Agressions sexuelles : Il faut accompagner "les victimes jusqu’à la judiciarisation des faits", estime le président de la Conférence des grandes écoles
Plus d'une centaine de faits de harcèlement sexuel, agressions sexuelles et viols ont été signalés par des étudiants et étudiantes de l'école d'ingénieurs CentraleSupélec.
Il faut accompagner "les victimes jusqu’à la judiciarisation des faits", estime sur franceinfo ce vendredi Laurent Champaney, président de la Conférence des grandes écoles. Jeudi, le parquet d'Évry a ouvert une enquête préliminaire pour une centaine de faits de harcèlement sexuel, agressions sexuelles et viols au sein de l'école d'ingénieurs CentraleSupélec. Laurent Champaney propose la "mise en place des cellules d'écoute" pour que la parole des victimes se libère, sans pour autant renier les codes des grandes écoles, à savoir les soirées et week-ends d'intégration.
Que doivent faire les grandes écoles pour éviter que ces actes se produisent ?
L'Observatoire des violences sexuelles et sexistes dans l'enseignement supérieur a fait une étude en décembre 2019 avec des chiffres déjà impressionnants. Il montre qu'une étudiante sur 20 a été victime d'un viol pendant son parcours universitaire. Donc là où les grandes écoles doivent agir c'est dans la mise en place de cellules d'écoute. Ces cellules d'écoute sont nécessaires, mais il faut avoir une très grande diversité de personnes pour entendre les jeunes. Parce qu'il y a des questions culturelles qui font que telle ou telle victime ne va pas s'adresser à un autre étudiant, à un personnel, à un homme… Donc on a besoin d'avoir des réseaux d'écoute où il y a une diversité de contacts pour parler et se déclarer victime.
Le rôle des directeurs d'école s'arrête donc à la mise en place de cellules d'écoute ?
Non, il va plus loin. L'important, c'est que quelques personnes se déclarent victime, pour qu'ainsi les écoles accompagnent les victimes, jusqu’à la judiciarisation des faits. Car on parle de faits qui sont des crimes, et un crime doit être traité par la justice, plutôt que d'exclure l'agresseur. Ces grandes écoles sont généralement publiques, ce qui fait que, si les directeurs sont au courant d'un cas, ils ont l'obligation de faire une déclaration au procureur de la République. Car notre priorité, c'est d'aider et d'accompagner les victimes.
Certains disent qu'il faut arrêter d'organiser des soirées et week-end d'intégration, ou alors bannir l'alcool, vous êtes d'accord ?
D'une part, les soirées et week-ends d'intégration sont très contrôlés, donc le problème ne vient pas toujours de là. Mais plutôt dans la culture du consentement. Car le lieu le plus courant des agressions, c'est dans la vie de tous les jours, dans les petites soirées improvisées au sein d'une résidence universitaire. En plus, le contexte d'un campus, avec des gens qui sont ensemble toute la journée, et qui sont ensemble dans les résidences le soir, fait que c'est compliqué de se déclarer victime. Parce qu'on est tout de suite sous le regard des autres et surtout de son agresseur. D'autre part, on entend souvent que c'est à cause de l'alcool. Seulement, l'alcool n'explique pas ces actes, ça peut être un déclencheur bien sûr. Donc, il y a un travail à faire dans toute la société française sur la culture du consentement et sur le respect de la personne.
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