sports mécaniques pour les 24 Heures auto, ce sont bien les motos qui vont faire vrombir leurs moteurs sur le circuit Bugatti, dimanche 14 mai, pour le 1 000e Grand Prix de l’histoire de la MotoGP. Et le fait que cette manche historique coïncide avec le week-end du Grand Prix de France n’est peut-être pas un hasard. Contrairement à son équivalent en Formule 1 qui a disparu du calendrier cette année, l’étape française du championnat de MotoGP est devenue un rendez-vous incontournable du calendrier. Elle a même été élue "meilleur Grand Prix de la saison" en 2022 par l’IRTA, l’association des équipes présentes en MotoGP, Moto2 et Moto3.
"On fait en sorte que les spectateurs passent un excellent week-end, car le public est le meilleur décor du sport". C’est ainsi que Claude Michy, promoteur du Grand Prix de France de moto, résume ce qui fait le succès de l’événement. Organisateur de la manche française du championnat du monde de MotoGP depuis 1994, il a observé le gain de popularité de la discipline, passée de 25 000 spectateurs accueillis il y a trente ans à 110 000 en 2022, pour un record d’affluence sur la saison du championnat du monde. "On organise beaucoup d’animations en dehors de la course, avec des concerts et des shows mécaniques par exemple, et les billets donnent accès à tout, y compris les parkings, et sont gratuits pour les moins de seize ans accompagnés. Humblement, on est devenu un modèle pour les autres Grands Prix", se réjouit Claude Michy.
Le promoteur a également profité, ces dernières années, des performances des pilotes français, Fabio Quartararo et Johann Zarco. "Fabio est champion du monde, il est jeune, il a tous les codes de communication de son époque, et Johann est un grand pilote également, note-t-il. Avec la très bonne réalisation télévisuelle, les caméras incrustées et la médiatisation, cela développe la popularité de la moto, d’autant que l’intérêt sportif est plus prononcé qu’en Formule 1, avec très peu d’écart de performances entre les motos". Et si quelques manches ont été courues au circuit Paul Ricard dans les années 90, le Grand Prix de France est désormais installé depuis 2000 au Mans, site mythique du sport mécanique. "Beaucoup de travaux y ont été effectués pour la sécurité et les infrastructures d’accueil par les collectivités publiques locales. Et au niveau sportif, on travaille avec l’Automobile Club de l’Ouest, qui a des commissaires fantastiques et une direction de course qui est peut-être la meilleure du monde", vante Claude Michy.
La valorisation de l'histoire en MotoGP, la "machine à cash" en F1
Ce solide ancrage du Grand Prix de France au calendrier est aussi le fait de la Dorna, le promoteur du championnat du monde de MotoGP, qui valorise l’aspect historique. "On a un promoteur international qui a pour objectif de faire du business, mais qui tient compte du patrimoine de la moto, explique Sébastien Poirier, président de la Fédération française de moto (FMM). Et dans ce patrimoine, il y a des nations phares qui doivent faire partie du calendrier, parce que c’est l’assurance d’un succès populaire, qui va offrir de belles images, même si la Dorna aurait plus d’intérêt financier à aller en Arabie saoudite qu’en France ou en Italie". Ainsi, sur les 20 manches de la saison, onze sont disputées en Europe, dont trois en Espagne. Un nouveau Grand Prix sera disputé en Inde (il devait y avoir une nouvelle date au Kazakhstan également, mais l'épreuve a été annulée en raison de travaux en cours d’homologation sur le circuit). Dans les pays du Golfe, la MotoGP ne fait étape qu’au Qatar (depuis 2004), avec seulement 6 600 spectateurs accueillis lors de la course en 2022. Un accord a également été trouvé avec l’Arabie saoudite pour un futur Grand Prix, pas avant 2027.
Tout l'opposé de la Formule 1, qui a développé, ces dernières années, plusieurs courses dans les pays du Golfe : Bahreïn, Arabie saoudite, Qatar et Abou Dhabi, en plus des trois Grands Prix aux Etats-Unis en 2023, à Miami (disputé le 7 mai), Austin et Las Vegas. Réintroduit en 2018, le Grand Prix de France, qui avait réuni 200 000 spectateurs en 2022, en a fait les frais en disparaissant du calendrier cette saison. Le Grand Prix de Spa-Francorchamps (Belgique) est également menacé pour les saisons à venir. "La vision est très différente entre la Dorna et les promoteurs de la Formule 1, juge Claude Michy. La F1, c’est une machine à cash. Ils ne sont pas dans le même monde et ne tiennent pas compte du cadre historique".
Un soutien politique indispensable en F1
Si le Grand Prix de France de MotoGP n’a pas besoin d’un appui politique pour exister, et "ne reçoit que 50 000 euros d’aides publiques sur un budget de 13 millions d’euros" selon Claude Michy, la donne n’est pas la même en Formule 1. "La F1, aujourd’hui, ce sont 32 pays qui demandent à avoir un Grand Prix sur leur territoire. Comme il n’y a que 23 courses, ils sont obligés de dire non à des gens qui sont presque à genoux devant la F1 en disant : ‘S’il vous plaît, venez, venez ! On vous accueille à bras ouverts !’. Cela n’a jamais été le cas en France", regrettait récemment Jean Alesi, président du circuit Paul Ricard, invité de l'émission "Les Fous Du Volant" sur Europsort. "Nous avons eu les cinq dernières années le Grand Prix de France, à part durant l’année marquée par la pandémie de coronavirus bien sûr, mais il a toujours été boudé par nos politiciens. Je ne parle pas de ceux de la région, parce que c’est grâce à eux que la F1 a pu revenir, mais de ne pas avoir un président aujourd’hui sur une grille de Formule 1, c’est mal vu".
Interrogé par le journal L’Equipe le 6 mai dernier, Stefano Domenicali, le patron de la Formule 1, attend un geste de la part du sommet de l’Etat. "Plus que personne, je veux que votre pays revienne au calendrier, mais il faut faire les efforts que les autres font. Le jour où le président Macron me dit qu'il veut discuter pour parler du retour de la France, je viens. S'il veut discuter, je serai là dès qu'il le souhaite pour en parler", a-t-il affirmé, sans toutefois donner un éventuel délai pour le retour de la F1 dans l’Hexagone. Le contrat d’organisation du Grand Prix de France de MotoGP court, lui, jusqu’en 2026.
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