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Affaire Patrick Poivre d'Arvor : où en sont les procédures judiciaires après les accusations de harcèlement et de violences sexuelles visant le journaliste ?

L'émission "Complément d'enquête" de France 2 diffuse, jeudi soir, une enquête sur l'ancien présentateur de TF1, accusé par plus de 20 femmes. 

Article rédigé par franceinfo
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Le journaliste et écrivain Patrick Poivre d'Arvor lors des obsèques du journaliste Philippe Gildas, le 5 novembre 2018, à Paris.  (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

L'affaire Patrick Poivre d'Arvor se poursuit. Une nouvelle femme a porté plainte pour "viol" à l'encontre de l'ancien présentateur du journal de 20 heures de TF1, mercredi 27 avril à Paris, a appris "Complément d'enquête" auprès de la plaignante. Contacté par franceinfo et l'équipe de l'émission de France 2, le parquet de Nanterre précise que la plainte est actuellement à l'étude. 

La plainte porte sur des faits qui datent de 1995, dans le bureau de PPDA, selon la plaignante, âgée de 24 ans à l'époque. "Il m'a basculée avec ses mains sur la moquette. Mon corps était là, mais moi je n'étais plus là. Il a enlevé mon pantalon, il a enlevé son pantalon, et il m'a violée", affirme-t-elle auprès de "Complément d'enquête", qui diffuse jeudi soir un sujet sur l'ex-présentateur

Selon un communiqué mercredi de l'association #MeTooMédias, fondée par des femmes accusant le journaliste de harcèlement sexuel ou de violences sexuelles, "à ce jour, 26femmes se sont adressées aux autorités et 16 plaintes ont été déposées contre Patrick Poivre d'Arvor, dont 7 pour 'viol'". L'ancienne figure du JT de TF1 conteste fermement ces accusations. Franceinfo revient sur les suites judiciaires données à ces plaintes, et sur les actions pour "dénonciation calomnieuse" enclenchées par le journaliste et écrivain. 

De février à juin 2021 : une première enquête visant PPDA classée sans suite

L'affaire Patrick Poivre d'Arvor débute en février 2021. L'autrice Florence Porcel l'accuse alors de deux viols : un rapport sexuel non consenti en 2004 et une fellation forcée en 2009. Elle décide de porter plainte contre l'ancien présentateur. Une enquête préliminaire pour "viols" est ouverte et confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) de la préfecture de police de Paris. Pendant quatre mois, outre Florence Porcel, 22 femmes sont entendues par la BRDP. Huit d'entre elles témoignent en novembre dans Libérationaccusant le journaliste de harcèlement sexuel, d'agression sexuelle ou de viol. Elles dénoncent un "schéma de domination" qui "mêle abus de pouvoir et sentiment de toute-puissance, écrasement des plus faibles et silence complice". Plusieurs femmes qui ont témoigné auprès de la BRDP portent plainte. 

Le 25 juin, le parquet de Nanterre annonce, dans un communiqué, avoir classé sans suite l'enquête pour "viols" visant PPDA, pour des raisons de "prescription" ou "d'insuffisance de preuves""Les faits de viols dénoncés par Florence Porcel et cinq autres femmes, dès lors qu'ils sont antérieurs au 1er mars 2007, s'analysent comme étant prescrits car commis depuis plus de dix ans à la date de l'entrée en vigueur de la loi étendant le délai de prescription de ce crime à vingt ans, développe le parquet. La même analyse s'impose au sujet des faits d'agressions sexuelles ou de tentatives d'agressions sexuelles dénoncés par six autres femmes, qui se prescrivaient au bout de trois ans jusqu'en 2017 et de six ans depuis cette loi." 

En parallèle de la prescription, la procureure de Nanterre, Catherine Denis, déclare que l'accusation de viol en 2009 portée par Florence Porcel ne peut "caractériser le crime de viol dans la mesure où aucun élément ne permet de confirmer les propos de l'un ou de l'autre concernant l'existence de cette scène (...). Les autres éléments de la procédure ne permettent pas non plus d'établir, à supposer que le rapport sexuel contesté ait eu lieu, l'élément intentionnel caractérisé par l'absence de consentement de la victime et sa perception par le mis en cause."

