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Zéro mort sur les routes françaises, c'est possible ?

Le nombre de tués n'a jamais été aussi bas depuis 1948, selon la Sécurité routière. Il peut encore diminuer.

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Des automobilistes observent une reconstitution d'accident présentée par des sapeurs pompiers, le 29 juin 2012 sur l'aire de Mâcon Saint-Albain (Saône-et-Loire), sur l'autoroute A6. (JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP)

Le nombre de morts sur les routes françaises a atteint, en 2013, son plus bas niveau depuis 1948. Au total, 3 250 personnes sont mortes et 400 vies ont été épargnées par rapport à 2012, a déclaré le ministre de l'Intérieur, lundi 20 janvier. Dans la foulée, il a confirmé l'objectif de passer sous la barre des 2 000 morts "d'ici 2020".

Puis, mardi, Manuel Valls a annoncé son intention d'"expérimenter la limitation à 80 km/h dans plusieurs départements, à partir de cette année". Une mesure de plus dans la panoplie des outils utilisés pour limiter la mortalité routière.

Peut-on espérer, un jour, un bilan proche de zéro ?

La limitation de vitesse, une mesure qui divise

En limitant la vitesse à 80 km/h sur les routes départementales, Manuel Valls suit les recommandations des experts du Conseil national de la sécurité routière. Ils estiment à 450 le nombre de vies qu'on peut sauver avec ce dispositif. Contacté par francetv info, Jean-Yves Salaün, délégué général de l'association Prévention routière, fait le même constat : "La diminution du nombre de morts constatée ces dernières années s'explique en grande partie par la baisse de 10 km/h de la vitesse en moyenne sur les routes."

D'autres associations ne partagent pas cet enthousiasme. "Ce n'est pas en changeant un numéro sur un panneau qu'il y aura 450 morts en moins", estime Pierre Chasseray, porte-parole de l'association 40 millions d'automobilistes, également contacté par francetv info. Pour faire reculer le nombre de tués sur les routes, son association a recueilli les idées des Français au cours de l'été 2013. "Installer des doubles glissières de sécurité pour protéger les motards, des barrages pour éviter d'emprunter l'autoroute à contre-sens..." Rassemblées dans un document, ces propositions seront présentées le 15 février.

"J'attends des précisions sur cette expérimentation, indique pour sa part Christian Scholly, directeur général adjoint de l'association Automobile Club, à francetv info. Mais je préférerais un audit indépendant des routes départementales pour identifier les endroits dangereux, puis les infrastructures à rénover."

Le levier oublié : l'évolution des technologies

Christian Scholly imagine une France sans mort sur les routes, mais "pas avant 2030". "Si en 2020, on passe sous la barre des 2 000 morts, il faudra au moins une décennie supplémentaire pour y parvenir", calcule-t-il.

Les nouvelles technologies, dont les voitures sont aujourd'hui équipées, permettent d'aller dans le bon sens. "Par exemple, le système de freinage a beaucoup été amélioré", souligne Christian Scholly. Ainsi, de nombreux véhicules sont équipés du système ABS, qui sert à freiner en conservant la maîtrise de la voiture et donc à augmenter la sécurité de conduite.

"Si aujourd'hui, il y a cinq fois moins de morts qu'en 1972, c'est simplement parce que les véhicules sont plus sûrs", insiste, de son côté, Pierre Chasseray. "Le nombre d'accidents va donc continuer à diminuer dans les prochaines années", ajoute-t-il. Mais il estime que la courbe s'approchera du niveau zéro sans jamais l'atteindre.

Empêcher les accidents, mission impossible

"Le zéro accident est impossible : tout déplacement implique un risque. Nous ne sommes pas des robots, ni des machines. Par définition, il y a donc des accidents totalement imprévisibles", affirme Pierre Chasseray avec aplomb. "On peut anticiper les accidents avec des solutions techniques. Mais la violence d'un choc entre des voitures, des vélos, des motos ou encore avec des piétons, sera toujours importante", renchérit Jean-Yves Salaün.

D'autant plus que, selon Jean-Yves Salaün, le nombre d'automobilistes tués baisse depuis dix ans, alors que ce n'est pas le cas des piétons, cyclistes et motocyclistes, qui représentent 44% des tués. "Les campagnes de sensibilisation sur le retour de soirée adressées aux jeunes ont fini par avoir un effet positif. Mais on oublie souvent que la mort sur les routes concerne aussi les seniors, lorsqu'ils sont piétons", explique-t-il encore.

Il reste aussi des progrès à faire contre la conduite en état d'ivresse. Sur ce point, les trois associations sont unanimes pour l'apparition de nouvelles mesures. Elles vont devoir patienter. Un Comité interministériel de la sécurité routière, placé sous l'autorité du Premier ministre, se penchera notamment sur la mise en place d'"éthylotests anti-démarrage" autour du mois de juin.

Peu importe le temps que cela prendra : les associations savent que la baisse du nombre de morts sur les routes est nécessairement progressive. "Agir par tous les moyens pour éviter les accidents et réfléchir à tous les éléments qui peuvent contribuer à améliorer la sécurité routière est une démarche indispensable", martèle Jean-Yves Salaün. A la manière de la Suède, souvent citée en exemple par la Sécurité routière, voir disparaître la mortalité des routes françaises est un objectif que chacun doit avoir en tête.

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