Pour le Conseil de l'Europe, la France viole la charte interdisant les châtiments corporels envers les enfants
L'institution européenne basée à Strasbourg estime que le droit français n'est pas assez précis sur la question des punitions corporelles.
Le sermon était attendu. Le Conseil de l'Europe a épinglé la France, mercredi 4 mars, pour sa législation ne condamnant pas de manière assez explicite les châtiments corporels sur les enfants, en violation de la Charte sociale européenne. Le droit français "ne prévoit pas d'interdiction suffisamment claire, contraignante et précise", ni par la loi ni par la jurisprudence, a estimé le Comité européen des droits sociaux (CEDS) du Conseil de l'Europe, déplorant notamment qu'une "incertitude subsiste" sur l'existence d'un "droit de correction" reconnu par la justice française.
Le CEDS a déjà fait ce constat de violation par la France par trois fois depuis 2003. La décision de mercredi est toutefois la première découlant de la réclamation d'une ONG. Approach, une association pour la protection des enfants basée à Londres, reproche à la France une législation floue qui conduit, selon elle, à tolérer des formes légères de châtiments corporels encore trop répandus en pratique.
Le "droit de correction" pointé du doigt
Au cours de la procédure devant le CEDS, le gouvernement français a fait valoir que sa législation protégeait suffisamment les enfants contre l'usage de toute violence et que le "droit de correction" des parents ou des enseignants tendait à disparaître de la jurisprudence. Mais Approach demande une interdiction plus explicite et met en avant des décisions récentes de la justice française qui ont réaffirmé au contraire, selon elle, ce "droit de correction" controversé.
Pour la secrétaire d'Etat à la Famille, Laurence Rossignol, la France doit avoir "une réflexion collective" sur "l'utilité des punitions corporelles dans l'éducation des enfants". Mais "ça ne passera pas par la loi", a-t-elle déclaré lundi, pour ne pas "couper le pays en deux camps, ceux qui sont pour la fessée et ceux qui sont contre". "Pour les parents maltraitants, on a un Code pénal qui est là. Pour ceux qui se sont à un moment laissés aller à une punition corporelle, il faut les aider à faire autrement et pas les disqualifier en leur disant : 'Le juge va venir s'occuper de ça'", a-t-elle dit.
La France n'est pas la seule cible des critiques
A la différence des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, bras judiciaire du Conseil de l'Europe, la procédure devant le CEDS ne prévoit pas de sanction en cas de violation, mais la France n'en est pas moins tenue de se conformer à ses décisions. Un nouveau rappel à l'ordre de l'organisation apporterait de l'eau au moulin des détracteurs de la fessée en France, qui nient toute valeur éducative à cette pratique relevant, selon eux, du passé.
Dans le sillage de la Suède, pionnière en la matière, 27 des 47 pays membres du Conseil de l'Europe ont adopté à ce jour une législation interdisant les châtiments sur les enfants en toutes circonstances, sans marge d'appréciation pour les juges. L'ONG Approach a également d'autres pays que la France dans le viseur : elle a déposé des réclamations visant la Belgique, la République tchèque, la Slovénie, l'Italie et l'Irlande, pour lesquelles des décisions sont attendues fin mai au Conseil de l'Europe.
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