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Clap de fin sur la base aérienne 112 de Reims

Le défilé militaire du 14 juillet marquait la fermeture de la BA112 de Reims, ouverte il y a près de 100 ans. C’est l’un des 83 sites dont la disparition a été programmée en 2008 par la nouvelle carte militaire avec, à la clé, 54.000 suppressions de postes dans l’armée. Les derniers Mirage F1 ont décollé ce matin de Reims pour rejoindre leur nouvelle base d’affectation, la BA118 de Mont-de-Marsan. Dans le bassin rémois, l’émotion fait maintenant place à l’inquiétude quant à l’avenir de ce site qui sera démantelé dans quelques mois.
Article rédigé par franceinfo
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"Voilà, c’est fini. Cette fois c’est fini", lâche le colonel Servat, commandant en second de la base aérienne de Reims, ancien pilote de chasse, après le décollage ce matin à 10h10 du dernier Mirage F1-CR de la base. Les quatre derniers chasseurs de l’escadron de reconnaissance 2-33 Savoie ont gagné leur nouvelle base d’affectation, la BA118 de Mont-de-Marsan, après un crochet par le ciel parisien pour participer au défilé du 14-Juillet.
_ Dernière mission au départ de Reims pour le capitaine Sébastien Estève, commandant d’escadrille, avec un petit pincement au cœur. Un "au revoir aux gens, aux pilotes et aussi aux familles", symbolisé par "un petit battement de plan" que le pilote aura effectué lors d’un ultime passage au-dessus du tarmac rémois.

Dans un an, les "liquidateurs" de l’armée de l’air transmettront le site aux collectivités locales. D’ici là, les derniers des 1.600 militaires qui travaillaient sur la base auront quitté la région : un manque à gagner de 70 à 80 millions d’euros annuels pour l’économie locale, et le départ de 800 enfants scolarisés.

Trois ans après la décision de fermeture de la BA112, aucun projet n’est encore véritablement sur les rails. Car depuis 2008, la maire socialiste de Reims Adeline Hazan n’a eu de cesse de pousser un projet de nouvel aéroport, dédié à l’aviation d’affaires. Une "bêtise aéroportuaire" dénoncée depuis le début par l’association Vacarmes, une association citoyenne, apolitique, forte aujourd’hui de plus de 1.300 adhérents.

Avec Roissy-CDG à 30 minutes de TGV, l’aéroport international (aéroport fantôme – lire notre "Plus France Info") de Paris-Vatry à 40 minutes de voiture, un aérodrome civil à Prunay aux portes de Reims, ce projet d’"aéroport de plus" est "une absurdité", martèle le porte-parole de Vacarmes. Et Eric Fimbel de pointer "l’incompétence" du "G15" chargé de réfléchir à l’avenir du site, augmentée du "délire de puissance (et de) l’égo surdimensionné" des élus rémois.

Car un projet aéroportuaire "inutile, coûteux et polluant" amènerait seulement une centaine d’emplois, beaucoup de nuisances et il exonèrerait les repreneurs d’une dépollution du site (métaux lourds, hydrocarbures), une pollution sur laquelle les élus Verts de Reims ont mis un mouchoir durant trois ans.

Quelles sont alors les alternatives à l’aéroportuaire ?

Une demi-douzaine de projets, compatibles et porteurs sur le plan économique (Cité du cheval, Cité du patrimoine, Ferme pédagogique, Résidences pour personnes âgées etc.), qui pourraient permettre de créer jusqu’à 2.800 emplois. Des projets "qui combinent le développement durable, l’économique, le social en terme d’emplois non délocalisables et la qualité de vie des riverains actuels et futurs", résume le porte-parole de Vacarmes. "Donc on a de quoi être intelligents", ajoute-t-il.

Mais aucune décision n’a encore été prise. Tout juste l’abandon du projet d’aéroport a-t-il été évoqué il y a quelques jours seulement.
_ "On a des vrais problèmes de pratiques politiques, de pratiques citoyennes, de transparence. On a même la preuve de falsifications de documents destinées à faire croire que l’aéroportuaire n’était pas cher", affirme Eric Fimbel. Le porte-parole de Vacarmes de dénoncer également des conflits d’intérêt visant des décideurs, juges et parties dans cette affaire.

Face à la détermination de ces militants et à la solidité de leurs arguments, Adeline Hazan a fini par abdiquer. Il n’y aura pas d’aéroport sur les 540 hectares de la BA112, mais il faudra beaucoup de temps pour reconvertir le site. Le temps d’aménagement moyen pour une collectivité est de 10 ha par an. A ce rythme-là, "il nous faudrait 50 ans, donc on ne va pas pouvoir l’aménager d’un seul coup", reconnaît la maire de Reims. A Reims, on se serait "bien passé de cette verrue", ajoute son directeur de cabinet.

Reportage à Reims : Gilles Halais

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