Des soldats français ont-ils servi de cobaye lors des essais nucléaires ?
L'armée française a délibérément exposé ses soldats à des radiations lors des essais nucléaires atmosphériques au début des années 60 en Algérie, à des fins d'expérimentation, selon un rapport militaire.
Le document intitulé “La Genèse de l'organisation et les expérimentations au Sahara” aurait été rédigé “par un ou des militaires anonymes”. “Il daterait de 1998”, après l'abandon définitif des essais.
_ Le ministre de la Défense affirme qu'“une synthèse de ce rapport avait été faite en janvier 2007 par le ministère de la Défense et diffusée”.
Une deuxième synthèse a été également réalisée sur les essais en Polynésie.
La synthèse publiée en 2007 relatait “les expérimentations tactiques durant les opérations Gerboise verte et Gerboise rose”, explique le ministre Hervé Morin.
_ Extrait du documentaire “Gerboise Bleue”, sur le tir effectué en 1960 :
_ Rappelant le vote de la loi d'indemnisation des victimes des essais qui instaure “une présomption de cause”, Hervé Morin a indiqué avoir demandé “à l'Académie des sciences une étude complémentaire sur chaque tir et le niveau d'exposition”.
“Les conclusions de cette étude seront publiques”, avant de promettre: “toute la transparence sera faite”.
Envoyer délibérément des hommes en zone contaminée
_ Le rapport fait référence notamment au dernier tir atmosphérique dans le Sahara algérien, baptisé “Gerboise verte” le 25 avril 1961.
Peu après ce tir, deux manoeuvres ont été organisées pour envoyer des hommes
en zone contaminée: certains s'étaient abrités dans des trous d'hommes à 800
mètres du point d'impact et d'autres se sont approchés en camions 4x4.
Le but était “d'étudier les effets physiologiques et psychologiques produits
sur l'homme par l'arme atomique, afin d'obtenir les éléments nécessaires à la
préparation physique et à la formation morale du combattant moderne”, précise le rapport.
_ Après l'explosion, “les résultats constatés étaient les suivants”, précise
le rapport: “absence de brûlures apparentes, effets mécaniques pratiquement nuls (légère projection de sable), mesure de radioactivité relevée sur les
mannequins”.
“Il semblait d'après ces résultats qu'à 800 mètres du point zéro et en
dehors de la zone de retombées, le combattant aurait été physiquement apte à
continuer le combat”, mais le rapport reconnaît que “dans l'offensive, si l'infanterie était appelée à combattre en zone contaminée (...) les vêtements spéciaux ne lui confèreraient qu'une protection relative et il faudrait réduire la durée du séjour des unités dans une telle zone”.
La France a procédé à 210 tirs depuis le premier au Sahara en 1960 jusqu'à l'ultime expérimentation de 1996 en Polynésie française.
Des milliers de vétérans des essais nucléaires, persuadés d'avoir été contaminés par la radioactivité, se battent pour la reconnaissance de leur préjudice.
Mikaël Roparz, avec agences
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