Monza, une histoire à toute vitesse
Tout pour la vitesse
C'est un parc luxuriant à de vingt kilomètres de Milan. Les arbres sont rois mais ils ne sont que l'écorce d'un géant de bitume vibrant tous les mois de septembre dans une orgie de cylindres. La F1 s'y sent comme chez elle. Depuis la création du championnat du monde en 1950, Monza n'a manqué d'un rendez-vous. Une infidélité du GP d'Italie, célébré à Imola en 1980, mais le circuit lombard reste de très loin le plus utilisé du championnat (61e course dimanche, loin devant Silverstone, 45 éditions, et Spa, 44). Plus qu'ailleurs, il est question de vitesse et de records. A Monza, les moteurs de respirent pas beaucoup. On y roule accélérateur à fond sur 75-80% du parcours. Considéré à juste titre comme le temple de la vitesse, le GP d'Italie en Lombardie détient le record des six courses les plus rapides de l'histoire. Du temps de sa splendeur chez Ferrari, Michael Schumacher a ainsi établi la plus grosse moyenne d'un Grand Prix. L'Allemand a roulé à 247,586 km/h de moyenne sur 53 tours en 2003. Sur un tour, c'est encore plus impressionnant. Lors d'une séance de pré-qualification, Juan-Pablo Montoya (Williams-BMW) a roulé à 262,242 km/h de moyenne sur un tour Montoya (2004). Le Colombien a d'ailleurs atteint la plus haute vitesse enregistrée par une F1 à Monza lors d'essais privés (372,6 km/h).
"Monzanapolis"
La vitesse est dans les gènes de Monza. Dès sa construction en 1922, l'autodrome avait pour seul but de favoriser les véhicules les plus rapides. Le tracé initial combinait circuit routier (5,5 km) et anneau de vitesse (4,5 km). Devant l'augmentation des accidents mortels, le tracé sera entrecoupé de chicanes et le banking progressivement abandonné. Pourtant, la comparaison avec Indianapolis et les courses d'Indycar ne cesseront jamais. Et pas seulement parce que les virages en béton sont encore visibles dans le parc. "Monza est comparable à ce quil se fait sur les ovales aux États-Unis, avec une vitesse moyenne qui dépasse les 250 km/h, explique Rémi Taffin, le directeur des opérations piste de Renault F1. Le RS27 (moteur actuel des Red Bull et Lotus, NDLR) sera utilisé pied au plancher pendant pratiquement 20 secondes dans deux portions du circuit. Pour mettre cela en perspective, un avion léger peut décoller dans cet intervalle... Seul lappui obtenu grâce aux ailerons empêche les F1 de décoller, générant une forte contrainte sur les voitures et les pilotes." Pendant deux ans (1957-1958), le banking de Monza fût le cadre d'une course entre F1 et Indycar. Une initiative intéressante mais la plupart des Européens reculeront devant l'obstacle. Aujourd'hui, le circuit fait 5,793 km pour dix virages dont la Variante Ascari (en hommage au pilote italien décédé à Monza) et la fameuse Curva Parabolica qui précède la ligne droite.
Temple pour certains, tombeau pour d'autres
Comme le circuit du Mans, celui de Monza a payé un lourd tribut à ses hautes vitesses et ses longues lignes droites. 52 pilotes et 35 spectateurs ont perdu la vie sur ce tracé. Les premières années furent les plus mortelles. En 1928 eut lieu le plus grave accident de l'histoire des courses automobiles en Italie. Emilio Materassi et 23 spectateurs ont péri après un accrochage du pilote italien dans la ligne droite des stands. Laissé au repos après avoir plongé dans les eaux monégasques avec sa Lancia, Alberto Ascari remontera dans une Ferrari Sport en porélude aux 1000 km de Monza. Au 2e tour, il perd le contrôle de sa voiture dans la courbe Vialone et se tue. Ce virage sera rebaptisé quelques années plus tard "Variate Ascari". En 1961, Wolfgang von Trips perdra lui le titre mondial et la vie dans un carambolage qui fera 15 victimes. Dans ce funèbre palmarès, on souvient également des décès de Jochen Rindt (1970) et de Ronnie Peterson (1978) en essais et en qualification. Endeuillé à maintes reprises, Monza sera aussi le théâtre de nombreux exploit. De la première victoire de Jackie Stewart face à Graham Hill (1965) à retour de Nicky Lauda moins de six semaines après son accident au Nürburgring (1976). A noter en 1971 cette arrivée incroyable en peloton. Gethin s'était imposé pour un centième devant Peterson et neuf centième devant Cevert. Hailwood et Ganley étaient eux au pied du podium à 18 et 61 centièmes du vainqueur. Historique ! Le dernier fait d'arme important, c'est le succès d'un jeune espoir allemand, Sebastian Vettel, sur une modeste Toro Rosso-Ferrari.
Aucun italien depuis 1966
Présents en masse autour de la "piste magique" de Monza, les tifosi n'ont d'yeux que pour les bolides rouges d'Enzo Ferrari. Leur passion et leurs encouragements seront récompensés par des victoires à la pelle (31 victoires italiennes depuis 1921 dont 19 rien que pour Ferrari). En revanche, les pilotes italiens n'y brillent plus depuis très longtemps. Le dernier vainqueur transalpin à Monza reste donc Ludovico Scarfiotti en 1966. Quarante-six ans de disette ! Mais qu'importe au fond pour les fans italiens tant qu'une Ferrari triomphe. Dimanche prochain, il n'y aura aucun doute possible. Sans compatriote au départ, les tifosi seront à fond derrière Fernando Alonso, leader du championnat du monde dans une monoplace du Cavallino, et vainqueur à Monza en 2010.
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