Euro d'athlétisme : participer ou renoncer, les savants calculs des athlètes à deux mois des Jeux olympiques de Paris

L'équipe de France s'est déplacée en nombre (99 athlètes) aux championnats d'Europe à Rome. Certaines têtes d'affiche ont néanmoins préféré zapper le rendez-vous romain, pour soigner des bobos ou se concentrer sur l'entraînement.
Article rédigé par Anaïs Brosseau - à Rome
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
Le Français Pablo Matéo lors des séries du 100 m, le 7 juin 2024. (ANDREAS SOLARO / AFP)

Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras ? Avec des championnats d'Europe, du vendredi 7 au mercredi 12 juin, placés à une cinquantaine de jours du début des épreuves d'athlétisme des Jeux olympiques de Paris, les athlètes européens, et notamment tricolores, ont dû trancher : planifier deux compétitions majeures sur neuf semaines ou se concentrer sur celle qu'ils préparent depuis trois ans. Les Français sont nombreux (99) à avoir pris leur billet pour la capitale italienne. Parmi eux, plus d'une dizaine ont déjà validé les minima olympiques et d'autres sont bien engagés pour fouler la piste violette du Stade de France.

La Fédération française d'athlétisme a laissé carte blanche à ses athlètes. "C'est une compétition placée très tôt dans la saison. On a décidé de ne pas la rendre obligatoire, ni déterminante pour participer aux JO. On laisse la liberté aux athlètes d'organiser leur saison pour qu'ils soient au mieux au moment des Jeux", justifie Romain Barras, directeur de la haute performance à la FFA, pointant la présence de "la grande majorité" des habitués du maillot bleu.

Pour les sélectionnés, une participation aux Europe est d'abord l'occasion de gonfler un palmarès, avec une médaille ou une belle place. Un résultat rarement anodin dans un sport où une partie d'entre eux doit compter sur des sponsors, voire des cagnottes pour financer leur carrière. Autre motivation : participer à une répétition générale avant l'échéance parisienne.

Objectif minima

Pour préparer son élève à son programme olympique espéré (5 000-10 000 mètres), Adrien Taouji, entraîneur national à l'Insep, a décidé d'aligner Jimmy Gressier sur la plus longue des deux distances à Rome. "C'est un test grandeur nature sur un championnat, donc une course d'hommes à hommes, sans lièvre. C'est un bel exercice sans qu'il soit à 100% physiquement, car l'idée est de faire monter la forme après avec du travail", explique-t-il. Si le doublé en Italie était envisageable, le coach a préféré la sagesse pour "préserver la fraîcheur mentale" de son athlète en vue des Jeux olympiques : "L'objectif est de ne pas sortir lessivé des Europe."

Au Stadio olimpico romain, Jimmy Gressier courra aussi après sa sélection olympique sur 10 000 mètres, lui qui a déjà validé les minima sur 5 000 mètres. "Actuellement il est 26e à la Road to Paris [sur 27 places à prendre]. Mais il y a deux Européens, présents sur sa course, qui n'ont pas encore couru très vite et qui cherchent la même chose que lui", détaille Adrien Taouji, qui estime qu'un top 5 avec un chrono en moins de 27'30 permettrait d'engranger suffisamment de points pour voir les Jeux.

D'autres athlètes, à l'instar du lanceur de marteau Quentin Bigot qui revient d'une année blanche pour cause de blessure, du décathlonien Kevin Mayer, ou encore des sprinteurs Pablo Mateo et Meba-Mickaël Zeze seront en quête des minima olympiques à Rome... ou de points en vue du classement mondial, les championnats d'Europe en offrant davantage que la plupart des meetings.

"Dans ce contexte d'effervescence et d'émulation, des performances peuvent sortir. Pour certains, ce sera des minima olympiques. Pour d'autres, des points pour renforcer un classement mondial qui sera déterminant pour la qualification olympique."

Romain Barras, directeur de la haute performance à la FFA

à franceinfo: sport

Malgré ces diverses motivations, certains chefs de file de l'équipe de France ont choisi de zapper le rendez-vous italien. Le vice-champion d'Europe 2023 du 800 mètres en salle, Benjamin Robert, a fait l'impasse à regret. Après les Mondiaux en salle début mars, le calendrier était trop juste, entre le repos nécessaire et un nouveau bloc de travail, pour trouver un état de forme avant le 26 mai, condition obligatoire pour décrocher la sélection.

Travailler plutôt que de concourir

"Pour les JO, ses principaux adversaires ne sont pas européens. Le seul moyen de les affronter, c'est en meeting. Donc j'ai choisi qu'il allait affronter ces gens-là plutôt que de revoir des adversaires qu'il connaît par cœur et dont il n'a pas peur", argumente Sébastien Gamel, l'entraîneur du Toulousain. Pour son élève, place aux meetings de Strasbourg, Turku (Finlande) et Paris avec pour objectif de le voir courir en 1'42 avant la mi-juillet.

"L'objectif est qu'il soit en forme aux JO. En septembre, on ne se rappelera que des JO, pas des Europe. On verra à la fin si j'avais raison."

Sébastien Gamel, entraîneur de Benjamin Robert

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Sur la même distance, la triple vice-championne d'Europe Rénelle Lamote ne sera pas non plus du voyage, à cause de gênes qui ont retardé sa préparation. Pour les mêmes raisons, les hurdleurs Sasha Zhoya et Wilhem Belocian seront également absents.

"Il y a des moments dans une année où il faut savoir faire une croix sur une compétition pour préparer le reste de la saison. Le temps est alors plus à l'entraînement, plutôt que de risquer de se faire mal en compétition et de ne pas être performant à la hauteur de ses ambitions, analyse Romain Barras. Par exemple, quand Wilhem se déplace en Europe, c'est pour une médaille. Si ce n'est pas pour ça, je pense qu'il n'a plus aucun intérêt à venir."

Qu'ils aient choisi de s'aligner ou pas dans l'enceinte du Foro italico, les Tricolores auront ensuite rendez-vous à Angers pour les championnats de France, du 28 au 30 juin. Une étape obligatoire sur la route vers Paris et la dernière avant l'annonce de la sélection officielle pour les Jeux.

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