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Jisbar et Ducati, ou quand une Mona Lisa à la sauce MotoGP soutient la lutte contre le Covid-19

L'artiste français Jisbar a collaboré avec la firme italienne Ducati, participant du championnat du monde de Moto GP, pour créer une oeuvre unique mise aux enchères ce jeudi afin d'aider la lutte contre le Covid. Les fonds récoltés pour cette "Ducati Mona Lisa" seront reversés intégralement à l'organisation #RaceAgainstCovid. Cela permettra notamment de financer les travaux de l'hôpital Sant Orsola de Bologne. Pour Jisbar, l'occasion était trop belle de faire se mêler l'univers du pop art avec celui des sports mécaniques. Entretien.
Article rédigé par Loris Belin
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
 

Il est exposé partout dans le monde. Ses créations sont portées par les artistes DJ Snake ou Cardi B et font de lui un des artistes en pleine explosion dans le monde du pop art et du street art. Il a même été le premier à avoir envoyé une de ses peintures dans l'espace, à plus de 30 kilomètres au-dessus de la Terre. Le Français Jisbar est un artiste très sollicité. En pleine crise du coronavirus, un projet mené avec Ducati et son département course a donné lieu à une revisite de la culte Joconde de Léonard de Vinci, mise aux couleurs du constructeur italien, ses "valeurs" et ses "mots-clés" comme l'explique Paolo Ciabatti, le directeur du département sport de la firme. Le tout pour le mouvement #RacingAgainstCovid et venir en aide à l'hôpital de Bologne, avec une mise en vente prévue ce jeudi par la maison d'enchères Cambi. L'occasion de revenir sur cette collaboration étonnante entre la gouache et le cambouis.

Jisbar, vous avez dit dans une interview être incapable de vous définir. Si une personne ignore tout de vous, qu'est-ce qu'elle doit savoir ?
Jisbar : "(sourire) Je m'appelle Jean-Baptiste Launay, j'ai 31 ans et je vis entre Paris et Amsterdam. J'ai grandi en Savoie, avant de bouger vers 18 ans sur Paris, où j'ai commencé ma carrière en tant qu'artiste. Cela fait dix ans que je suis dans le circuit professionnel. J'ai exposé des toiles sur tous les continents du monde : en Australie, en Suisse, en France, aux Etats-Unis, à Abou Dabi, Mon art, c'est un mix de tous les maîtres de la peinture qui m'ont inspiré en les revisitant entre le pop-art et le street-art. Pour récréer un message, voir des choses jamais vues avant, et faire se rencontrer deux univers qui ne s'étaient encore jamais croisés."

Vous avez réalisé une toile de Mona Lisa avec le casque Ducati, ce n'est pas vraiment l'image de la Joconde qu'on imaginerait au Louvre, qu'est-ce que représente votre tableau ?
J. : "Mona Lisa, c'est une œuvre à laquelle tout le monde peut s'identifier, homme, femme, blanc, noir, vieux, jeune… Elle est mystique. Cette icone était particulièrement intéressante, Ducati et l'Italie, Jisbar et la France, la connexion était naturelle avec la Mona Lisa. Sur la toile, j'ai voulu inclure plein d'éléments, mettre la Joconde en blanc et rouge, les couleurs de Ducati, le mouvement #RaceAgainstCovid comme porte-étendard, le casque à la main mais aussi les références artistiques en fond à Matisse, à Basquiat, à Picasso et des mots en lien avec l'univers Ducati, ses pilotes, ses fondateurs le nom de certaines motos… Tout est lié et en rapport à l'univers de la moto et de Ducati. Je ne voulais pas prendre quelque chose que j'avais déjà en stock, je voulais qu'il y ait un lien fort entre Ducati et Jisbar. Quand je fais une œuvre, je donne une part de moi, il faut que je la travaille pour la donner."

