Doha 2019 : Record du monde, concours de folie et moments insolites, ce qu'il faut retenir des championnats du monde d'athlétisme
1 - Muhammad repart avec le record du monde
C’était l’une des courses les plus attendues de ces championnats du monde, un duel prémédité entre deux américaines Dalilah Muahammad et Sydney McLaughlin, et le 400m haies féminin a tenu toutes ses promesses. Éclipsée par McLaughlin, figure montante de l’athlétisme outre-Atlantique à 20 ans, Muhammad avait déjà remis les points sur les i avant Doha en faisant tomber le record du monde de Yuliya Pechenkina datant de 2003. 52’’20 couru par la hurdleuse à Des Moines en juillet… une marque qui n'aura tenu que quelques mois.
Car sur la piste du Khalifa International Stadium, McLaughlin a poussé la championne olympique à remporter son premier titre mondial et à améliorer son propre record du monde. Muhammad a affiché le temps record de 52’’16 soit 4 centièmes de mieux que sa précédente marque. "Je voulais d'abord le titre mondial, mais battre encore le record du monde en plus, c'est tout simplement fantastique, expliquait la recordwoman du monde après la course. Sur le plan tactique, j'avais juste décidé de prendre un départ très rapide et quand j'ai senti Sydney McLaughlin revenir sur mes talons autour de la neuvième haie, j'ai tout donné, enfin tout ce qui me restait comme forces." Avec une deuxième place obtenue en 52’’23, McLaughlin arrivait à trois centièmes de ce qu’était alors le record du monde et devient la deuxième meilleure performeuse de tous les temps.
2 - Le doublé inédit de Sifan Hassan
L’athlétisme féminin aura fait sensation à Doha, même si certains viendront émettre quelques doutes sur le doublé réalisé par Sifan Hassan, championne du monde du 10 000m et du 1 500m. La Néerlandaise est la seule athlète repartie du Qatar avec deux médailles d’or en individuel, devenant même la première femme à s’imposer sur ces deux distances lors des Mondiaux. Elève du sulfureux Alberto Salazar, ses résultats ont mis encore plus en lumière la suspension de son coach pour 4 ans par l’agence antidopage américain. "J’étais si fâchée après ce qu’on a pu dire sur moi. De l’extérieur ça semble facile, mais c’est tant de travail. Je suis propre et je le montre", avouait Hassan après son deuxième titre. Chacun se fera son propre avis.
Championne du monde du 10 000m lors du premier samedi de compétition, la Néerlandaise avait pulvérisé la concurrence comme le chrono. Une semaine plus tard, elle a réédité une performance supersonique sur 1 500m. Courant seule en tête et se permettant d'en remettre une couche à 300m de l’arrivée, elle a réalisé le sixième temps de l’histoire. Entre résultats mirobolants et affaire de dopage, Sifan Hassan restera sans nul doute l’athlète des Mondiaux 2019.
3 - Barshim, prince à retardement sur la hauteur
Il était la seule chance de médaille d’or pour le pays organisateur. Mutaz Essa Barshim a enflammé son public lors de la finale du saut en hauteur. Avec un bond à 2.37m, le Qatari a conservé son titre offrant au Khalifa International Stadium sa plus belle ambiance de la quinzaine.
"Je suis tellement heureux de gagner ici à la maison, s'est félicité Barshim après son titre. Je voulais vraiment le faire pour tous ceux qui sont venus m'encourager. Je n'étais pas prêt à 100%, mais ils m'ont permis d'élever mon niveau. J'ai vraiment ressenti l'énergie de la foule, de la part de l'Emir aussi qui était là ce soir. Grâce à tout ça, j'ai tout oublié, ma blessure, mes compétitions précédentes." S’il a bénéficié du soutien des siens, le Qatari a rapidement été oublié par son public.
Quelques minutes après la victoire de son champion, le stade s’est vidé à une vitesse proche d’un record du monde. Conséquence : Barshim s’est présenté devant une enceinte vide pour recevoir sa médaille d’or, ce qui a obligé l’organisation à repousser la cérémonie au lendemain. Le Qatari n’est pas près d’oublier son deuxième titre mondial.
