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Le Vel d'Hiv, c'est "3 900 enfants déportés parmi les raflés. Six, seulement, sont revenus."

A l'occasion de la Journée nationale à la mémoire des victimes de crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux "Justes" de France, le président du CRIF, Francis Kalifat revient sur les violences antisémites constatées en France, ces dernières années.

Article rédigé par franceinfo
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Le président du CRIF, Francis Kalifat, lors du 33e dinner annuel du CRIF, en 2018. Photo d'illustration. (LUDOVIC MARIN / POOL / AFP POOL)

La Journée nationale à la mémoire des victimes de crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux "Justes" de France est célébrée dimanche 22 juillet. Une cérémonie qui commémore la rafle du Vel d'Hiv a lieu en présence du Premier ministre Édouard Philippe.

"C'est inscrit maintenant, dans l'histoire de notre pays, de rappeller, de reconnaître cette responsabilité de l'État français", estime Francis Kalifat, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), rappelant que le Vel d'Hiv, c'est "3 900 enfants déportés parmi les raflés. Six, seulement, sont revenus."

Au-delà de la question de la mémoire, qui doit désormais être entretenue alors que la plupart des témoins directs de la Shoah ont disparu, se pose le problème des violences antisémites : "les Français juifs représentent moins de 1% de la population et à eux seuls, ils concentrent près de 35% de la totalité des actes racistes commis en France", s'inquiète Francis Kalifat.

franceinfo : Depuis le discours historique de Jacques Chirac en 1995, tous les présidents rappellent la responsabilité de la France dans la déportation de dizaines de milliers de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Il serait important que le Premier ministre le fasse à nouveau cette année ?

Francis Kalifat : Oui, je pense qu'il le fera, parce que je pense que c'est inscrit maintenant, dans l'histoire de notre pays, de rappeller, de reconnaître cette responsabilité de l'État français dans ce qu'il s'est passé dans ces deux journées que nous allons commémorer. Je crois qu'il faut rappeler ce que c'était, tout de même. C'était il y a 76 ans, presque jour pour jour. La fameuse rafle du Vel d'Hiv. 13 152 Juifs arrêtés et parmi eux, 4 115 enfants. 3 900 enfants déportés parmi les raflés. Six, seulement, sont revenus. C'est cette dimension-là, aussi, qu'il faut rappeler et je suis convaincu que le Premier ministre rappellera tout à l'heure cet évènement, dans la lignée de tous ceux qui se sont exprimés à cette occasion. Il redira à nouveau la responsabilité de l'État français dans cette déportation.

Il y a aussi la question de la transmission de la mémoire, alors que les témoins disparaissent.

C'est tout le défi qui nous est lancé, à nous qui n'avons pas connu cette période. Nous avons la responsabilité de trouver les modalités de cette mémoire sans témoins et de relever ce défi d'être finalement les témoins des témoins, d'être les passeurs d'une mémoire qui va être inscrite pour l'éternité dans l'histoire de la nation française.

En mars dernier, Mireille Knoll était assassinée chez elle à Paris. Les autorités disent que les actes antisémites sont moins nombreux, mais plus violents. C'est la mission de chacun d'entre nous de lutter contre l'antisémitisme ?

Oui, vous avez raison, le ministère constate réellement une baisse de ces actes racistes, autour de 16%. Mais les actes violents, eux, ont augmenté. Ce qui est à noter surtout, dans ces chiffres, c'est encore le ratio : les Français juifs représentent moins de 1% de la population et à eux seuls, ils concentrent près de 35% de la totalité des actes racistes commis en France. C'est là où se situe vraiment le problème. Il y a un véritable problème d'antisémitisme en France et il faut trouver les moyens d'arrêter ces vagues antisémites. La vie va devenir impossible pour les Français juifs si les choses ne cessent pas. Sur le moyen terme, des mesures sont mises en place, par le ministre de l'Éducation nationale, notamment, au travers du comité laïcité. Ce sont des choses qui vont produire des effets à moyen terme. Je crois qu'à court terme, le seul moyen, c'est de renforcer les sanctions pénales, que les tribunaux prononcent des sanctions suffisamment fortes pour être dissuasives.

Vous avez été critiqué pour avoir refusé à Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen de participer à la marche blanche pour Mireille Knoll. Comprenez-vous aujourd'hui ces critiques ?

Je les comprends d'autant moins que beaucoup de ceux qui m'ont critiqué sont finalement revenus sur leurs critiques. Ce que j'ai dit ce jour-là c'était non pas que j'interdisais à Jean-Luc Mélenchon ou à Marine Le Pen de venir dans la rue, parce que la rue ne m'appartient pas. Ce que j'ai dit, c'est qu'il n'était pas souhaitable qu'ils soient à mes côtés dans cette manifestation, pour une raison simple : je considère que la lutte contre l'antisémitisme n'est pas un combat à la carte. Je crois que l'on doit dénoncer toutes les formes de l'antisémitisme pour pouvoir dire que l'on combat l'antisémitisme et non pas avoir une dénonciation sélective en fonction que l'on soit à gauche ou à droite.

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