Mal payés, mal équipés, mal considérés, les chercheurs dépriment
Une semaine après l'adoption de la réforme du CNRS, c'est un constant inquiétant - un de plus - que dresse l'Académie des sciences, qui s'est penchée sur l'état de la recherche en France.
Dans un rapport remis à la ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse, l'Académie explique que l'attractivité des carrières de la Recherche a “gravement diminué dans notre pays”. Et son président, Jules Hoffmann, d'enfoncer le clou en indiquant que ce constat “vaut pour les chercheurs des grands organismes publics de recherche comme pour les enseignants-chercheurs de nos universités.”, et qu'il touche désormais toutes les disciplines, y compris les “voies royales”, comme les mathématiques ou la physique.
Le rapport souligne que la fuite des cerveaux n'est pas seulement due aux situations bien meilleures que se voient offrir à l'étranger les chercheurs de haut niveau (en terme de rémunération et de conditions de travail). Il existe aussi un tarissement à la source : “un nombre très insuffisant de jeunes" se dirigent vers un doctorat puis vers la recherche” et “nombre des meilleurs étudiants issus de l'université abandonnent les filières de Masters et de Doctorats pour se tourner vers d'autres formations menant à des professions plus rémunératrices”, avertissent les académiciens.
Ils préconisent quelques mesures pour tenter d'inverser une tendance qui risque de nuire, à plus ou moins long terme, aux chances de la France dans la compétition mondiale. Première chose à faire, augmenter les rémunérations. Seconde priorité, “l'environnement de travail du
chercheur, qu'il soit humain ou matériel doit être considérablement amélioré”. Un constat qui vient relativiser l'augmentation des budgets de la recherche de 25%.
Les deux autres recommandations portent sur "la reconnaissance à sa juste valeur de la thèse de doctorat" et "un rapprochement progressif des carrières des chercheurs et des enseignants-chercheurs". L'Académie relève notamment la fonction d'enseignant-chercheur est incompatible avec l'exercice de la recherche à très haut niveau.
La ministre a accusé réception du rapport, sans y répondre pour l'instant. L'urgence est de mise, car dans les cinq prochaines années, un quart des chercheurs ou enseignants-chercheurs vont partir en retraite. Valérie Pécresse comptait sur cette courbe démographique pour éponger la précarité dans le secteur... encore faut-il qu'il y ait assez de jeunes performants intéressés pour prendre la relève.
Grégoire Lecalot, avec agences
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