Formule 1 : champion du monde des pilotes 2020, Lewis Hamilton a également été en tête de la lutte contre les inégalités
Une fois de plus, Lewis Hamilton n’aura pas chômé. Pourtant, l’année 2020 avait de quoi déstabiliser le pilote britannique de l’écurie Mercedes, après un début de saison repoussé de plusieurs semaines en raison de l’épidémie de Covid-19. Personne n’en aurait voulu à Hamilton de s’enfermer dans une bulle le temps du championnat du monde pour se concentrer sur ce qu’il pouvait faire de mieux cette année : battre le record de victoires en Formule 1 de Michael Schumacher et rattraper l’Allemand avec sept titres de champion du monde des pilotes.
Un acteur du changement
À l’issue du Grand Prix de Turquie ce dimanche, ces deux objectifs sont atteints. Mais Hamilton ne s’est pas simplement isolé dans son motorhome ces derniers mois. De par son influence et ce qu’il représente dans le monde de la F1, il a réussi à opérer d’importants changements dans ce sport en 2020. Fin mai, alors que la mort de George Floyd embrase les États-Unis et que des manifestations ont lieu à travers le pays et le monde, Hamilton publie un message sur son compte Instagram : "Je vois ceux d’entre vous qui restent silencieux. Vous êtes les plus grandes stars et pourtant, vous restez silencieux au milieu de cette injustice. (…) Aucun signe de quiconque dans mon industrie, qui est évidemment un sport dominé par les blancs."
Ce cri du cœur à l’attention de la Formule 1 a le mérite de faire réagir. Après avoir sensibilisé le paddock aux questions environnementales ces dernières saisons, le seul pilote noir de l'histoire de la F1 a une nouvelle fois de plus joué le rôle de leader en 2020 en insistant sur la lutte contre les inégalités raciales et en promouvant la diversité. Et le message est passé : lors du premier Grand Prix de la saison, en Autriche le 6 juillet dernier, 13 des 19 pilotes présents sur la grille de départ ont accompagné Hamilton en s’agenouillant avant le départ de la course. "Je suis vraiment, vraiment reconnaissant envers les pilotes qui se sont agenouillés à mes côtés. (…) Personne ne devrait être forcé à le faire. Tout le monde a le choix et fait ce qu’il veut", avait déclaré Hamilton à l’issue de la course.
Mercedes suit son pilote et change de couleur
Si le Britannique termine ce jour-là à une décevante quatrième place pour un sextuple champion du monde, il peut cependant se satisfaire de constater les initiatives prises sur le paddock, notamment par son écurie. Dans un sport où la couleur des voitures a son importance, où les Ferrari ont par exemple toujours été rouges, Mercedes n’a pas hésité cette saison à soutenir son pilote en transformant ses "Silver Arrows" ("Flèches d’argent") en monoplaces noires en référence au mouvement Black Lives Matter. "Le team se bat contre toute forme de racisme et de discrimination et c’est un combat personnel de Lewis pour le mouvement BLM. Nous le soutenons entièrement", déclarait Toto Wolff, patron de Mercedes, en début de saison.
Outre son écurie, la F1 a également suivi la voie tracée par le pilote le plus populaire du paddock et qui rameute sans contestation possible de nombreux téléspectateurs à ce sport. Elle s’est donc engagée à travers son initiative #WeRaceAsOne, à initier des programmes pour davantage de diversité raciale et sexuelle dans le sport automobile. Un problème déjà souligné par Hamilton en 2018 : "Il n’y a presque aucune diversité en F1. Rien n’a changé en onze ans, depuis que je suis arrivé en 2007." Bien que de nombreuses voix s’élèvent très régulièrement pour rappeler que sport et politique ne font jamais bon ménage, Hamilton n'a pas hésité à le faire à plusieurs reprises.
Le t-shirt de la discorde
Pour son premier podium et sa première victoire de la saison, à l’occasion du Grand Prix de Styrie le 12 juillet dernier, Hamilton a brandi son poing en l’air, toujours en soutien à BLM. Épanoui grâce aux évolutions positives constatées dans le monde de la F1, le pilote Mercedes n’en a pas oublié le championnat du monde en enchaînant les victoires lors de quatre des cinq Grands Prix qui suivent celui de Styrie. Le 13 septembre, en Toscane pour la deuxième course de la saison en Italie, une autre manifestation du Britannique déclenche cette fois la polémique.
Avant le départ de la course - qu’il remportera sans problème -, et sur le podium à l’issue du Grand Prix, Hamilton portait ainsi un t-shirt faisant référence à Breonna Taylor, une Américaine de 26 ans tuée par la police à son domicile en mars dernier : "Arrêtez les policiers qui ont assassiné Breonna Taylor". Vitaly Petrov, ancien pilote de F1 entre 2010 et 2012, critique ouvertement cette prise de position. La Fédération internationale de l’automobile (FIA), signataire de la charte olympique qui interdit toute forme de démonstration politique, religieuse ou raciale, hésite alors à sanctionner Hamilton.
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King Lewis en chef de meute
"Je ne regrette pas un instant ce que j’ai fait. Les gens parlent du fait que le sport n’est pas un endroit où faire de la politique, mais ce sont des problèmes de droits de l’homme que nous essayons de mettre en lumière et pour lesquels nous tentons de sensibiliser le public", se défend alors le pilote de Mercedes, qui échappe à une sanction de la FIA et jubile : "De nombreuses règles ont été édictées pour moi ces dernières années mais elles ne m’ont jamais stoppé."
En plus de faire flancher les commissaires, King Lewis écrase en même temps la concurrence sur les circuits, jamais inquiété tout au long de la saison. Jeudi, trois jours avant le début du Grand Prix qui l’a une nouvelle fois sacré, Hamilton se montrait plus disert concernant les initiatives de cette saison 2020 que sur la possibilité de remporter un septième titre de champion du monde : "Je pense que ce qui est important, c’est que le voyage de cette année a été combiné avec la lutte pour l’égalité et qu’il y a eu un réel processus croissant pour apprendre ce qui se passe dans le monde."
Alors qu’il n’a pas encore prolongé son contrat avec Mercedes pour 2021, la question se pose de savoir quel sera le prochain engagement de Lewis Hamilton. Ce dernier a également été à l’initiative cette année d’une commission au Royaume-Uni, en liaison avec l’Académie royale britannique d’ingénierie. L’objectif est que le sport automobile "soit aussi divers que le monde complexe et multiculturel dans lequel nous vivons", expliquait Hamilton il y a quelques mois au Sunday Times. Malgré ses différents engagements, qui continueront d’impacter et d’influencer le paddock, Lewis Hamilton est un grand champion en ce qu’il est capable de se concentrer également sur ses objectifs sportifs : devenir le seul pilote à huit titres de champion du monde pourrait l’inciter à rapidement prolonger au volant d’une désormais "Black Arrow".
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