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Une MotoGP, c'est une œuvre d'art

Le sport, en particulier le sport mécanique, c'est quelque chose qui vous parlait avant même de faire cette toile ? 
J. : "Je n'ai pas une culture sport méca, je ne suis pas un féru de MotoGP. Mais je sais apprécier la beauté esthétique d'une moto, les efforts des pilotes sur les circuits… J'en suis conscient et je l'admire. Il y a 2-3 ans, Valentino Rossi avait acquis une toile pour sa collection. Cela m'a encore plus poussé vers ce monde-là. Ce sport-là se rapporte à une pièce d'œuvre d'art, une MotoGP, c'est plus qu'une raquette de tennis, ou qu'un club de golf."

Ce pont entre le monde du sport et celui de l'art, il était évident pour vous ?
J. : "J'ai l'œil d'un artiste, tous les détails je les repère, sur quoi que ce soit. J'arrive à reconnaître une moto bien finie d'une mal finie, reconnaître la beauté de la sellerie, d'écrous…"

Qu'est-ce qui a mené à cette rencontre avec Ducati ?
J. : "Paolo Ciabatti, le directeur sportif de la marque, aimait bien mon travail. Ducati avait planifié quelque chose pour le Covid, et ils m'ont appelé. C'est une cause, peu importe où, ça touche à l'être humain. Elle est intéressante, et surtout nécessaire d'être travaillée. Pendant le Covid, j'avais toutes les clés, le temps pour aider les gens. Pablo m'a appelé comme une bonne étoile. C'est une aventure humaine, donc si l'humain ne passe pas, ça ne fonctionne pas. Et cela s'est super bien passé. L'équipe Ducati est extraordinaire, c'était hyper agréable de bosser avec eux. La vision du projet était similaire. Tout s'est passé comme sur des roulettes !"

C'est facile de réussir à créer une œuvre en mêlant votre liberté artistique avec la nécessité de retrouver l'imaginaire Ducati ?
J. : "La liberté est là où on veut bien la voir. En tant qu'artiste, je me sens libre de faire ce que je veux, même avec un cahier des charges. C'est toi qui est capable de te l'accepter ou de la refuser. Travailler ainsi est synonyme de plus de libertés car je vais apprendre, je vais me renseigner sur un sujet. Si un frein arrive, j'en fais une force, un outil artistique. Et après, je suis libre de choisir tel ou tel élément. On a réfléchi entre équipes et après j'ai fait notre œuvre, je n'ai pas subi de contraintes. J'aime aller au bout des choses et terminer une toile jusqu'à ce que j'en soit pleinement satisfait. Il faut que j'en sois fier. Un artiste, il est presque esclave de sa passion. J'ai besoin de me mettre 100% de moi-même dans l'état d'esprit de la toile, sinon je ne peux pas la retranscrire."

Ce tableau va être mis aux enchères ce jeudi en faveur de l'hôpital Sant Orsola de Bologne en Italie, vous pouvez nous expliquer le but de cette mise aux enchères ?
J. : "Je ne sais rien faire d'autre que de l'art. Même prendre un avion seul, c'est chaud. (rires) Je ne peux donner que ça. Donc pour aider les gens, je ne peux le faire et je ne veux le faire que par l'art. Oui tu vas vendre une œuvre, oui, tu seras dans une collection mais tu vas surtout aider quelqu'un d'autre. Ca rajoute une dimension supplémentaire. Ce projet m'a excité car je voulais faire du mieux possible pour aider les autres. J'ai déjà participé à des ventes à but caritatif en France, et j'ai l'occasion de le faire en Italie. Ce qui me touche particulièrement car la moitié de ma famille vient de Venise. Ma carrière a explosé là-bas. Il y a un lien depuis toujours entre Jisbar et l'Italie. Ducati nous a demandé combien on voulait donner pour cette action, on a dit 100% ! Je m'en fous, je n'ai pas besoin d'argent. C'est de l'entraide, ça aurait été un autre pays, c'était pareil. L'hôpital Sant Orsola est 100% dédié au Covid, à traiter les patients, à les accompagner dans leur rémission et à travailler dans la recherche contre le virus. J'espère que la "Ducati Mona Lisa" partira pour un prix fou pour aider l'organisation #RaceAgainstCovid, ou que ça va inspirer des gens à faire la même démarche. Sant Orsola va pouvoir acheter du matériel, agrandir son budget recherche et débloquer des budgets pour avoir un personnel mieux payé et plus important."

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