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"Tournantes" de Fontenay-sous-Bois : après le verdict, le malaise

Après trois semaines de débat à huis clos, la cour d'assise des mineurs du Val de Marne a acquitté la nuit dernière 10 des 14 accusés dans l'affaire des "tournantes" de Fontenay-sous-Bois. En prenant en compte la détention provisoire, un seul des quatre condamnés part en prison. Tant du côté de la défense que du côté des parties civiles, le verdict laisse toutes les parties insatisfaites.
Article rédigé par Ludovic Pauchant
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Jean-Baptiste Quentin/LeParisien Maxppp)

Une instruction "bâclée", un "naufrage judiciaire ", un "désastre ". Treize ans après les faits, parties civiles et
acquittés expriment leur malaise
après un verdict en demi-teinte
 rendu dans la nuit de mercredi à jeudi.

Un dossier "mal instruit"

Lundi, l'avocate générale s'en était remise à la
cour pour six accusés, évoquant des "doutes " : après
le verdict, après douze heures de délibérations et l'acquittement de dix des
quatorze accusés, le sentiment que la cour d'assise des mineurs a voulu à
tout prix éviter de balayer d'un trait sept ans d'instruction "bâclée" ne se dissipe pas. Notamment parce qu'aucun des accusés
n'avaient été inquiétés pour les mêmes faits. Me Clotilde Lepetit, l'avocate
des plaignantes, évoque " les conséquences d'un dossier mal
instruit
"" les failles judiciaires "  dans
le cas d'Aurélie, une des deux victimes.

Aurélie "renvoyée à ses mensonges"

Si la cour a reconnu le statut de victime à  Nina, Aurélie, elle, selon la défense, a été "renvoyée à ses mensonges ". Ou, pour ses avocats, "pas
comprise
" : pendant tout le procès, la défense s'est employée à
expliquer que les deux jeunes femmes étaient consentantes.

Agées de 15 et 16 ans au moments des faits, perpétrés entre 1999 et 2001, les deux jeunes filles avaient décrit la honte, la peur des représailles. L'une d'elles avaient assuré aux enquêteurs être
devenue
" l'objet sexuel " de garçons," des chiens enragés " , selon ses termes. Des années plus tard, ils ont nié méthodiquement avoir violé les jeunes femmes, campant sur leurs positions, en gagnant visiblement chaque jour un peu plus
en
assurance. Jusqu'à traiter aux procès les jeunes femmes de* " menteuses, de
nymphomanes "* .

Laure Heinich,
l'avocate des plaignantes, s'indigne de la stratégie des avocats de la défense
que le verdict approuverait, de la brutalité des mots choisis pour qualifier
les supposés mensonges d'Aurélie et Nina, malmenées pendant l'audience. Avec en
toile de fond, la parole des victimes, une nouvelle fois mise en accusation.

 

 

Les acquittés se disent victimes d'une "erreur judiciaire"

Après le "calvaire " de la détention, les acquittés, eux,
s'estiment victimes d'une erreur judiciaire. "Avant de jeter
des hommes en prison, il faut se renseigner... On est incarcéré avec des
assassins.... Et en prison, les violeurs, on n'aime pas ça
", explique l'un
des acquittés, libre après six mois passés derrière les barreaux.

Pour l'avocat de l'un d'entre eux,
c'est un "fiasco parce qu'on a médiatisé cette affaire dès les
interpellations
".

 

 

Christiane
Taubira, la ministre de la Justice, a évoqué la possibilité que le parquet et
les parties civiles fassent appel. Elle a toutefois précisé qu'elle ne
donnerait aucune instruction en ce sens au parquet, estimant sur Europe1 qu'il "appartient
au parquet général et au procureur d'en discuter, d'apprécier les choses et
éventuellement de prendre cette décision
". Si les parties civiles, elles, décident de faire
appel, celui-ci, comme le prévoit la loi, ne pourra porter que sur les intérêts
civils, à l'exclusion du verdict pénal, prérogative du parquet.

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