Les aumôniers musulmans en prison : à cheval entre la religion et la société
Depuis le coup de filet
antiterroriste de samedi à Strasbourg et la mort de Jérémie Louis-Sydney, tué
pendant son interpellation, on reparle de la radicalisation des musulmans
français en prison. Le djihadiste présumé, récemment converti, se serait tourné
vers l'islam radical lors de ses deux années de prison. Pour essayer de remettre
ceux que les thèses extrémistes attirent, dans le droit chemin, il y a plusieurs cercles relationnels selon le Conseil français du culte musulman (CFCM), "la famille, l'encadrement
au sein de la détention et la présence de l'aumônier".
Chahib Choukri, est aumônier
musulman dans les prisons du grand Est, il confie ce qu'il fait lorsqu'il rencontre des détenus
tentés par le radicalisme, "on a tendance à voir quelques personnes avec
des fausses idées, avec des façons de voir un petit peu égarées. Nous les aumôniers,
on essaye tout doucement de corriger leur façon de faire" .
Le manque d'aumôniers
musulmans
Pour certains membres de la
communauté musulmane, la radicalisation pourrait être diminuée si le nombre d'aumôniers
musulmans augmentait. Le 28 septembre, le ministère de la Justice a annoncé la
création de 15 postes d'aumôniers musulmans (budget 2013), "pour
permettre l'exercice du culte" . Mais est-ce suffisant ? Selon l'administration
pénitentiaire, près d'un détenu sur deux est musulman, et les aumôniers
de cette confession sont, sans compter les créations de postes de l'an prochain, 151 pour
toutes les prisons françaises, ce qui représente 12%
des aumôniers des prisons.
En plus du nombre, Franck Fregosi, spécialiste de l'Islam
à l'université de Strasbourg, estime qu'il faut améliorer la formation. "L'aumônier est à
cheval sur la dimension religieuse (...) et doit aussi être au fait de ce qui est en
train de se passer dans la société, de ses contradictions et parvenir à faire
une sorte de synthèse entre les deux" . Selon lui, les aumôniers permettent
d'éviter que certains détenus confondent "l'adhésion à une religion avec
un espèce d'exutoire à leur propres angoisses" .
Se pose aussi la question de
la rémunération qui ne dépasse pas, selon le CFCM, "750 euros par mois" .
Quelle radicalisation dans les prisons ?
Ce phénomène de radicalisation "existe bel et
bien" pour le CFCM. Le Conseil français du culte musulman estime qu'en
prison, il y a deux types de radicalisme : "Le radicalisme idéologique qui est porté par des individus
se trouvant en prison suite à des affaires liées à leur idéologie extrémiste :
ils cherchent, par tous les moyens, à s'imposer en tant qu'imams ou leaders
autoproclamés.
Il
y a ensuite le radicalisme comportemental , exprimé
par des détenus influencés par les premiers. La majorité d'entre eux n'ont
aucune formation religieuse. Cette forme de radicalisme s'exprime par un
changement brutal de l'apparence (barbe, tenue vestimentaire, ...), mais, elle
n'altère pas l'acceptation du règlement intérieur des établissements
pénitentiaires, ni les rapports avec le personnel" .
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