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50 ans après Mai 68, les nouveaux combats de l'émancipation : Mathilde milite pour l'accueil des réfugiés

Publié Mis à jour
Article rédigé par Anne Lamotte
Radio France

Ils n'ont pas fait Mai 68. Cinquante ans plus tard, ils vont faire 2018. Chaque jeudi, franceinfo met en avant un combat, un visage, une voix. Mathilde, 23 ans, termine Science Po et est en stage dans une association qui vient en aide aux réfugiés.

Au rez-de-chaussée du GAS, le Groupe accueil et solidarité, en plein centre de Villejuif, près de Paris, comme dans une brocante, des tables, des commodes, des canapés. Au premier étage, des armoires pleines de livres, de couverture et de linge. Et au bout d'un couloir, Mathilde, en entretien avec un père de famille, venu de Guinée, son épais dossier sous le bras.

Mathilde en stage dans une association d'aide aux réfugiés : un portrait d'Anne Lamotte

"Vous avez envoyé ce dossier-là à la CAF ?", l’entend-t-on répondre à son interlocuteur. Le statut de réfugié a été obtenu, la famille est au complet, les enfants vont à l'école, mais ce n'est pas pour cela que les ennuis sont terminés : obtenir un logement, bénéficier des allocations familiales ou d'un titre de séjour, faire des demandes, des recours...

Difficile et frustrante

"Tout est compliqué, tout prend du temps. On se retrouve tout le temps face à des murs", soupire Mathilde. L'étudiante est justement là pour aider les demandeurs d'asile et les réfugiés à franchir les murs, boucler les démarches juridiques. Une mission est difficile, frustrante, reconnaît-elle, mais qu'elle adore.

Tout a commencé pour Mathilde il y a un peu moins deux ans à Calais et sa "jungle". Pendant des mois, l’étudiante y fait du bénévolat et y trouve sa vocation. Et, aussi, les problèmes qui vont avec : "On veut nous fatiguer constamment en nous interdisant de nous garer à tel endroit, en nous disant d’entrer de telle manière", se souvient-elle.

Elle ne compte plus les amendes, la fourrière, les rires des policiers quand elle se rend au commissariat, et leurs questions insidieuses : "Qu’est-ce que vous faites là-bas ? Vous trouvez que c’est un vrai travail ? Vous vous financez comment ? Ah, vous êtes bénévole…" On va même jusqu’à suggérer, alors qu’elle est dans sa voiture avec un homme en train de discuter, près du camp, qu’elle se prostitue… 

On ne va jamais critiquer un médecin pour le métier qu’il fait. Nous… pas mal quand même !

Mathilde

à franceinfo

Mathilde est fatiguée, aussi, par les "pseudo analyses" sur l'immigration qu'elle entend au quotidien : "J’en ai un peu marre des discours qui veulent nous faire croire qu’on ne peut pas accueillir. On nous fait croire qu’il y a trop de gens. Si, on peut accueillir : on est loin d’être submergés..." La preuve, d'après elle, avec des initiatives locales comme cette association, Groupe accueil et solidarité à Villejuif. Une petite structure, à l'ambiance familiale. Cinq salariés, une cinquantaine de bénévoles pour environ 900 personnes reçues par an, et cela fonctionne depuis maintenant bientôt quatre ans. "Bien sûr", conclut la jeune femme, plus remontée et motivée que jamais, qu'on peut accueillir tout le monde. "Certains me traiteront d’utopiste, sourit-elle. Mais je pense que c’est possible."

Retrouvez la série "Sous les pavés 2018, les nouveaux combats", en intégralité, tous les jeudis à 22h10 et 23h40 sur franceinfo et franceinfo.fr

Libertés individuelles, droits des femmes, lutte contre les discriminations, rejet de toute forme d’exclusion, protection de l’enfance... Cinquante ans après Mai 68, le plus important mouvement de contestation politique, sociale et culturelle de l’histoire récente française, franceinfo donne la parole, chaque jeudi, à celles et ceux qui portent les nouveaux combats de l'émancipation et des libertés.

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