Condamnation du cardinal Barbarin à six mois de prison avec sursis : "C'est un pas de plus qui est franchi par la justice"
Le cardinal Barbarin a été condamné pour non-dénonciation d'agressions sexuelles. Une "surprise" pour Jean-Pierre Denis, le directeur de la rédaction du magazine "La Vie".
Le cardinal Barbarin va faire appel après sa condamnation par le tribunal de Lyon ce jeudi à 6 mois de prison avec sursis pour la non-dénonciation d'agressions sexuelles commises par un prêtre de son diocèse.
Invité de franceinfo ce jeudi Jean-Pierre Denis, directeur de la rédaction du magazine La Vie estime que "c'est un pas de plus qui est franchi par la justice". Pour lui, cette condamnation "pose une question profonde : celle de l'exercice du pouvoir dans l'Église catholique".
franceinfo: Cette condamnation est-elle une surprise pour vous ?
Jean-Pierre Denis : C'est une surprise parce qu'au fond, d'un côté, il n'y avait pas de réquisitions, et de l'autre, on est quand même dans une zone d'interrogation, dans la mesure où les faits étaient réputés prescrits. C'est quand même un pas de plus qui est franchi par la justice et, honnêtement, on ne s'y attendait pas vraiment. C'est peut être aussi une prise en compte de l'évolution de l'opinion publique. Le procès a été exemplaire au-delà du cardinal Barbarin, et ce que l'institution paye, c'est l'énorme retard avec lequel elle a réagi. Cela fait quand même une vingtaine d'années que l'Église traîne ces affaires-là et je crois qu'aujourd’hui, c'est la facture de ce retard qui est présentée par la justice. C'est cela qui me frappe.
Pensez-vous que le cardinal Barbarin va et doit démissionner ?
Je serais étonné qu'il le fasse. Dans la mesure où il veut faire appel, ça ne me paraîtrait pas très cohérent. Ce que je comprends de la jurisprudence actuelle dans l'Eglise, c'est que tant qu'il n'y a pas de condamnation, il n'y a pas de démission. Donc je serais assez étonné qu'il démissionne.
Quelles conséquences cette condamnation peut avoir sur l'Église ?
Sur les catholiques, ils sont déjà tellement secoués, c'est à peine un peu plus. Pour l'opinion publique catholique, il y a un basculement déjà, une vraie prise de conscience. Et parfois même une certaine colère que je vois dans les courriers de nos lecteurs. Après, au niveau du Vatican, il y a eu récemment un sommet organisé par le pape François. Il y a quelque chose qui a changé mais cela change assez lentement. On attend de voir quelles sont les mesures qui seront prises à l'échelle internationale. En fait, ce qu'il faut voir, c'est que l'Eglise est assez décentralisée. C'est d'ailleurs un peu le problème : chaque évêque fait un peu ce qu'il veut chez lui. Contrairement à ce que l'on peut imaginer, ce n'est pas une hiérarchie où les ordres descendent directement. C'est donc pour ça aussi que cela prend du temps pour changer la gouvernance. [...] C'est quelque chose [les abus sexuels] qui existe un peu partout et cela pose une question profonde, c'est celle de l'exercice du pouvoir dans l'Église catholique. C'est cela qui, à mon avis, va bouger. Parce qu'il faut rappeler que le cardinal Barbarin n'est pas condamné pour des abus mais pour non-dénonciation. C'est donc le système de pouvoir dans l'Église qui est mis en question, et cette affaire va contribuer à faire changer les choses. Il y a un système de contre-pouvoir qui est à mettre en place, et qui n'a pas encore été mis en place
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