Affaire Cahuzac : ce que l'on sait, ce qu'il reste à élucider
Qu'est-ce que Jérôme Cahuzac a reconnu ?
Dans
la déclaration qu'il a publiée sur son blog mardi après-midi, Jérôme Cahuzac a
reconnu l'existence d'un compte bancaire à l'étranger dont il est bénéficiaire
"depuis une vingtaine d'années ". Ce
compte, selon Jérôme Cahuzac, contient environ 600.000 euros. Dans le même temps, l'ancien
ministre a rencontré les deux juges d'instruction en charge de l'affaire,
Renaud Van Ruymbeke et Roger Le Loire, pour avouer les faits : "j'ai demandé à Messieurs les juges d'instruction de
bien vouloir me recevoir afin que, délivré des obligations de ma fonction, je
puisse enfin donner les explications qui s'imposent ".
Pourquoi a-t-il fini par avouer ?
Ce
serait une perquisition de la justice suisse dans les banques concernées qui
aurait précipité les choses. Saisi d'une demande d'entraide pénale
internationale de la part de la France, le ministère public genevois a lancé une enquête. "Jérôme Cahuzac,
alerté par son avocat qui avait accès au dossier, a appris que les
perquisitions avaient lieu. Il a donc compris qu'il fallait en tirer les
conséquences ", explique Alexis Favre, journaliste au quotidien suisse Le
Temps .
> Lire notre article : La justice suisse aurait précipité
l'affaire Cahuzac
Que risque-t-il ?
Après
ses aveux, Jérôme Cahuzac a été mis en examen pour blanchiment de fraude
fiscale. Ce motif de mise en examen (à ne pas confondre avec la fraude fiscale)
est passible de cinq ans de prison et de 375.000 euros d'amende, selon
l'article 324-1 du code pénal. Mais la peine pourrait s'alourdir si l'ancien
ministre du Budget est également poursuivi pour fraude fiscale (ce qui semble
peu probable si l'on se réfère aux conditions de prescription des faits), la
peine maximale pourrait alors passer à sept ans d'emprisonnement et 1.000.000 euros d'amende.
> Lire notre article : Compte à l'étranger : ce qu'encourt
Jérôme Cahuzac
Cache-t-il encore des choses ?
Il
reste en effet de nombreuses zones d'ombre. En particulier sur la relation
entre les comptes présumés de Jérôme Cahuzac en Suisse et ceux à Singapour. Le
témoignage d'un banquier suisse serait très important à ce sujet, selon Antoine
Peillon, journaliste spécialiste de l'évasion fiscale : "C'est un
conseiller financier parisien, lié à un office financier genevois, qui crée des
comptes anonymes chez UBS à Genève. En 2010, parce que la loi change un peu, on
exporte ces comptes à Singapour. Tout ceci se fait avec des sociétés écran de
façon à créer des rideaux de fumée. Mais tout ceci est atteignable par la
justice ".
"L'investigation
des juges d'instruction nous réserve encore d'importantes surprises ",
assure Antoine Peillon. D'autant plus que Jérôme Cahuzac n'a encore rien dit
sur ce qui lui est reproché concernant le second chef d'accusation.
En quoi consiste l'autre volet de l'affaire ?
Jérôme
Cahuzac est également mis en examen pour "blanchiment de fonds
provenant d'avantages procurés par une entreprise dont les services ou produits
sont pris en charge par la sécurité sociale ". Un motif de mise en
examen complexe, mais qui concerne les liens de Jérôme Cahuzac avec des
laboratoires pharmaceutiques qu'il conseillait, entre 1993 et 1997 ; il se
serait alors appuyé sur des contacts tissés alors qu'il était conseiller
technique auprès du ministre de la Santé Claude Evin, entre 1988 et 1991.
La DCRI avait-elle prévenu l'Elysée ?
C'est
la question que se posent la presse et l'opposition politique depuis les
aveux De Jérôme Cahuzac. François Hollande et Jean-Marc Ayrault avaient-ils connaissance de
l'existence du compte à l'étranger de l'ancien ministre ? C'est en tout cas ce que
suggère un article publié dans le Point , qui évoque une note blanche de la DCRI
transmise à l'Elysée dès décembre. Selon M6, le 4 décembre 2012, soit dès les
premières révélations de Mediapart, le ministère de l'Intérieur aurait demandé
à la DCRI de vérifier l'enregistrement sonore attribué à Jérôme Cahuzac.
Dans
les 48 heures qui ont suivi, les services de la DCRI auraient établi qu'il ne
s'agissait pas d'un montage, et que la voix entendue était "probablement "
celle de Cahuzac. Après une enquête fiscale, une note de synthèse serait
remontée au ministère de l'Intérieur puis à l'Elysée fin décembre, toujours
selon M6. Manuel Valls, ce jeudi matin, a assuré qu'il "n'y a eu aucune
note de la DCRI. Mon rôle n'est pas de déclencher des enquêtes, c'est le rôle
de la justice ".
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