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Nucléaire : "On devra d'une façon ou d'une autre" construire de nouveaux réacteurs EPR, analyse un expert des énergies

Si on ne construit pas de nouveaux EPR "nous n'aurons pas d'énergie décarbonée", a estimé mercredi sur franceinfo Thierry Bros, expert des énergies et professeur à Sciences Po Paris. 

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L'EPR de Flamanville est toujours en travaux en novembre 2021. Ici, le 30 mai 2016.  (PHILIPPE CHÉREL / MAXPPP)

Pour décarboner notre électricité, "on devra d'une façon ou d'une autre" construire de nouveaux réacteurs nucléaires EPR, analyse mercredi 10 novembre sur franceinfo Thierry Bros, expert des énergies et professeur à Sciences Po Paris. Il estime que choisir entre l'énergie nucléaire et les renouvelables (éolien, solaire) revient à choisir entre "une électricité à la demande", accessible et consommable 24 heures sur 24, et une "électricité intermittente" pour les renouvelables, car la France ne dispose pas aujourd'hui des technologies et des batteries permettant de stocker l'énergie produite par les éoliennes et les panneaux solaires et photovoltaïques.

Au cours de son allocution, le mardi 9 novembre, Emmanuel Macron a annoncé la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, sans préciser explicitement qu'il s'agira d'EPR, réacteurs de nouvelle génération. Le gestionnaire du réseau électrique RTE a de son côté recommandé la construction de réacteurs type EPR dans son rapport présentant six scénarios sur l'avenir du réseau français d'ici 2050.

franceinfo : Le nucléaire est-il la seule solution aujourd'hui, le seul modèle opérationnel pour décarboner l'électricité ?

Thierry Bros : Pour décarboner, il faut soit du nucléaire, soit du renouvelable. Sauf que pour le renouvelable, il le faut avec des briques de stockage, des stockages saisonniers. Et ces grosses batteries, on ne sait pas faire. Cette technologie-là, nous ne l'avons pas. Pour faire simple, vous comparez de l'électricité à la demande, du nucléaire décarboné, avec de l'électricité intermittente, aussi décarbonée, et venant du renouvelable. Vous n'aurez de l'énergie solaire et éolienne que quand le soleil ou le vent seront présents.

Mercredi matin, sur franceinfo, l'eurodéputé écologiste David Cormand affirmait que le nucléaire est une technologie que la France n'a jamais maîtrisée, et qui est obsolète. A-t-il raison ?

Jamais maîtrisée, c'est un peu étonnant dans le pays de Marie Curie. On peut imaginer que la France est un grand pays nucléaire. On a quand même construit une centaine de réacteurs, et on a été capable de maîtriser cette énergie. Il n'y a pas eu d'accidents en France. Effectivement, on peut regretter la baisse ou la perte de compétences sur la construction du dernier EPR [à Flamanville, le premier réacteur EPR n'est toujours pas opérationnel, quatorze ans après le début du chantier]. C'est effectivement le cas. Mais on peut aussi se rappeler que les Chinois sont capables de le faire. Et puis, il va falloir reconstruire cette filière nucléaire. Mais on peut imaginer que les ingénieurs de 2020 sont aussi compétents que ceux de 1970. Dans l'énergie, il n'y a pas eu beaucoup de sauts quantiques. On utilise plus ou moins les mêmes technologies qu'en 1970.

Cela vous paraît faisable de bâtir six nouveaux EPR sur le territoire ?

On devra le faire, d'une façon ou d'une autre. Soit on le fait, et on arrive à une énergie décarbonée. Soit on ne le fait pas et nous n'aurons pas d'énergie décarbonée. L'option suivante qui est celle de la sobriété énergétique [la réduction de la consommation d'électricité] est un peu comme la baisse des impôts. Tout le monde en parle très souvent mais moi, je la vois rarement. Conduire une politique énergétique uniquement sur la sobriété conduit à la crise que l'on voit aujourd'hui. On a fermé la centrale de Fessenheim et décidé qu'il fallait moins investir dans le pétrole et le gaz, parce qu'on croyait à la sobriété énergétique. Mais comme cette demande ne baisse pas, et si elle ne baisse pas à l'avenir, comment est-ce qu'on fait ?

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