Témoignages "C'est mettre en échec des élèves dès le début de l'année" : pourquoi certains enseignants sont entrés en "résistance pédagogique" contre les évaluations nationales

Depuis cette année, tous les niveaux de classes élémentaires doivent être soumis à une évaluation nationale. Une mesure contre laquelle protestent certains enseignants.
Article rédigé par Noémie Bonnin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un enseignant s'adresse à ses élèves dans une salle de classe le jour de la rentrée dans une école élémentaire de Mulhouse (Haut-Rhin), le 4 septembre 2023. Photo d'illustration. (SEBASTIEN BOZON / AFP)

Vendredi 20 septembre est le dernier jour pour que les enseignants fassent passer les évaluations nationales aux élèves de toutes les classes élémentaires. C'est une première : pendant longtemps ce n'était que pour les CP et CE1. Elles ont été ajoutées l'année dernière pour les élèves de CM1 et cette année, elles concernent donc tous les niveaux.

Mais ces évaluations sont vivement critiquées par une partie du monde enseignant. Plusieurs syndicats, dont le Snuipp, ont appelé à ne pas les faire passer et ont organisé une journée de grève à ce sujet début septembre. Dans les faits, certains professeurs s'opposent aux consignes ministérielles et les boycottent.

Ces évaluations nationales touchent aux valeurs importantes aux yeux de ces enseignants. "Elles sont un petit peu hors sol", commente un professeur de CM1. Une ligne rouge d'après lui : "Même en CE1, il y a beaucoup d'élèves qui ne sont pas encore rentrés totalement dans la lecture. Donc les mettre face à un travail de lecture dès le début de l'année, c'est les mettre en échec tout de suite."

"C'est leur donner de mauvaises habitudes"

Ces évaluations impliquent des exigences par niveau de classe alors que l'école est organisée par cycles qui regroupent plusieurs niveaux : CP/CE1/CE2 pour le cycle 2, CM1/CM2/6e pour le cycle 3, ce qui permet justement les apprentissages sur le temps long.

Tous les élèves n'avancent pas au même rythme, rappellent ces enseignants qui critiquent aussi le champ des questions. Exemple avec la lecture ou la vitesse est mesurée, plus que la compréhension : "Ça n'a aucun intérêt. Il y a des enfants qui vont lire vite et qui ne vont pas comprendre du tout ce qu'ils sont en train de lire. C'est leur donner de mauvaises habitudes. Tout est timé, ils ont 10 secondes pour réaliser ci, une minute pour faire ça, etc...", dénonce ce professeur de CM1.

"Plus de pression, avec des menaces"

Certains parents en arrivent à faire bachoter leurs enfants pour qu'ils réussissent mieux ces tests ce qui fausse les résultats. Ces évaluations sont donc source de stress, elles prennent du temps qui pourrait être consacré aux apprentissages, dénoncent les enseignants, et vont à l'encontre de leur liberté pédagogique.

Mais refuser une consigne ministérielle n'est pas sans conséquence, pour ces agents publics, raconte ce directeur d'une grosse école francilienne : "Cette année, il y a un peu plus de pression avec des menaces : 'On va en référer à la hiérarchie, ça va apparaître dans votre dossier'. La notion de résistance est aussi dans le conseil des maîtres et dans le collectif. C'est une forme de résistance pédagogique." C'est pour ces raisons que dans certaines écoles, la décision a été prise collectivement.

Ces enseignants sont entrés en "résistance pédagogique" contre les évaluations nationales : le reportage de Noémie Bonnin

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