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Suppression de l'ENA : "Tout ça pour ça", s'étonne Daniel Keller, président de l'association des anciens élèves de l'ENA

"L'ENA était un bouc émissaire facile", déplore Daniel Keller qui pointe que la seule nouveauté, hormis le changement de nom, est l'obligation d'être sur un poste dit "opérationnel" pendant deux à trois ans pour les nouveaux diplômés.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Daniel Keller, le président de l'association des anciens élèves de l'Ena, sur franceinfo le 18 février 2020. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

"Transformer l'ENA pour créer l'INSP… Tout ça pour ça, ça ne peut que surprendre", a déclaré mercredi 2 juin sur franceinfo Daniel Keller, président de l'association des anciens élèves de l'ENA. Ce mercredi 2 juin doit être actée en conseil des ministres la fin de l'École nationale d'administration (ENA) au profit de l'Institut national du service public (INSP). La prestigieuse école, qui fournit depuis 40 ans au pays ses plus hauts dirigeants, y compris quatre des six derniers présidents dont Emmanuel Macron, était devenue le symbole d'un entre-soi au pouvoir - "l'énarchie". En avril 2019, à l'issue du grand débat national post crise des "gilets jaunes", Emmanuel Macron avait créé la surprise en annonçant "la suppression de l'ENA" et la fin des grands corps (Conseil d'État, Cour des Comptes, Inspection des finances, Mines, Ponts etc.).

franceinfo : Il n'aurait pas fallu toucher à l'ENA, d'après vous ?

Daniel Keller : L'association des anciens élèves n'a pas de blocage par rapport aux évolutions, dans la mesure où l'ENA est une école qui s'est déjà beaucoup réformée dans son histoire. Mais transformer l'ENA pour créer l'INSP… Tout ça pour ça, ça ne peut que surprendre.

L'INSP formera toujours des cadres de l'État, avec un tronc commun pour 14 écoles du service public. À la sortie, les diplômés seront envoyés sur le terrain pendant deux à trois ans. C'est trop compliqué ?

Le grand changement, ce sont les règles de sortie de demain : tous les récipiendaires devront rejoindre le corps des administrateurs d'État pour exercer des fonctions dites opérationnelles. On ne peut pas s'insurger contre une telle mesure. Je crois que le sens de l'efficacité opérationnelle des hauts fonctionnaires est quelque chose d'essentiel. Mais je rappelle que l'ENA, jusqu'à présent, préparait à divers métiers, que ces métiers répondent à des exigences de professionnalisme et de formation. Il ne faut pas perdre de vue que l'État a besoin de hauts fonctionnaires sur le terrain, dans la magistrature administrative et financière, pour contrôler et inspecter, pour donner aux citoyens les garanties qu'ils attendent du bon fonctionnement de l'État. Il ne faudrait pas que cette mécanique subtile qui fonctionnait plutôt bien soit d'un seul coup déréglée.

"Je crois qu'il y a une règle dont on ne doit pas s'affranchir : c'est que l'État n'est pas à la disposition de tel ou tel gouvernement. L'État est au service des citoyens."

Daniel Keller, président de l'association des anciens élèves de l'ENA

à franceinfo

On doit toujours veiller à modifier les règles d'organisation d'une main tremblante parce qu'encore une fois, les hauts fonctionnaires sont les serviteurs de l'intérêt général.

Pensez-vous qu'Emmanuel Macron a voulu un symbole en transformant de cette façon l'ENA, après la crise des "gilets jaunes", et le reproche fait aux élites "hors sol" ?

Le symbole, il est clair. C'est vrai que l'ENA était un bouc émissaire facile, dans le contexte de crise que vit le pays aujourd'hui. Je ne suis pas sûr que la réponse sera à la hauteur des attentes et des espoirs des uns et des autres. Les élites "hors sol", c'est encore une fois un faux procès. On ne peut pas mettre sur le dos des quelques milliers d'énarques parmi les cinq millions et demi de fonctionnaires les errements politiques que nous connaissons depuis des décennies.

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