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"Le racisme est sous-évalué en France, il y en a mais il est caché", selon Jean-Marie Burguburu, président de la CNCDH

"On peut dire que la France n'est pas raciste, mais hélas, il y a encore des racistes en France", a réagi sur franceinfo Jean-Marie Burguburu, président de la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme (CNCDH), après la publication d'un rapport sur les crimes et délits racistes.

Article rédigé par franceinfo
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Jean-Marie Burguburu, avocat et président de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (MARLENE AWAAD / MAXPPP)

"Le racisme est sous-évalué en France, il y en a mais il est caché", a estimé jeudi 18 juin sur franceinfo Jean-Marie Burguburu, avocat et président de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), Jean-Marie Burguburu, avocat et président de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), dont le rapport a été remis au Premier ministre. Pour lui, "on peut dire que la France n'est pas raciste, mais hélas, il y a encore des racistes en France".

Selon ce rapport, le nombre de crimes et délits à caractère raciste a augmenté en 2019. Le CNCDH a recensé 5 730 faits en un an, soit une hausse de 11% après trois années consécutives de baisse. Pour la CNCDH, "les Noirs sont les personnes avec les juifs, les mieux tolérés en France, néanmoins, les Noirs sont les plus discriminés". Le rapport dénonce "un racisme qui ne se révèle pas parce que chacun prétend qu'il n'est pas raciste et pourtant, il a parfois des comportements racistes. Ce racisme est parfois un racisme impensé, un racisme presque automatique", a insisté Jean-Marie Burguburu.

franceinfo : Il y a une forme de paradoxe avec une France peut être plus tolérante qu'avant, mais un racisme et des actes de racisme qui sont de plus en plus violents et agressifs ?

Jean-Marie Burguburu : C'est exact. Les spécialistes pratiquent les études avec un indice de tolérance et, sur cet indice, la France ne se place pas trop mal. Et notamment, puisque cette année, c'est un point qui nous intéressait sur le racisme anti-minorités noires visibles et les Noirs sont les personnes avec les juifs, les mieux tolérées en France. Néanmoins, les Noirs sont les plus discriminés. Cette discrimination, on la voit par exemple publiquement dans les stades, parfois d'une manière épouvantable, on la voit sur les réseaux sociaux, on la voit dans le logement, on la voit dans l'emploi, on la voit dans l'éducation. Cette discrimination est tout à fait contradictoire avec la tolérance dont la minorité noire fait pourtant l'objet.

Est-ce que le racisme est pris aujourd'hui pris au sérieux par les autorités, et par la société. Parce qu'on voit des manifestations, notamment ces derniers jours mais on entend beaucoup aussi une phrase. C'est que non, la France n'est pas raciste. Est-ce le cas ?

On peut dire que la France n'est pas raciste, mais hélas, il y a encore des racistes en France. Vous voyez la différence ? Notre rapport ne concerne pas l'année 2020 et les éléments récents qui sont intervenus, il concerne l'année 2019. Au cours de cette année, on a pu voir certes une augmentation des actions racistes parce qu'il y a notamment une augmentation des révélations, une augmentation des plaintes, une augmentation des condamnations. Mais pourtant, ces augmentations sont encore trop faibles. Le racisme est sous-évalué en France. Il y en a mais il est caché.

C'est un racisme qui ne se révèle pas parce que chacun prétend qu'il n'est pas raciste et pourtant, il a parfois des comportements racistes.

Jean-Marie Burguburu

à franceinfo

Ce racisme est parfois un racisme impensé, un racisme presque automatique. Cette personne est noire donc elle est moins bien qu'une personne blanche. C'est bien sûr totalement inacceptable et contraire aux lois de la République.

Est-ce que ça se traduit par une forme d'invisibilité parfois ?

Il y a une invisibilité, une double invisibilité. Il y a peut-être une invisibilité des personnes noires alors qu'elles font partie de la société française et pas seulement dans les territoires d'Outre-mer. Mais même en métropole, il y a une certaine invisibilité de ce racisme parce qu'il n'y a pas assez de plaintes. Le racisme est une infraction pénale. Lorsqu'une personne est victime d'un acte raciste, d'une injure raciste, d'un comportement raciste, il faut qu'elle puisse se plaindre. Mais il faut que les forces de police reçoivent cette plainte. Il faut qu'elle puisse se plaindre, il faut que cette plainte soit suivie. Il faut que le parquet suive. Il faut qu'il y ait une condamnation. C'est assez difficile puisqu'on remarque que si, en matière pénale, dans les affaires correctionnelles, le ton général de relaxe est de l'ordre de 7%. En matière de plaintes et d'affaires qui viennent devant le tribunal, le taux de relaxe monte à 16 %. Donc voyez-vous, soit les procureurs, soit les juges ne sont pas convaincus qu'il y a matière à condamnation en matière de racisme. Or, il y a trop souvent matière en condamnation. Si on a obtenu preuve.

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