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Fronde contre les rythmes scolaires : quelles portes de sortie ?
Alors que le gouvernement est confronté à une série de mobilisations contre la réforme de Vincent Peillon, des options émergent pour tenter de calmer la colère.
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Les partisans de la réforme des rythmes scolaires sont-ils rares ou silencieux ? Le ministère de l'Education nationale, qui a publié un rapport d'étape la semaine précédente, s'accroche à la seconde option. Selon ses chiffres, 93,5% des 4 000 communes passées à la semaine de quatre jours et demi en septembre 2013 n'ont "aucune difficulté" à signaler. Les détracteurs, pourtant, se font de plus en plus entendre. Entre la grève des animateurs à Paris, mardi 12 novembre, le "boycott" des parents d'élèves mercredi et le mouvement des enseignants, jeudi d'abord, puis le 20 novembre, la mobilisation est rythmée. Signe inquiétant pour Vincent Peillon : le SNUipp, principal syndicat du primaire, jusqu'ici modéré sur la réforme, n'exclut pas d'appeler à une grève début décembre.
A quelques mois des municipales, l'exécutif ne peut plus rester sourd à cette vague de protestation contre une des réformes phares du quinquennat. Et cherche des portes de sortie.
Aménager la réforme en maternelle
Il s'agit de la première des concessions. Vincent Peillon doit formaliser, mercredi, des recommandations sur les rythmes en maternelle. C'est là où l'application de la réforme génère les plus fortes critiques. Siestes écourtées, problème de frontières entre le scolaire et le périscolaire, confusion entre les différents interlocuteurs... Les élèves de petite section, tout particulièrement, peinent à s'y retrouver. Plusieurs écoles ont d'ailleurs déjà revu leur copie et ne réveillent plus les enfants l'après-midi pour participer aux activités.
Le texte du ministre, présenté au comité de suivi de la réforme (composé de représentants d'enseignants, d'élus, et de parents), va dans ce sens, et invite à s'inspirer des "meilleures pratiques" identifiées dans les établissements qui ont adopté la réforme à la rentrée 2013. Afin que les enfants se repèrent mieux dans les lieux destinés aux différentes activités - scolaires ou périscolaires - et identifient mieux les intervenants (enseignants, agents des écoles maternelles, animateurs), il préconise, par exemple, des repères matérialisés au sol avec des flèches de couleur. Ou encore des affichages de type trombinoscope dans l'école, voire dans les classes.
Les élèves doivent aussi être informés des règles de vie qui peuvent varier selon qu'ils sont en temps scolaire ou périscolaire, et qui relèvent "de la responsabilité des équipes pédagogiques et éducatives". Des règlements et des chartes efficaces sont observés dans plusieurs académies, selon le ministère.
Les limites. Faute d'espace suffisant, notamment à Paris, enseignants et animateurs vont devoir, de toute façon, continuer à se partager la classe. Pas toujours évident, dans ce cas, de faire le distinguo entre les temps scolaire et périscolaire. Dans d'autres villes, l'organisation retenue par la mairie ne facilite pas une alternance claire. "Avec le décret actuel, c'est, dans bien des endroits, mission impossible", avec des après-midi "coupés en trois", temps scolaire, périscolaire, puis garderie pour ceux qui restent après 16h30, déplore Sébastien Sihr, du SNUipp-FSU. Il souligne que les enfants de maternelle "ont besoin de repères stables et structurants". Le secrétaire général va plus loin : il propose de discuter de la possibilité de rester à la semaine de quatre jours en maternelle ou de concentrer les trois heures d'activités périscolaires sur un après-midi. Mais le gouvernement n'envisage pas une telle option pour le moment.
Reporter (encore) d'un an
Seules 4 000 communes, soit 17%, ont appliqué la réforme dès la rentrée 2013, les autres préférant sauter le pas en 2014. En novembre 2012, lors du congrès des maires de France, François Hollande avait annoncé la possibilité pour les communes d'attendre la rentrée 2014 pour mettre en œuvre les nouveaux rythmes scolaires. Cette fois, le président de la République ne fera pas le déplacement au congrès, prévu du 19 au 21 novembre, selon Le Figaro. Laissera-t-il le soin à son Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, d'accorder un nouveau report ?
