"Hijab Day" à Sciences Po : "Nous voulions ouvrir le débat, y compris avec des contradicteurs"
Asma, l'une des organisatrices du "Hijab Day", revient sur la manifestation qui a suscité de vives réactions.
Ils voulaient "démystifier le voile". Un collectif d'étudiants a organisé un "Hijab Day" à Sciences Po Paris, mercredi 20 avril. Sur Facebook (dans une page qui a depuis été supprimée, puis remplacée), le groupe invitait les étudiants de l'école parisienne "à participer à une journée de sensibilisation sur la question du foulard en France". "C'est la personne qui le porte qui donne une signification à son vêtement, et elle est la seule légitime à le faire", poursuit le collectif. L'événement a suscité l'indignation d'élus Les Républicains et Front national, qui ont reproché à Sciences Po de laisser un espace au "prosélytisme". Certains sont allés jusqu'à réclamer la démission de la direction de l'école de la rue Saint-Guillaume.
Francetv info a interrogé une membre du collectif à l'origine du Hijab Day : Asma, 21 ans, qui ne porte pas de voile.
Francetv info : Qui est à l'origine de cette journée ?
Asma : Nous sommes un collectif d'étudiants et étudiantes de Sciences Po, de différentes origines sociales et culturelles, et de promotions différentes. Parmi nous, il y a des femmes musulmanes et non musulmanes, voilées et non voilées, et aussi des hommes. C'est important de le souligner.
Quel était l'objectif du "Hijab Day", que vous avez organisé à Sciences Po, mercredi ?
L'initiative est née parce que nous en avons eu assez des propos de responsables politiques sur les femmes voilées - Manuel Valls, Laurence Rossignol, mais pas seulement -, qui prétendent libérer les femmes, sans les consulter. Le but de cette journée était d'échanger avec des personnes qui ne sont pas déjà sensibles à ces questions. Dans les conférences, qui sont fréquentes à Sciences Po, ceux qui viennent sont souvent déjà intéressés par le sujet. Nous voulions sortir de ce cadre, pour ouvrir le débat, y compris avec des contradicteurs. C'est pourquoi nous avons choisi de nous installer à "la péniche", dans le hall de l'école, qui est le lieu où l'immense majorité des étudiants passent. Nous voulions simplement être accessibles, et non pas faire du prosélytisme comme on nous l'a reproché.
Avec la polémique et des réactions parfois violentes, comment voyez-vous cette journée a posteriori ?
Ces remarques nous consternent, mais nous nous attendions à ce type d'attaques, au vu du contexte délétère en France sur ce sujet. Médias et politiques se sont focalisés sur LE voile et ont raconté que nous avions distribué des voiles à l'entrée de l'école, mais c'est faux ! Nous retenons de cette journée le dialogue, que nous avons réussi à faire naître au sein de la vie étudiante. Nous avons pu discuter aussi bien avec des étudiants qui comprennent, d'autres qui sont sceptiques, d'autres complètement en désaccord. Les uns et les unes voulaient juste parler, les autres aller plus loin, en faisant l'expérience de se voiler la tête volontairement. Les échanges ont été constructifs avec toutes les personnes qui sont venues nous parler et nous avons un livre d'or qui en témoigne. Il n'y a eu qu'une seule petite altercation, quand une femme, "venue de loin", nous a-t-elle dit, nous a seulement qualifiées de "connes" et "soumises", sans nous demander notre avis.
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