Les Mondiaux du changement russe?
Yulya Zaripova, championne olympique du 3000 m steeple à Londres, suspendue pour 30 mois en juillet 2013, pour d’importantes anomalies dans le profil sanguin de son passeport biologique. Sergey Kirdyapkin, champion olympique de la marche en 2012, suspendu 39 semaines à compter du 12 octobre 2012 (il pourra concourir aux JO de Rio) pour des anomalies dans son passeport biologique. Olga Kaniskina, championne olympique du 20km marche en 2008 à Pékin et Sergey Bakulin, champion du monde du 50km marche en 2011, suspendus pour les mêmes raisons et la même période. Valery Borchin, champion olympique du 20km marche en 2008, suspendu 8 ans. Tatiana Chernova, championne du monde d'heptathlon en 2011 à Daegu, suspendue après un contrôle positif aux stéroïdes aux Mondiaux 2009. La liste est longue. En fait, sur les 37 athlètes sanctionnés par la Fédération internationale (IAAF) sur la base du passeport biologique depuis 2009, 23 étaient Russes.
Aucun marcheur sur le 20km
C’est contre cette image désastreuse que les athlètes vont lutter à Pékin. Avant même de batailler face à leurs adversaires. Pour y parvenir, le gouvernement russe, à l’énorme pouvoir via le ministère des Sports qui a la tutelle sur les fédérations, a poussé le président de la Fédération, Valentin Balakhnichev, en poste depuis 1991, à la démission. Son successeur, Vadim Zelichenok, disait un mois avant les Mondiaux ne pas exclure de n’emmener aucun marcheur en Chine : "On a le pressentiment que cette discipline pourrait nous embarrasser aux Mondiaux". Il a gardé le cap et aucun Russe ne s'élancera dimanche matin dans le 20km marche. Les 20 marcheurs russes pris pour dopage ces dernières années ont été de trop. Les accusations de l'ARD et du Sunday Times n'ont rien arrangé ces dernières semaines. Juste avant le début de l'épreuve, la Fédération russe a annoncé qu'elle n'alignerait pas à Pékin le moindre athlète soupçonné de dopage. Et il a placé Youri Borzakovski à la tête de l’équipe de Russie d’athlétisme, en février dernier, avant l’Euro en salle.
L’homme a un palmarès impressionnant sur 800m : finaliste aux JO-2000 à seulement 19 ans, champion du monde en salle en 2001, vice-champion du monde en plein air en 2003, champion olympique en 2004, vice-champion du monde en 2005, médaillé de bronze aux Mondiaux en salle en 2006 et en plein air en 2007 et 2011, champion d’Europe en 2012. Mais là n’était pas le plus important.
Son image est immaculée. Pas de contrôle positif, des résultats réguliers, une science de la tactique extraordinaire sur la piste, et un discours clair : "Il faut prendre le problème à la base, en faisant en sorte de préserver les jeunes de la tentation (du dopage)", disait-il en mars dernier, après un Euro en salle fini à la première place (8 médailles dont 6 d’or). Et lors de la Coupe d’Europe par équipes, en juin, à domicile, la Russie est redevenue la nation N.1 dans cette épreuve aux points. Et régulièrement, l’ancien demi-fondeur est apparu, dans les tribunes, un grand sourire aux lèvres, les bras levés, venant féliciter ses troupes avec enthousiasme. Comme pour transmettre un vent de fraîcheur.
Borzakovski en étendard
Bien sûr, tout n’a pas encore changé. Valentin Maslakov, ancien entraîneur de l’équipe de russie actuellement en charge du sprint, ou Viktor Cheguine, celui de la marche, sont toujours présents autour des pistes. "Je ne bénéficie pas d'un pouvoir suffisant pour régler le problème moi-même. Pour ma part, j'ai en charge les affaires qui concernent l'équipe nationale. C'est le travail de la Fédération et du ministère des Sports de décider si ces gens-là doivent partir", justifiait Borzakovski en mars. "Mon boulot, c’est de surveiller les athlètes (…) en les éloignant de la tentation du dopage, en leur inculquant qu’il n’est pas nécessaire à la performance, qu’il n’est pas nécessaire à la performance, à condition d’accepter de s’entraîner plus fort que les autres et de s’imposer une bonne hygiène de vie."
Youri Borzakovski a un gros atout dans sa manche pour être entendu : "Mon grand avantage, c'est que je suis ancien athlète, et je connais dans les détails beaucoup de choses. Je connais beaucoup de monde, je comprends très bien les problèmes des sportifs et je peux les résoudre. Ils savent très bien que j'ai réussi aussi des choses. Je les respecte. Mais ils savent aussi que j'ai été sportif de haut niveau pendant 14 ans." Connu pour courir en fin de peloton afin d’éviter les bousculades qu’il n’aimait pas, Youri Borzakovski a choisi d’aller au contact pour redorer le blason de son équipe.
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