F1 : "Les autres pilotes savent qu'ils ne peuvent pas faire la course avec lui"... Une saison d'ultra-domination pour Max Verstappen
A Abu Dhabi, sur la terre de son premier sacre, décroché dans le tout dernier tour de l'année en 2021, Max Verstappen a fêté son troisième titre de champion du monde consécutif, acquis avec beaucoup moins de suspense. Le pilote néerlandais, une nouvelle fois victorieux dimanche 26 novembre, était assuré de remporter un troisième championnat du monde depuis cinq courses déjà. Au volant de sa monoplace Red Bull, il a assommé la concurrence en 2023, jusqu'à écraser son propre coéquipier Sergio Perez, avec 19 victoires en 22 Grands Prix. Il est "le meilleur pilote, dans la meilleure voiture", résume Jean Alesi, l'ancien pilote français.
Des périodes de domination presque sans partage, la Formule 1 moderne en a connu quelques-unes, comme celle de Michael Schumacher, titré de 2000 à 2004. Mais celle de Max Verstappen, qui a conquis cette année son troisième titre en autant de saisons, est "inédite" pour Cyril Abiteboul, consultant franceinfo: sport. "La domination de Ferrari, c’était à un moment où la F1 était beaucoup moins compétitive que maintenant. Ferrari dominait avec des budgets et une structure qui n’avaient rien à voir avec les autres équipes. De son côté, Red Bull est une écurie prestigieuse, très bien organisée et financée, mais ce n’est pas la seule. Ils dominent dans un environnement où les autres ne sont pas faibles", analyse l’ancien directeur général de Renault F1.
Des innovations aérodynamiques en quantité et en qualité
Depuis l’introduction du nouveau règlement en 2022, avec notamment des monoplaces redessinées et plus lourdes, l’écurie autrichienne est celle qui a le mieux tiré son épingle du jeu. "Quand il y a un changement de règlement, on peut avoir une équipe qui a particulièrement bien travaillé, et qui trouve une astuce, mais là en 2023, le règlement était déjà connu. Les autres équipes auraient dû devenir plus compétitives", poursuit Cyril Abiteboul. Avec des moteurs assez proches, l’écurie autrichienne fait la différence sur l’aérodynamisme de sa voiture selon le consultant : "Red Bull s’est construite en tant qu’équipe grâce à sa capacité à générer de l’appui aérodynamique, avec de très bons outils de modélisation et une très bonne soufflerie, très précise. Ils ont aussi pu investir et se concentrer sur ces points précis parce qu’ils n’avaient pas à se soucier du moteur, fourni un temps par Renault puis par Honda".
L’écurie championne du monde des constructeurs peut également s’appuyer sur une équipe très stable à sa tête. Son directeur, Christian Horner, est le même depuis la fondation de l’équipe. Il compte à ses côtés Adrian Newey, directeur technique qui a conçu les meilleures monoplaces de l’histoire de la F1, ainsi que Jonathan Wheatley, directeur sportif présent depuis les premières années de l’écurie. "Ils se connaissent par cœur. Ils sont redoutables. En plus de cela, ils ont une équipe qui a une force de frappe colossale sur la production, ajoute Cyril Abiteboul. C’est quelque chose dont on parle peu, mais leurs équipes sont très réactives tout au long de la chaîne, et ils ont une agilité de production qui leur permet d’avoir des pièces et des innovations très régulières en quantité et en qualité".
Le double de points de Sergio Perez
Mais si Max Verstappen et Sergio Perez disposent de la même monoplace, cela n’a pas empêché le Néerlandais de surclasser son coéquipier cette saison, avec plus du double de points marqués avant le dernier Grand Prix de la saison (575 contre 285). "Max est exceptionnel, mais Perez est loin d’être un manche ou un junior", tempère l’ancien directeur de Renault F1. Le Mexicain n’a tout de même pas réussi une grande saison, avec deux victoires, mais surtout trois Grands Prix sans marquer de point. "Il a fait de son mieux, mais il subit le fait que Max a une façon très spéciale de piloter, avec une voiture au train arrière très léger. C’est sûr que c’est la voiture de Max Verstappen, qui est conçue pour lui. Il est chouchouté dans cette équipe. De très bons pilotes comme Pierre Gasly et Alexander Albon ont aussi été ses coéquipiers et n’ont pas réussi à piloter la monoplace", ajoute Jean Alesi.
Avec une telle voiture, Max Verstappen n’a jamais eu de mal à se hisser aux avant-postes, même quand il partait avec quelques positions de retard sur ses concurrents sur la grille de départ. En Arabie saoudite, où il était parti 15e, le Néerlandais a terminé deuxième, puis il s’est imposé à Miami après avoir débuté la course en neuvième position. "Il a un ascendant psychologique et une telle monoplace. L’apparente facilité qu’il peut avoir à dépasser est aussi liée au fait que les pilotes ne se battent pas contre lui. Ils savent qu’ils ne peuvent pas faire la course avec lui. Plutôt que d’user leurs gommes à le retenir, ils le laissent passer", analyse Cyril Abiteboul.
Le pilote Red Bull n’a ainsi terminé au-delà de la deuxième place qu’à une seule reprise cette saison, à Singapour, laissant peu de suspense, ce qui aurait pu provoquer une lassitude des fans de Formule 1. Mais à en croire les audiences de Canal+, diffuseur français de la discipline, il n’en est rien. D'après la chaîne cryptée, les Grands Prix programmés en après-midi ont rassemblé 1,2 million de spectateurs en moyenne, un niveau similaire à celui de la saison dernière, ce qui représentait alors un record historique pour une saison de F1 pour elle.
Pour Cyril Abiteboul, rien ne dit que le scénario soit le même indéfiniment. "C’est un championnat qui a une dynamique commerciale remarquable, parce qu’il amène chaque année des nouveautés comme le Grand Prix de Las Vegas. Il y a beaucoup d’autres intérêts que la première place du championnat des pilotes. Si cette situation devait s’éterniser trop longtemps, ça poserait des problèmes, mais je serais surpris que cette domination, telle qu’on l’a connue cette saison, reste intacte la saison prochaine. D’ici le prochain changement de règlement en 2026, Red Bull sera davantage concurrencée".
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