La croix de Ploërmel : la passion de ses défenseurs, à nouveau appelée à s'exprimer
Une manifestation pour le maintien de la croix est organisée dimanche, à Ploërmel, tandis que les partisans de son retrait maintiennent leur position. Franceinfo vous emmène dans les coulisses d'une discorde tenace.
La croix de Ploërmel (Morbihan), installée au-dessus d'une statue de Jean Paul II, sur un parking public, mobilise depuis plusieurs mois partisans et opposants à son maintien. Le Conseil d'État a donné raison aux défenseurs du retrait, fin octobre, mais le collectif "Touche pas à ma croix" insiste et appelle à une manifestation dimanche 26 novembre.
La croix de "l'union" ou "des dérives" ?
Le secrétaire départemental de Debout la France dans le Morbihan, David Cabas, tient beaucoup à cette croix, qui représente à ses yeux "les racines de la France" et "un symbole d’union". Il est aussi cofondateur du collectif "Touche pas à ma croix", qui appelle au rassemblement dominical, pour réclamer son maintien.
Il n’y a pas de raison de retirer cette croix. Il n’y pas de problème d’ordre public. Ici c’est calme. Ça n’embête personne, sauf deux personnes, deux Ploërmelais, sur un total de 10 000 habitants.
David Cabas, du mouvement "Touche pas à ma croix"à franceinfo
Deux personnes ont porté plainte contre cette croix, affirme David Cabas. Parmi elles, Gilles Kerouedan, membre de la Fédération morbihannaise de la Libre pensée. Selon cet opposant de la première heure à la croix, son maintien, "c’est la porte ouverte à toutes les dérives". Il admet que onze ans après son inauguration, la croix installée sur un parking public à deux pas du centre-ville de Ploërmel, laisse de nombreux habitants totalement indifférents. Mais il insiste. Pour lui, c’est contraire à la loi de 1905 qui interdit d’élever sur un emplacement public, un emblème religieux, rappelle-t-il.
C’est une loi pour apprendre à vivre ensemble, apprendre à vivre la religion, mais avec les autres. La religion est une affaire individuelle qui n'a pas à s'exprimer sur un lieu public.
Gilles Kerouedan, plaignant dans l'affaire de la croix de Ploërmelà franceinfo
Malgré la décision du Conseil d’Etat, Gilles Kerouedan n'est pas tranquille, en raison d’insultes et de menaces véhiculées par les réseaux sociaux. La Fédération morbihannaise de la Libre pensée a aussi reçu un colis rempli d'excréments, explique-t-il. Et lui-même a porté plainte après la réception d'une lettre peu amicale avec ces mots : "Vous faites partie de ces soumis à l’islam qui rêvent de voir les églises et les calvaires détruits." Le courrier signé du Renouveau nationaliste le somme de retirer sa plainte sous peine de "l’effacer, lui, du paysage".
La défense du patrimoine comme argument
Paul Anselin, l’ancien maire de Ploërmel, est à l’origine de l’implantation du monument en 2006. Celui qui avoue de ne "pas toujours être empreint de charité chrétienne" déclare, pas commode, qu’il "emmerde" les opposants à la croix. S'il se bat pour que le monument reste sur son emplacement, c'est pour une raison culturelle. Paul Anselin estime que cette statue et cette croix, font partie du patrimoine de la région.
En, Bretagne, il y a des croix partout. Cela partie de notre identité bretonne.
Paul Anselin, ancien maire de Ploërmelà franceinfo
Paul Anselin, à la tête de l’association "Touche pas à mon pape", ne compte pas se rendre à la manifestation de dimanche. "Nous n’y allons pas et je condamne cette récupération politique." Nous n’avons rien à voir avec ces groupuscules qui ne sont pas d’inspiration chrétienne, affirme-t-il. "Je ne veux pas employer le mot fascisant, mais je le pense profondément", lâche l’ancien édile de Ploërmel.
Ploërmel à la recherche d'un climat moins passionnel
En attendant une éventuelle sortie de crise à Ploërmel, on continue tranquillement de se garer près de la croix, la plupart du temps sans la regarder. Une habitante estime qu'"il y a des choses pires dans la vie" et relative l'importance de l'affaire.
On pourrait mettre notre argent, notre énergie ailleurs, pour de meilleures causes. La statue est là alors, laissons la et passons à autre chose.
Une habitante de Ploërmelà franceinfo
De son côté, l’actuel maire de la commune, Patrick Le Diffon est fatigué et inquiet par la bataille qui se livre autour de la croix. L'élu prône l’apaisement et étudie plusieurs solutions. La privatisation du parking sur lequel se dresse le monument fait partie des possibilités. Reste à savoir si elle ramènera la sérénité à Ploërmel...
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