Car si la communauté éducative est mobilisée, les municipalités ne le sont pas moins. Surtout en cette période pré-électorale. Regroupés en collectif, cinquante maires, essentiellement de droite ou sans étiquette, appellent ainsi au boycott de la réforme "en l'état". Comme le relève Libération, l'objectif de cette fronde soutenue par Valérie Pécresse, députée UMP des Yvelines, est de mettre la pression sur le gouvernement avant le congrès des maires. Selon l'ancienne ministre, la pétition réclamant "le libre choix pour les maires" d'appliquer ou non la réforme a recueilli près de 10 000 signatures.
Nerf de la guerre, le financement de la réforme. Début octobre, l'Association des maires de France en a évalué le coût à 150 euros annuels par enfant et a chiffré "entre 600 et 800 millions d'euros" en année pleine le surcoût généré par le retour à la semaine de quatre jours et demi. Ainsi que le précise Le Figaro, les édiles s'inquiètent de voir que le fonds d'amorçage de 250 millions d'euros mis à disposition par l'Etat a déjà été utilisé à hauteur de 170 millions en 2013. Ce soutien financier doit être reconduit en 2014, mais son montant n'a pas été précisé. Comment va-t-il être abondé, alors même que le gouvernement prévoit de nouvelles économies ? "En laissant une année supplémentaire", confient certains élus au quotidien.
Les limites. Un nouveau report ne va-t-il pas fragiliser un peu plus l'esprit de la réforme et surtout son porte-flambeau, Vincent Peillon ? D'autant que ce dernier doit poursuivre la refonte des rythmes, en s'attaquant au secondaire, et mener à bien d'autres dossiers potentiellement explosifs, comme la révision des programmes. Si le ministre "a fait une erreur", ce serait judicieux de reculer d'un an, juge dans Le Parisien Paul Raoult, président de la principale fédération de parents d’élèves, la FCPE (classée à gauche). Selon lui, cette réforme à deux vitesses a accentué le cafouillage. Elle a aussi offert une fenêtre de tir idéale à l'opposition, qui dispose désormais d'une marge de manœuvre en vue des municipales.
Changer de ministre de l'Education
Vincent Peillon va-t-il payer de son poste sa première réforme ? Certains le voient déjà parti. "Comme Vincent Peillon est sur le départ, nous demandons un rendez-vous à François Hollande", a ainsi lancé Jean-Michel Fourgous, le maire (UMP) d'Elancourt (Yvelines), à l'origine de la pétition des maires. Si le ministre de l'Education affiche sa détermination, sa décision de se présenter comme tête de liste aux européennes de mai 2014 dans la circonscription du Sud-Est est interprétée par certains comme le signe d'un repli. Vincent Peillon a beau assurer qu'il restera ministre en cas de victoire, nombreux sont ceux, au Parti socialiste, à penser qu'il "se cherche un refuge si la fronde organisée par la droite sur les rythmes scolaires prend de l'ampleur", écrit Le Monde.
Les limites. Selon le quotidien du soir, Matignon voit d'un mauvais œil cette candidature, car elle risque de nationaliser une "campagne estimée périlleuse pour le gouvernement". Et d'après L'Express, Jean-Marc Ayrault tenterait même de convaincre François Hollande d'interdire aux ministres de se présenter aux municipales ou aux européennes, afin d'éviter un remaniement contraint.
Faut-il y voir le signe que Vincent Peillon a toujours sa place au gouvernement ? Son remplacement ne serait pas tâche facile, alors que le portefeuille est réputé ardu. Selon Le Figaro, une rumeur rue de Grenelle donne l'ancienne ministre à l'Enseignement scolaire Ségolène Royal comme possible successeur. Mais un éventuel "retour de la 'maîtresse'", comme l'écrit le journal, fait déjà grincer les dents des syndicats. En outre, un changement de ministre impliquerait une remise à plat du dossier des rythmes. Et signerait un recul pour le chef de l'Etat, qui a fait de cette réforme l'une des pierres angulaires de son programme pour l'éducation.
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