Un numéro d'écoute à destination des pédophiles devient national : "Le téléphone aide à dépasser la honte"
Gratuit et confidentiel, le 0 806 23 10 63, déjà expérimenté dans quelques régions depuis un an, vise à aider les personnes attirées sexuellement par les enfants, pour éviter des passages à l’acte.
C'était l'une des mesures du plan de lutte contre les violences faites aux enfants, dévoilé par le secrétaire d’Etat en charge de la protection de l’enfance Adrien Taquet, en novembre 2019. Un numéro d’appel unique pour les pédophiles est mis en place au niveau national en France à partir de lundi 23 novembre : le 0 806 23 10 63. Cette ligne propose de l’aide aux personnes majeures qui craignent de commettre des violences sexuelles ou qui sont attirées sexuellement par les enfants. L'appel est non surtaxé et confidentiel.
Cela fait un an que ce numéro unique a été testé en France dans cinq régions (Provence-Alpes-Côte d'Azur, Centre-Val-de-Loire, Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine), auxquelles se sont ajoutés le Grand-Est et l'Ile-de-France depuis quelques mois. Plus de 250 personnes ont déjà utilisés ce service d'écoute avec en moyenne trois appels par personne. Les appels ont été réceptionnés dans les Criavs, les centres ressource pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles. Alessandra Conti, psychologue clinicienne au Criavs d’Ile-de-France a répondu à une dizaine d’appels. "Le téléphone ça aide à dépasser la honte qu'on peut avoir à parler de ses phantasmes à une personne physique, explique-t-elle. C'est une démarche très difficile pour les appelants, a-t-elle noté. Une détresse qui s'exprime par les silences parfois, et puis une détresse nommée d'autres fois."
"Ce sont des appels à l'aide."
Alessandra Conti, psychologue au Criavs d'Ile-de-Franceà franceinfo
Et l’aide proposée peut varier : consultation de divers thérapeutes, psychologues, sexologues, psychiatres. Ceux-ci peuvent envisager un traitement médicamenteux, des antidépresseurs, parfois des hormones inhibiteurs de libido. Il y a des solutions, assure le Dr Walter Albardier, psychiatre, qui dirige le Criavs francilien. "On a beaucoup de gens qui ont vécu eux-mêmes des traumatismes sexuels, en particulier dans l'enfance, et le traitement de ce traumatisme va beaucoup pouvoir améliorer les choses, faire reprendre pour certains une sexualité plus ordinaire, explique le psychiatre. On a beaucoup de gens qui sont pédophiles et qui ont choisi un objet sexuel infantile juste parce qu'ils n'arrivent pas à avoir accès à d'autres objets sexuels. Pour certains, il peut y avoir un problème d'éducation, de rapport à ce qu'est un enfant."
"On peut guérir de la pédophilie"
Walter Albardier, psychiatre et directeur du Criavs francilienà franceinfo
Le credo de ces professionnels, c’est que plutôt que de prévenir la récidive, mieux vaut éviter le premier passage à l’acte. "Parmi les patients que je suis en prison, et qui donc ont agressé sexuellement des mineurs, ce n'est pas rare que certains me disent qu'ils avaient repéré qu'ils avaient une difficulté, qu'ils avaient cherché de l'aide, qu'il n'en ont pas trouvé, et que leur situation s'est aggravée, et est allée crescendo jusqu'au passage à l'acte", explique Anne-Hélène Moncany, psychiatre et présidente de la Fédération française des Criavs. D’où l’enjeu de faire connaître ce numéro. Une campagne de communication est prévue début 2021.
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