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Quelle sera la prochaine personnalité au Panthéon ?

ENQUÊTE | Qui rejoindra Voltaire, Hugo, Zola ou Jean Moulin ? Et quel avenir pour le Panthéon ? L'Elysée vient de lancer une réflexion sur le sujet. Depuis quelques semaine, une intense campagne de lobbying s'organise chez les supporteurs du résistant Pierre Brossolette, de l'homme politique Jean Zay, de la femme de lettres Olympe de Gouges ou de Diderot. Mais pour François Hollande, le prochain grand homme de la nation doit être une....femme. Mais comment choisir ? Et sur quels critères ?
Article rédigé par Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
  (Sipa)

François Hollande l'a annoncé à plusieurs reprises :
il y aura une panthéonisation pendant son mandat. Ce vendredi, l'Elysée a demandé au président du Centre des monuments nationaux, Philippe Belaval, "d'émettre des suggestions sur les personnalités qui pourraient en faire l'objet dans les années qui viennent, en tenant compte de la parité et de la diversité pour rendre sensible au plus grand nombre la portée " des hommages au Panthéon. Le rapport est attendu pour le 30 septembre prochain.

Un
moment que les comités de soutien des plusieurs personnalités pressenties attendent
avec impatience. Depuis plusieurs semaines, ces derniers ont entamé une
campagne de lobbying pour tenter de convaincre le chef de l'Etat de faire entrer
leur candidat au sein du temple des "grands hommes de la nation ". A
ce jeu, les soutiens de trois personnalités redoublent d'efforts .

Campagne de lobbying

Pour Pierre Brossolette, un prix Nobel de médecine a
publié en avril dernier une tribune dans Le Monde, cosignée notamment par
Robert Badinter, pour vanter les mérites du résistant, cet "exemple
vivant
". En début de semaine, c'est une ancienne égérie de Chanel qui a
lancé un appel sur Twittter.

Pour les soutiens de Pierre Brossolette, une panthéonisation
serait d'autant plus bienvenue que la France s'apprête à fêter les 70 ans de la
Libération l'an prochain.

Mais voilà, c'est aussi le tricentenaire de la naissance
de Diderot en octobre prochain et le philosophe des Lumières peut aussi compter
sur des "poids lourds". D'après le magazine Marianne , Jacques
Attali aurait reçu fin 2012 l'engagement de François Hollande pour le transfert
des cendres de l'Encyclopédiste au
Panthéon. Pour l'académicien Erik Orsenna,, président du comité de soutien Diderot, "à
l'heure où notre société se méfie de plus en plus de la science, cela enverrait
un bon message
".

Et la liste continue : Stéphane Hessel, le politique Jean Zay peut lui compter sur le
soutien du Grand Orient de France
, la candidate à la mairie de Paris, Anne
Hidalgo, s'est elle prononcée en faveur de la femme de lettres Olympe de Gouges. Et
on peut encore citer l'anarchiste Louise Michel, la résistante Geneviève De
Gaulle-Anthonioz ou encore Simone de Beauvoir.

> voir les principaux pressentis à la
panthéonisation 

Priorité à une femme

A l'Elysée, on se dit "sensible et à l'écoute des
différents arguments
". Mais en ce qui concerne le Panthéon, c'est François Hollande qui a le dernier mot. Et une chose est sûre, "le président
veut que la prochaine entrée au Panthéon soit une femme
". Ce serait la seconde panthéonisée après Marie Curie, inhumée en 1995... aux côtés de son mari.

Le choix de faire entrer une personnalité au Panthéon est loin d'être anodin pour les dirigeants. "Le chef d'Etat qui panthéonise veut faire l'unité sur son mandat en temps de crise ou de victoire ", explique l'historien Jean-François Decraene. Et le choix d'une femme ? "C'est prendre en compte une évolution de la société sur le plan politique. Mais aussi de dire : on est tous unis, femmes et hommes, autour du pouvoir que nous avons élu ".

Mais les supporteurs des candidats masculins gardent tout de même espoir et imaginent des entrées simultanées. Après tout, la crypte du Panthéon compte près
de 300 places pour actuellement 71 personnalités inhumés. Mais la panthéonisation à un coût : un million d'euros pour une
inhumation.

"Une canonisation nationale"

Il n'y a pas de texte qui encadre la procédure et les
critères pour être éligible à la panthéonisation. Mais une certaine tradition s'est
installée, au fil du temps, depuis la
Révolution. Avant d'arriver sur le bureau de l'Elysée, un comité fait le tri
parmi les dossiers. Charge à lui d'étudier les candidatures et de parvenir à un
consensus. "Il s'agit du même processus que pour la canonisation de l'Eglise
catholique
", d'après l'historien Jean-François Decraene.

Pour l'auteur du Petit dictionnaire des Grands hommes du
Panthéon,  "le premier des critères est celui de la valeur
exemplaire de l'unité nationale. On cherche le côté exemplaire
". D'autres
éléments entrent en jeu. Le candidat doit être mort depuis cinq ans minimum pour
éviter les erreurs de casting. "On avait
panthéonisé au moment de la Révolution des gens comme Marat. Et puis on s'est
aperçu par la suite que ce n'était pas forcément un bon choix.... Et il a fallu
le retirer du Panthéon
", note François Decraene. Exit donc, a priori, Stéphane Hessel. Lors de sa disparition, en février dernier, de nombreuses personalités avaient demandé son entrée au Panthéon..

Dernière étape avant panthéonisation : l'accord de la famille. En 2009,
Nicolas Sarkozy voulait transférer les restes d'Albert Camus au Panthéon. Mais
il a dû y renoncer après le refus du fils de l'auteur.

Le trombinoscope des 71 panthéonisés

"Un lieu important pour oublier la crise "

Pour l'Elysée, il ne s'agit pas seulement d'installer une 72ème personnalité dans la crypte de la montagne Sainte-Geneviève. Il faut "repenser
le lieu, de le rendre plus accessible au public
", explique-t-on dans l'entourage du président, alors que le Panthéon est déjà engagé dans des travaux de restauration
importants (29 millions d'euros sur deux ans). Il s'agit notamment d'organiser "la tenue de cérémonies républicaines ".

"C'est effectivement une belle occasion de faire le
ménage
", affirme Erik Orsenna. "I l y a quand même énormément de
militaires subalternes de Napoléon. On ne peut pas dire qu'ils aient joué un
rôle capital pour la nation
", poursuit l'académicien. Effectivement,
quand on regarde l'historique des panthéonisations, le nombre de personnalités inhumées sous le premier Empire est impressionnant. 

Pour Erik Orsenna, il faut "rendre hommage à nos grands anciens et faire l'inventaire de nos trésors pour sortir de notre dépression ambiante et notre peur perpétuelle ". Avec plus de 725.000 visiteurs, le Panthéon a doublé sa
fréquentation en 10 ans mais il est encore loin des principaux musées de la
capitale.

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