Malaise policier : "La priorité, c'est l'amélioration des conditions de travail"
Le secrétaire général du syndicat Alternative Police-CFDT, Denis Jacob, réagit au rapport parlementaire sur l'état des forces de sécurité intérieure, présentée ce mardi.
Denis Jacob, secrétaire général du syndicat Alternative Police – CFDT, a appuyé, mardi 3 juillet sur franceinfo, les conclusions du rapport parlementaire alarmant sur l'état des forces de sécurité intérieure. "La chose à faire en priorité, c'est l'amélioration des conditions de travail, a-t-il déclaré. Un fonctionnaire de police qui n'est pas bien dans son travail au quotidien ne peut pas être épanoui et bien dans sa vie privée." La commission d'enquête parlementaire qui a travaillé sur le rapport a été lancée à la suite de la vague de suicides au sein des forces de l'ordre à l'automne 2017. Ses conclusions font état d'une crise dans les forces de sécurité intérieure. Plusieurs causes l'expliquent : manque de moyens, violence qui s'exerce contre les policiers, problèmes d'organisation.
franceinfo : Dans ce rapport, on parle de malaise, on parle de découragement, on parle aussi de sentiment d'inutilité. Ce sont des mots très forts, est-ce que vous êtes d'accord ?
Denis Jacob : Je ne peux être que d'accord, parce que le rapport sénatorial fait suite aux différentes auditions qui ont pu avoir lieu depuis plusieurs mois, dont celle à laquelle j'ai participé et où on a fait état, très précisément, de ce que fait ressortir aujourd'hui le rapport sénatorial. Cette alerte, je l'avais lancée dès 2015 en disant qu'il y avait un véritable malaise des policiers, de la souffrance au travail, un parc immobilier particulièrement vétuste. Malheureusement le temps m'a donné raison, puisqu'un an plus tard, on a eu des mouvements de policiers en colère dans la rue.
Il y a des propositions qui visent surtout l'humain, une meilleure gestion des ressources humaines, plus de formation, un management plus proche du terrain. Cela veut-il dire qu'il y a là un problème, un manque d'accompagnement et de reconnaissance ?
Bien évidemment. Pour le management, j'ai proposé qu'on mette en place un management participatif. Aujourd'hui, on fixe des objectifs aux policiers mais on ne prend pas en compte le retour du terrain, l'expérience des policiers, pour savoir si les objectifs sollicités sont conduits de la bonne manière. Ça c'est le premier point. Le rapport entre hiérarchie et subordonnés pose aussi un problème, on a toujours un management archaïque, très vertical, et ça pose un véritable sentiment d'absence de reconnaissance. Sur les mesures sociales, enfin, il y a effectivement un gros problème de politique sociale au sein du ministère de l'Intérieur, notamment en matière de logement. La majorité des policiers qui arrivent en région parisienne se retrouvent déracinés de leur territoire d'origine, et doivent se débrouiller tout seuls, dans une grande majorité, pour trouver un appartement ou un logement qu'ils doivent partager avec des collègues, ou des petites chambres pas très chères, parce qu'ils n'ont pas les moyens de les payer. Sans parler des policiers, pour certains, qui dorment encore dans leurs véhicules !
Que faudrait-il faire en priorité ?
La priorité, c'est l'amélioration des conditions de travail. Un fonctionnaire de police qui n'est pas bien dans son travail au quotidien ne peut pas être épanoui et bien dans sa vie privée. Quand vous venez dans un commissariat, comme j'ai pu en visiter récemment, y compris outre-mer, à La Réunion ou en Martinique, où vous avez le sentiment de faire un bond de 30 ans en arrière, où tout est vétuste, où rien n'est entretenu et où il n'y a pas de politique de rénovation et d'entretien régulière, ça pose de réels problèmes pour travailler dans de bonnes conditions et aussi pour l'accueil du public. C'est vrai qu'on ne peut pas faire en un an ce qui n'a pas été fait en 30 ans. Il y a une part de responsabilité collective depuis ces trente dernières années, avec une absence d'anticipation sur les rénovations qui doivent être faites.
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