Enfin, pour les accusations de harcèlement sexuel "décrits par quatre femmes commis avant 2012, ceux-ci n'étaient pas constitutifs d'une infraction pénale avant la loi du 6 août 2012 qui a créé ce délit", précise le parquet. "D'autres agissements similaires non prescrits n'ont pas suffi à caractériser le délit de harcèlement sexuel ou d'appels téléphoniques malveillants", poursuit le communiqué.

Juin 2021 : une plainte de PPDA pour "dénonciation calomnieuse" classée sans suite 

Après la première plainte de Florence Porcel à son encontre, Patrick Poivre d'Arvor avait lui aussi porté plainte contre l'autrice pour "dénonciation calomnieuse". Cette plainte avait été classée sans suite, "faute de démontrer formellement l'intention de nuire que suppose cette infraction", avait déclaré le parquet dans son communiqué, le 25 juin. 

Décembre 2021 : une nouvelle instruction sur les accusations de Florence Porcel

Dans la lignée de cette décision, Florence Porcel annonce son intention de porter plainte avec constitution de partie civile, ce qui ouvre la voie à l'ouverture d'une information judiciaire, l'enquête menée par un juge d'instruction permettant de déterminer l'existence d'une infraction. 

"Les nombreux éléments matériels transmis au parquet établissent l'existence d'indices graves et concordants qui justifient pleinement l'ouverture d'une information judiciaire. En outre, certains actes d'enquête essentiels n'ont pas été réalisés ce jour", dénoncent les avocats de l'écrivaine. 

Une instruction est ainsi ouverte le 15 décembre, afin d'enquêter de nouveau sur les accusations de viol en 2009 portées par Florence Porcel et classées, jusqu'à présent, pour "insuffisance de preuves". Contacté par franceinfo, le parquet de Nanterre confirme que l'information judiciaire est toujours en cours. 

Décembre 2021 : une deuxième enquête ouverte contre PPDA

Deux nouvelles plaintes, l'une pour "viol", l'autre pour "agression sexuelle", visent PPDA en décembre 2021. Une femme accuse le journaliste de l'avoir violée dans une chambre lors du Festival de Cannes, en 1985. L'autre plaignante affirme que l'ancien présentateur l'a embrassée de force au Club Med à Valmorel (Savoie) en 2013. Elles avaient toutes les deux 23 ans à l'époque des faits. 

Une semaine plus tard, le parquet de Nanterre ouvre une enquête sur la première plainte, pour une accusation de viol en 1985, visant Patrick Poivre d'Arvor. Celle-ci est menée par les magistrats du parquet. "Ma cliente reçoit comme l'expression d'une considération cette ouverture d'enquête alors que les faits sont prescrits, preuve que son courage n'a pas été vain", réagit auprès de l'AFP l'avocate de la plaignante, Laure Heinich. 

Avril 2022 : vers une enquête pour "dénonciation calomnieuse" après une plainte de PPDA

PPDA a ensuite porté plainte pour "dénonciation calomnieuse" à l'encontre de 16 femmes l'accusant de harcèlement sexuel ou de violences sexuelles. Une plainte classée sans suite en février, selon les informations de "Complément d'enquête".

Deux mois plus tard, PPDA décide de porter plainte avec constitution de partie civile, cette fois, pour "dénonciation calomnieuse" à l'encontre de ces 16 femmes, une procédure entraînant presque systématiquement la saisine d'un juge d'instructionL'association #MeTooMédias dénonce dans un communiqué "des procédures bâillon de la part de Patrick Poivre d'Arvor comme des tentatives d'intimidation visant à décourager les victimes, qui ne se sont pas encore manifestées auprès des autorités, d'entreprendre cette démarche douloureuse et difficile". "J'attends que la procédure bâillon se transforme en procès et qu'on puisse toutes défiler à la barre", réagit sur Twitter Hélène Devynck, vice-présidente de l'association. 

En parallèle, l'ancien présentateur de TF1 a porté plainte pour "diffamation publique" contre Le Parisien, après que le journal a révélé la plainte de Florence Porcel le visant. 

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