Mondiaux d'athlétisme : le relais 4x400 m mixte en quête de reconnaissance
Après le Bahreïn, la République dominicaine, les Pays-Bas, et dans une moindre mesure la Pologne, quelle autre nation créera la surprise et montera sur le podium du relais 4x400 m mixte, samedi 19 août (finale à 21h47), en ouverture des championnats du monde d'athlétisme à Budapest ? Lancée pour répondre à l'enjeu de parité du nombre d'athlètes, l'épreuve est née aux Mondiaux de relais 2017 aux Bahamas. Elle a intégré deux ans plus tard le programme des Mondiaux à Doha, puis des JO à Tokyo. Pourtant, malgré son caractère olympique, la course a encore bien du mal à attirer les stars du tour de piste.
A Eugene l'an passé, devant leur public et pour la dernière sortie de la légende Allyson Felix, les Etats-Unis s'étaient ainsi contentés du bronze, laissant au repos le futur champion du monde du 400m Michael Norman et Champion Allison, qui finira 4e. Selon Romain Barras, directeur de la haute performance de la Fédération française d'athlétisme, pour voir les meilleurs coureurs de 400 m s'engager sur cette jeune épreuve, "il faut que le programme change car dès le lendemain se tiennent les séries du 400 m individuel".
Un seul changement autorisé
Pour ne pas concurrencer les relais 4x400 m unisexes, placés traditionnellement le dernier jour de la compétition, World Athletics programme la version mixte en début de championnat. Une bonne manière de séduire le public friand des épreuves collectives. Du côté des encadrants, l'épreuve vire au casse-tête pour la composition des équipes, d'autant qu'à l'inverse des relais historiques, un seul changement est autorisé entre les séries et la finale.
"C'est une épreuve supplémentaire et donc une opportunité en plus pour aller chercher une médaille, pose Emmanuel Huruguen, responsable des relais 4x400 m. Notre mot d'ordre, c'est l'adhésion. Il n'y a pas d'obligation à participer." Très attaché à l'esprit de corps, Romain Barras tâche de persuader ses coureurs que les ambitions individuelles et collectives peuvent se nourrir l'une l'autre.
"On s'engage à offrir les meilleures conditions de récupération pour que les athlètes soient dans les meilleures dispositions le lendemain pour leurs séries."
Emmanuel Huruguen, responsable des relais 4x400 mà franceinfo: sport
Plus qu'une mise en jambes, Amandine Brossier, unique engagée, hommes et femmes confondus, sur le 400 m plat en individuel, perçoit le relais mixte comme "une autre opportunité de performer, un défi supplémentaire". "Si je suis sélectionnée, ça ne va pas trop me déranger. Le staff médical fera le nécessaire pour que je sois en forme dimanche. Je me sens prête à enchaîner les deux".
"Augmenter la reconnaissance" du relais mixte
Avec six athlètes maximum sélectionnés, l'épreuve demande moins de profondeur de banc que les relais classiques. De quoi faire émerger de plus petites nations, à l'image de la République dominicaine, championne du monde en titre et vice-championne olympique. Un suspense supplémentaire bien vu du côté des organisateurs, qui ont tout de même fait évoluer les règles de la course en mars 2022, pour "augmenter la reconnaissance en évitant les déséquilibres et en mettant mieux en valeur les performances".
Lors des premières éditions, l'ordre des coureurs était libre, ce qui donnait lieu à d'incroyables retournements de situation. Certains cherchaient à éviter le trafic, d'autres espéraient bénéficier d'une confrontation qui galvanise. Désormais, l'institution mondiale impose l'alternance homme-femme-homme-femme. "J'aimais mieux le format libre car ça laissait plus de liberté et de place à la stratégie, réagit Amandine Brossier. Avec un ordre imposé, on se demande quelle personne peut correspondre à tel poste et on est limité de fait par cette contrainte."
Stratégie, bluff et suspense
"Au fur et à mesure, on voyait de plus en plus d'équipes adopter l'alternance homme-femme. Quand on lance les deux garçons devant, les filles devenaient les chassées et c'était bien plus difficile pour elles. Je trouve cette évolution positive car il y a plus de bagarres sur davantage de tronçons", observe le directeur de la haute performance. "Certes l'image était spectaculaire mais la performance finale était moins bonne. Le fait d'être au contact aide à se transcender. Et puis l'image était toujours au détriment des féminines qui se faisaient doubler", complète Emmanuel Huruguen.
Pour relancer le suspense et la stratégie, World Athletics a introduit cette année une nouvelle règle sur l'annonce de la composition des équipes. "On peut annoncer les noms des six coureurs sélectionnés jusqu'à quarante minutes avant le départ. Et même attendre la chambre d'appel pour dévoiler les noms des quatre qui courent, détaille Olivier Vallaeys, responsable national du sprint long et haies basses. Une règle que la Fédération française a décidé d'exploiter au mieux, preuve qu'elle compte emmener son relais jusqu'à la finale mondiale. Fin juin, les Bleus avaient terminé au pied du podium des championnats d'Europe par équipes, en établissant au passage un nouveau record de France (3'13''36).
"Comme plein de pays vont devoir décider de mettre ou non leurs meilleurs coureurs, il ne faut pas qu'on se fasse avoir en faisant connaître notre choix", poursuit le responsable. Pour tenir l'information secrète jusqu'au bout, vendredi matin sur la piste du stade dont l'odeur rappelait qu'elle était flambant neuve, les nations répétaient d'ailleurs toutes leurs gammes... avec une équipe de six.
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