Logement : vers des expulsions facilitées ?
En France 10 à 20% des logements privés ne sont pas loués, principalement parce que les propriétaires craignent de tomber sur des mauvais payeurs... Cette mésaventure, Nicolas l'a expérimentée : pendant plusieurs années il a loué son appartement à une famille qui ne payait pas son loyer. Après la conciliation à l'amiable, la médiation, les joutes entre avocats, son dernier recours a été l'expulsion. Une procédure longue et coûteuse...
C'est pour relancer le marché locatif et éviter ce type de galère que la commission Attali propose d'alléger le contrat de bail : l'entrée du locataire dans les lieux serait facilitée par la limitation du dépôt de garantie à un mois de loyer (au lieu de deux actuellement) et l'exigence d'un garant se portant caution purement et simplement supprimée. En contrepartie, les propriétaires frileux seraient rassurés puisqu'ils bénéficieraient d'un régime des expulsions "sécurisé", avec des délais raccourcis. Reine-Claude Mader, secrétaire générale de la CLCV, une association de défense des consommateurs, est membre de la commission. Elle a dû batailler ferme avec les plus libéraux pour que la trêve hivernale des expulsions ne soit pas remise en cause. Finalement, le compromis atteint lui parait satisfaisant.
Les représentants des propriétaires et des locataires n'ont pas été entendus par la commission. A l'UNPI (Union nationale de la propriété immobilère), on se félicite de voir les rapports locatifs rééquilibrés au profit des bailleurs. De leur côté, les associations de défense des locataires crient au scandale : Michel Fréchet, président de la CGL (Confédération générale du logement), rappelle volontiers que seulement 3 à 4% des locataires sont indélicats et dénonce le fantasme de l'impayé de loyer. Selon lui, cette proposition favorable aux propriétaires ne résoudra rien et va à l'encontre des règles élémentaires de solidarité.
De son côté, la Fondation Abbé Pierre s'indigne du "nombre croissant d'expulsions", en augmentation de plus de 22% sur cinq ans. Des chiffres qui "illustrent une lente mais inexorable dérive sociale", pour l'association, qui souligne que "les catégories frappées d'expulsion sont de plus en plus nombreuses". La Fondation Abbé Pierre se dit inquiète, à quelques mois de la mise en application de la loi DALO (Droit au logement opposable). L'une des cinq catégories prioritaires au regard de cette loi concerne les ménages expulsés sans relogement.
Anne Jocteur Monrozier
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