Affaire Joël Guerriau : trois questions sur la soumission chimique
L'affaire Joël Guerriau, du nom de ce sénateur soupçonné d'avoir drogué la députée Sandrine Josso pour l'agresser sexuellement, met en avant la question de la soumission chimique. "Un fléau" sur lequel veut sensibiliser Sandrine Josso. "On peut tous subir ce que j'ai subi", estime la députée qui a pris la parole lundi dans l'émission "C à vous" sur France 5.
1 Qu'est-ce qu'on entend par "soumission chimique" ?
La "soumission chimique" est inscrite dans le Code pénal à l'article 222-30-1 comme "le fait d'administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes" afin de porter atteinte à son intégrité physique. La plupart du temps pour commettre une agression sexuelle. Elle est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
Cette notion de "soumission chimique" a vraiment émergé dans les années 1990 quand est apparue dans les médias ce qu'on a appelé la "drogue du violeur", le GHB, drogue sous forme liquide, de poudre ou de gélule, souvent ajoutée à la dérobée dans les verres des futures victimes. C'est dans le milieu de la nuit (club, soirée, rave party) que ce phénomène a été identifié. Les victimes parlent de "trou de mémoire", de "grande fatigue" après avoir ingéré ces substances qui peuvent être aussi de la MDMA, et des produits que l'on retrouve dans des millions de foyers français, comme les somnifères ou les anxiolytiques.
2 Qui sont les auteurs de ces soumissions chimiques ?
D'après les spécialistes de cette question, la "soumission chimique" est souvent commise par une personne qui connait la victime et dans un cadre privé : famille, couple ou connaissances. Il y a ces cas de femmes droguées par leurs conjoints, qui vont ensuite abuser d'elles ou dans certains cas extrêmes les livrer à d'autres personnes. Il y a eu aussi des cas de soumission chimiques dans le milieu des films pornographiques.
Il faut savoir que les victimes peuvent être de tous âges, de tous genres, toutes tendances sexuelles. "Malheureusement, ça peut être partout, tout le temps. Il n'y a pas de victime cible, explique sur franceinfo Caty Richard, avocate pénaliste. La soumission chimique, ce n'est pas seulement le GHB en boîte de nuit. C'est aussi au quotidien. Je pense à une gamine qui est invitée à une soirée pyjama chez une copine. Le grand frère est là, il fait boire les deux et il abuse de la copine." Depuis une loi de 2018, la "soumission chimique" est devenue une circonstance aggravante du viol.
3 Est-ce qu'on a une idée du nombre d'agressions ?
On peut juste parler du nombre de signalements suspects. Chaque année, plusieurs centaines ce cas sont recensées par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Il y a eu 727 signalements en 2021, contre 539 en 2020. Même si on assiste à une libération de la parole, le phénomène est sous-estimé car les victimes ne sont pas toujours conscientes d'avoir été droguées et abusées.
Et quand elles en sont conscientes ou qu'elles ont des doutes, les analyses doivent être faites rapidement car la plupart de ces substances disparaissent de l'organisme en quelques heures. Quoi qu'il en soit, pour une victime, il est conseillé d'en parler à ses proches, d'appeler le 15 ou le 17, afin de rapidement faire des analyses et porter plainte.
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