: Vidéo Comment le président François Mitterrand n'a jamais vraiment accepté le regard du sculpteur qui réalisait son buste
Daniel Druet s’est heurté à un modèle récalcitrant. Le président François Mitterrand "était impérial sur sa chaise et ne voulait pas du tout se laisser pénétrer par l’œil du sculpteur"… Extrait du magazine "20h30 le samedi" diffusé le 21 septembre 2019, juste après le journal de France 2.
Le président de la République François Mitterrand (1981-1995) apprécie le travail du sculpteur Daniel Druet qui travaille beaucoup pour le musée Grévin. En 1981, l’artiste et le chef de l’Etat, qui veut un portrait sculpté en bronze, s’accordent sur les séances de pose. Elles vont s’étaler sur deux ans au palais de l’Elysée… mais le président ne se laisse pas vraiment saisir par l’œil du sculpteur : "Il avait sa technique à lui pour me désorienter", se rappelle-t-il pour le magazine "20h30 le samedi" (Twitter).
"D’abord, il arrivait toujours en retard. C’était sont truc… Et je ne savais jamais comment allait être son comportement. Soit il passait devant moi comme ça en me faisant de petits signes, soit il me tapait sur l’épaule en me demandant si ça allait comme je voulais…" Le photographe de l’agence Magnum Guy Le Querrec, autorisé à assister au travail en cours, se souvient : "Il ne nous parle pas, très peu… Un petit mot de temps en temps. C’était un peu comme un théâtre pour moi : un homme seul sur son estrade, avec parfois quelqu’un qui vient…"
"Il voulait le buste qu’il imaginait"
Au cours des séances de pose, le président travaille et reçoit des visiteurs en ce début de premier septennat. De son côté, le sculpteur s’enlise. Le photographe sent qu’il est mal parti : "Mais je ne vais pas lui dire : 'Dis donc Daniel, tu ne te goures pas ?' Ça non, on ne peut pas." Alors, pourquoi n’était-il pas un bon modèle ? "Il était impérial sur sa chaise et ne voulait pas du tout se laisser pénétrer par l’œil du sculpteur, raconte Daniel Druet. Il voulait le buste qu’il imaginait, pas celui que j’étais en train de chercher à faire." Il réalise ainsi huit séances d’une heure étalées sur trois mois, mais il n’y arrive pas. Le sculpteur décide alors de tout arrêter.
Obsédé par cet échec, l’artiste revient à la charge, détruit son premier buste, et se représente devant le président avec une tige de travail vide : "Il n’a pas compris : ’Où est le buste monsieur Druet ?' Et j’ai senti que ça basculait. Le président a changé de comportement. Il s’est assis les pieds en dedans et me regardait angoissé, cramponné à son fauteuil… Et là, je me suis libéré. La terre, boum, pif, paf, pouf… et en deux séances j’ai remonté le buste." Le président lui demande de penser à la séance suivante mais le sculpteur répond : "Non, on va arrêter là. Pour moi, c’est fini. J’ai exprimé en deux heures tout ce que j’ai ressenti. Il voulait reprendre la situation en main et il l’a très mal pris. Le président m’a envoyé un petit mot de remerciement. Point final." François Mitterrand n’a jamais cherché à récupérer le buste.
Extrait du magazine "20h30 le samedi" (replay) diffusé le 21 septembre 2019, juste après le journal de France 2.
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