4 - Des sprinteurs record
Il est le successeur annoncé d’Usain Bolt ! Christian Coleman a répondu présent malgré l’imbroglio qui l’entourait avec ses trois "no-show" en 18 mois et une suspension provisoire par l’agence antidopage américaine qui a été levée avant les Mondiaux. L’Américain était donc revanchard et s’est paré d'or après avoir terminé deuxième à Londres. Coleman a pulvérisé le chronomètre en affichant 9’’76 en finale, soit le meilleur temps d’une finale mondiale derrière le record du monde de Bolt à Berlin il y a 10 ans. "C'est un temps incroyable, mon record personnel, savourait Coleman après sa course. Je pense que le ciel est la limite, j'ai encore beaucoup de choses à travailler et beaucoup de moyens d'améliorer mon temps". Plus dingue encore, cette finale s’est terminée avec cinq sprinteurs sous les 10 secondes.
Chez les femmes, Shelly-Ann Fraser-Pryce a repris possession de sa couronne. Absente des Mondiaux de Londres en 2017 après sa grossesse, la Jamaïcaine championne du monde du 100m en 2009, 2013, 2015 a ajouté une quatrième médaille d’or mondiale à son palmarès sur la distance. Un record. Avec un temps canon de 10"71, elle a réalisé le meilleur chrono de la saison sur la ligne droite.
5- McLeod sème la zizanie
La finale du 110m haies a marqué ces championnats du monde à cause de son final assez cocasse. Champion du monde en titre, Omar McLeod est parti à la faute à la 9e haie. Le Jamaïcain qui a percuté ses deux dernièrs obstacles a terminé sa course dans le couloir d’Orlando Ortega, empêchant l’Espagnol d’aller disputer la médaille. Une galère qui a permis au Français Pascal Martinot-Lagarde de terminer troisième derrière Grant Holloway et Sergey Shubenkov.
Furieux, Ortega criait à l’injustice selon la presse espagnole : "Je suis bouche bée, je pense que c’est un vol, une arnaque. (...) Je pense qu'ils m'ont volé une médaille." Après deux appels de la fédération espagnole, l’IAAF a permis au troisième meilleur performeur de la saison d’avoir droit aux honneurs, partageant la troisième marche du podium avec PML. McLeod, lui, est resté spectateur.
6 - Les concours à l’honneur : notre top 3
Ils ont été la vraie surprise de ces Mondiaux. Si les regards se tournent très souvent sur la piste, il fallait tout autant scruter les bacs à sables, les sautoirs et les aires de lancer pour apprécier le spectacle.
Le triple saut masculin promettait d’être sensationnel et le combat entre Will Claye et Christian Taylor a eu lieu. Ce dernier a remporté son quatrième titre mondial après être passé tout proche de la correctionnelle. Deux premiers essais mordus, un troisième bond suffisant pour poursuivre le concours avant de se jeter à 17,92m et s’imposer. Derrière les deux Américains, le double médaillé d’argent en 2013 et 2015, Pablo Pichardo s’est vu éjecté du podium par la sensation Hugues-Fabrice Zango. Le protégé de Teddy Tamgho a battu par deux fois son record personnel pour prendre le bronze derrière les deux monstres. En prime, un record d’Afrique et une première médaille mondiale pour le Burkina Faso.
Il fallait s’envoler pour monter sur le podium de la hauteur féminine. Au terme d’un concours indécis avec quatre athlètes au-dessus des deux mètres, Mariya Lasitskene a été poussée dans ses retranchements pour conserver son titre après 2013 et 2017. Avec une barre à 2.04m et un sans-faute, elle a devancé sa concurrente de 18 ans. Yaroslava Mahuchikh a battu deux fois son record personnel pour passer elle aussi 2.04m. Mais le titre s’est décidé au nombre de tentatives réussies, ce qui a tourné en faveur de Lasitskene.
Les lanceurs de poids ont eux animé le dernier week-end de compétition à Doha. Le titre s’est joué pour un centimètre entre Tomas Walsh et Joe Kovacs. Un sixième jet à 22,91m a permis au dernier de remporter l’or mondial alors que le Néo-Zélandais pensait s’être assuré du titre avec son premier lancer marqué à 22,90. Pour rendre le concours encore plus fou, le deuxième américain Ryan Crouser a égalé Walsh sur son dernier jet. En quelques secondes, le champion du monde a perdu son titre rétrogradant à la troisième place pour avoir mordu 4 de ses 6 tentatives contre trois pour Crouser. Ahurissant.
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