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Karting à la prison de Fresnes : "La droite et l'extrême droite surjouent cette polémique", estime la députée Renaissance Caroline Abadie

"Ce sont les mêmes qui, lorsqu'ils sont à la tête de régions, ne financent pas la formation professionnelle dont on a besoin" pour lutter contre la récidive, critique Caroline Abadie, rapporteure de la commission d’enquête sur la politique pénitentiaire sous la précédente législature.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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La députée Renaissance, Caroline Abadie, le 20 juin 2022. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

"La droite et l'extrême droite surjouent cette polémique", a estimé la députée Renaissance Caroline Abadie, lundi 22 août sur franceinfo, en réaction à la controverse qui suit l'organisation au sein de la prison de Fresnes (Val-de-Marne) d'épreuves filmées inspirées de l'émission Koh-Lanta au profit d'associations, dont une épreuve de karting. "Ce sont deux détenus qui font du karting parmi les 72 000 détenus en France, ce n'est pas tous les jours comme ça, ni à Fresnes ni ailleurs, loin s'en faut", a souligné l'élue iséroise, rapporteure de la commission d’enquête sur la politique pénitentiaire sous la précédente législature. Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a néanmoins "ordonné une enquête" administrative sur le sujet.

franceinfo : Êtes-vous d'accord avec le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti lorsqu'il affirme que "la lutte contre la récidive passe par la réinsertion, mais certainement pas par le karting" ?

Caroline Abadie : Je comprends tout à fait qu'il demande une enquête. Vraisemblablement, les images qu'on a vues ne correspondaient pas à ce que ce qu'il attendait. C'est donc assez logique qu'il essaye de faire la lumière sur cette histoire-là. Le karting n'est peut-être pas l'activité la plus propice à la réinsertion, mais il faut admettre que la réinsertion est indispensable et qu'elle passe parfois par des outils qui peuvent être innovants, qui peuvent sembler décalés par rapport à ce qu'on imagine, mais qui peuvent porter leurs fruits.

"Je pense qu'il faudra aussi évaluer si, pendant ces quelques jours de 'joie', on a eu moins de faits disciplinaires à l'intérieur de la prison de Fresnes, si on a des jeunes qui ont repris un peu leur destin en main."

Caroline Abadie, députée Renaissance

à franceinfo

C'est ça la question qu'il faudra aussi se poser pour évaluer précisément cette opération.

Que pensez-vous de ce "Koh-Lanta" organisé à la prison de Fresnes ?

Je ne savais pas qu'on pouvait faire du karting dans une prison, donc je suis plutôt très étonnée. Je ne sais pas s'il faut être choqué par cette image-là. Il ne faut pas imaginer qu'il ne s'est passé que ça. Il y a eu aussi des quizz.

"Ils [l'équipe des détenus, mais aussi celle des surveillants et des habitants de Fresnes auxquels ils faisaient face] se sont battus pour des associations. La cause est belle."

Caroline Abadie

à franceinfo

Pour avoir auditionné de nombreuses associations qui travaillent en prison, on est capable aujourd'hui d'y faire un téléthon, de faire des cours de cuisine. On les a déjà vues, ces images, donc je ne pense pas qu'il faille absolument être choqué qu'on puisse faire des choses en prison. Les prisonniers ont besoin de l'Éducation nationale, ont besoin de formation professionnelle, ont besoin de travail et aussi ont besoin de loisirs. Aujourd'hui, ils sortent très peu de leur cellule. Ils passent quasiment 20 heures sur 24 en cellule surpeuplée. On connaît les conditions de détention à Fresnes : pas de douche en cellule, trois douches par semaine. On peut aussi remettre tout ça dans un contexte. C'est une journée dans une année. Ce sont deux détenus qui font du karting parmi les 72 000 détenus en France. Ce n'est pas tous les jours comme ça, ni à Fresnes ni ailleurs, loin s'en faut.

Certains syndicats pénitentiaires ont aussi rappelé la vétusté de la prison de Fresnes. Ils ont estimé que l'argent qui a été dépensé pour cette opération aurait pu servir à financer en partie les rénovations nécessaires. Que leur répondez-vous ?

Ce que je sais c'est que l'administration pénitentiaire n'a pas financé cette opération et qu'elle est financée entièrement par les producteurs [cette vidéo est un épisode de la compétition Kohlantess, diffusée sur Internet].

"Pour rénover Fresnes, il faudrait quelque 300 millions d'euros. Je ne pense pas que cette émission ait pu coûter autant à ses producteurs."

Caroline Abadie

à franceinfo

On n'est vraiment pas du tout sur la même échelle. C'est un débat, je pense, pour attirer l'attention. Ce que je regrette, c'est qu'effectivement, la droite et l'extrême droite, forcément, surjouent cette polémique. Ce sont les mêmes qui, lorsqu'ils sont à la tête de régions, ne financent pas la formation professionnelle dont on a besoin aujourd'hui pour aider ces détenus à sortir de la récidive.

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