Affaire Boulin : de nouveaux témoignages accréditent la thèse de l'assassinat
"20 Minutes" et France Inter révèlent des témoignages inédits sur la mort du ministre du Travail Robert Boulin, dont le corps avait été découvert dans un étang de Rambouillet, en octobre 1979.
Ces témoins mettent à mal la thèse officielle. France Inter et 20 minutes révèlent de nouveaux témoignages troublants dans l'enquête sur la mort de Robert Boulin, ministre du Travail du gouvernement de Raymond Barre, dont le corps avait été retrouvé dans un étang, dans la forêt de Rambouillet (Yvelines), en 1979. Ce sont les premiers témoignages recueillis depuis la réouverture du dossier par une juge d'instruction, en septembre 2015.
Qu'est-ce que "l'affaire Boulin" ?
C'est le nom donné à l'enquête qui a suivi la mort de Robert Boulin, plusieurs fois secrétaire d'Etat, puis ministre, sous les présidences de De Gaulle, Pompidou et Giscard d'Estaing.Il est très apprécié du grand public et son nom circule pour remplacer Raymond Barre à Matignon dès 1978. A l'automne 1979 toutefois, l'affaire de Ramatuelle éclabousse l'homme réputé intègre : il est soupçonné d'avoir demandé des passe-droits pour l'un de ses amis, pour acquérir un terrain dans le Var. Robert Boulin dément toutes les accusations.
Le 30 octobre 1979 au matin, alors ministre du Travail de Raymond Barre, son corps est retrouvé dans un étang peu profond de la forêt de Rambouillet, dans les Yvelines. Son véhicule personnel est garé un peu plus loin. L'enquête conclut très vite à un suicide par noyade, causé par une dépression, conséquence de l'affaire de Ramatuelle. Mais la famille Boulin est convaincue que le ministre a été assassiné. Convaincue qu’il s’agissait d’un suicide, la justice rend un non-lieu en 1991.
Il a fallu l'acharnement de Fabienne Boulin-Burgeat, fille du ministre, qui est allée jusqu'à se tourner vers la CIA, pour que la justice décide de rouvrir le dossier en septembre 2015.
Que disent exactement ces nouveaux témoins ?
C'est la juge d'instruction Aude Montrieux, qui a recueilli les nouveaux témoignages. A commencer par celui d'un médecin réanimateur, de garde avec les pompiers le jour de la découverte du corps de Robert Boulin, mais qui n'a "jamais été entendu dans l'enquête initiale", selon France Inter. "Tout de suite, ce qui nous a sauté à l’idée, c’est qu’il était dans l’eau, mais pas dans la position d’un noyé", explique-t-il. "Il était à quatre pattes, un bras en l’air et un autre vers le bas (…) Vu sa position dans l’eau, ce n’était pas possible que ce soit un suicide", assure-t-il. D'après lui, Robert Boulin, qu'il n'a pas reconnu sur le champ, avait des ecchymoses au visage, des éraflures et "une bosse au niveau du dos".
Un autre témoin, présenté comme un "habitant de la région", explique à la juge avoir vu Robert Boulin, accompagné, quelques heures avant sa mort. Au volant de sa voiture, il a croisé une "Peugeot 305" (voiture personnelle du ministre) et reconnu à l'intérieur "M. Boulin à la droite du chauffeur et autre autre personne à l'arrière, que je voyais distinctement parce qu'il était placé entre les deux sièges avant". "Ce n’étaient pas des personnes détendues et gaies", précise-t-il, en décrivant des "visages fermés", "jeunes".
Où en est l'enquête ?
De nombreux témoins doivent encore être entendus. Mais surtout Fabienne Boulin réclame une reconstitution des faits. "Cela n'a jamais été fait en 36 ans", affirme-t-elle à 20 Minutes.
Son avocate demande en outre la déclassification et la levée du secret-défense de tous les documents liés à l’affaire Boulin, auprès de Matignon, du ministère de l’Intérieur et de la Défense. "Il serait déshonorant qu’un véto politique soit donné concernant cette demande de déclassification", précise Marie Dosé. "Personne ne comprendrait que le secret-défense soit utilisé pour ne pas accéder à la vérité dans le dossier Boulin."
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